A Bondy, Martin Schulz tente d'éveiller l'identité européenne de lycéens
Bonne idée que de tenter d’expliquer l’Europe à des jeunes en cette année électorale européenne. Martin Schulz est venu comme président du Parlement européen sortant mais aussi comme tête de liste des socialistes européens et surtout comme candidat à la présidence de la commission européenne, en lieu et place de Jose Manuel Baroso.
La rencontre entre les lycéens et les deux hommes politiques a lieu à l’initiative du think tank Europanova. Elle se déroule au cœur des terres politiques de Claude Bartolone, au lycée Jean Renoir de Bondy, en Seine-Saint-Denis. L’accueil est chaleureux, la cour du lycée n’est pas habituée à voir des personnalités accompagnées d’un préfet en uniforme et de caméras de télévisions.
Pendant une bonne heure, Martin Schulz et Claude Bartolone vont répondre aux questions des jeunes sur les thèmes «Qui pilote l’Europe ?» et «Quels jobs d‘avenir en Europe pour les jeunes ?». Martin Schulz raconte sa première expérience européenne. C’était au cours d’un échange scolaire en 1971, avec un lycée à Bordeaux. «J’étais dans une famille de résistants. Le père n’était pas très pro-allemand, c’est un euphémisme. Il ne voulait pas de boches à table. Mais ses enfants l’ont convaincu. Moi, j’étais le fils d’un Allemand qui avait occupé la France. C’est là que j’ai compris ce qu’était l’Europe et que j’ai décidé de m’engager pour que les désastres européens ne se reproduisent plus», raconte le social démocrate allemand dans un excellent Français.
«L’intégration européenne n’est pas irréversible»
Mais visiblement, les lycéens ne s’accrochent guère à l’Histoire et sont plus intéressés par les questions de formation et d’emploi. Sujets très concrets qui déstabilisent légèrement les deux élus. Ces questions de formation ne dépendent pas vraiment de l'Europe.
Schulz et Bartolone sont plus à l’aise dans le politique. Dans la perspective des Européennes de mai, Martin Schulz se montre inquiet à propos de la montée éventuelle des nationalismes en Europe. «Renationaliser la politique en Europe, c’est un désastre. Les préjugés sont de nouveau là. L’Europe est menacée, l’intégration européenne n’est pas irréversible», tente-t-il d’alerter les lycéens. Claude Bartolone fait d’ailleurs un parallèle avec l’URSS qui ne savait pas quelques instants avant de disparaître qu’elle allait imploser.
Un lycéen d’Alfred Nobel de Clichy demande quel est le poids du Parlement européen. «70% de la législation nationale se fait à la suite de directives ou de règlements européens. Le Parlement européen a comme législateur un poids énorme. Mais, convient Martin Schulz, cela ne correspond pas à notre perception.»
Interrogé sur l’existence d’une identité européenne, le président du PE se montre prudent, loin de tout fédéralisme: «L’Europe n’est pas là pour remplacer les identités nationales. Elle ajoute une identité européenne. basée sur des valeurs communes.»
«Les démons qui ont détruit l’Europe existent toujours»
A la suite d’une question sur les succès de l’économie allemande qui pourrait être un exemple, Martin Schulz revient sur l’Histoire. «Je suis le député d’un pays qui a dit nous somme mieux que les autres. Un pays qui a eu une volonté exterminatrice. Alors la réponse est plus jamais ça, il faut une communauté de nations. Or, aujourd’hui j’ai peur», dit-il en citant les propos de divers leaders européens, comme Le Pen, Bossi en Italie ou un leader hongrois. «Les démons qui ont détruit l’Europe existent toujours.»
Assez loin des préoccupations des lycéens, Martin Schulz sait défendre l’idée européenne et le futur poids du parlement avec cette possibilité nouvelle de décider du prochain président de la Commission européenne. Il se montre particulièrement convainquant sur le passé de l’europe. «Je suis sûr que la guerre ne va pas revenir en Europe, sauf si nous détruisons l’Europe. Chaque nation doit être fière. La France peut être fière des idées qu’elle a apportées au monde. Mais comment etre fier d’être allemand en 1945? Or, l’Europe a permis aux Allemands d’entrer dans la communauté des nations.»
Mais les propos portés par Martin Schulz sur la guerre, le nazisme ou les menaces qui pèsent sur l'Europe ne semblent guère émouvoir les lycéens. La guerre de 39-45 est loin, celle de 14-18 encore plus. Nombre d’entre eux ne sont, de plus, pas d’origine européenne. Résultat: à la fin de l’échange, quand on redemande aux lycéens s’ils se sentent européens, la majorité des mains reste baissée.
«J’ai trouvé cette question un peu artificielle. Demander ça a un jeune de 17-18 ans ! On a besoin de temps, de lier cette question à des choses concrètes. Il manquait un peu de temps», lâche le président du Parlement européen aux journalistes après la réunion.
Il reste quatre mois jusqu’aux élections.
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