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On vous explique la méthode controversée de la chasse à la glu, que cherche à interdire la Ligue de protection des oiseaux

Le Conseil d'Etat avait rejeté, le 28 décembre, le recours des défenseurs des oiseaux contre cette méthode de chasse. 

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Les merles font partie des oiseaux chassés avec de la glu. (MICHEL RAUCH / BIOSPHOTO / AFP)

La Ligue de protection des oiseaux (LPO) a annoncé, jeudi 3 janvier, une plainte contre la France devant la Commission européenne, après le rejet par le Conseil d'Etat d'une demande d'interdiction de la chasse à la glu. Cette chasse "traditionnelle" consiste à capturer des oiseaux à l'aide de tiges en bois enduites de colle pour qu'ils servent ensuite d'appâts. On vous explique pourquoi elle est controversée. 

1En quoi consiste cette chasse ?

Cette chasse "traditionnelle", aussi appelée chasse au "gluau", consiste à capturer des oiseaux, notamment des grives et des merles, à l'aide de tiges en bois enduites de glu. Ces tiges, appelées verguettes, sont posées sur des arbres ou buissons autour d'une cabane construite par le chasseur. Pour attirer les oiseaux, un ou plusieurs "appelants", c'est-à-dire des volatiles déjà capturés, sont enfermés dans une cage.

2Mais pourquoi utiliser de la colle ?

Les oiseaux prisonniers de cette glu ne sont pas directement tués. Ils sont décollés à l'aide de cendre ou de dissolvant, puis sont nettoyés avant d'être mis en cage. Ils sont gardés vivants avant d'être ultérieurement placés dans des cages afin d'attirer, par leur chant, leurs congénères, alors tirés au fusil. Les oiseaux non chassables capturés accidentellement doivent être nettoyés et relâchés. Les "appelants" sont eux aussi relâchés à la fin de la saison de chasse, indique la Fédération régionale des chasseurs de Provence-Alpes-Côte d'Azur"Seuls les grives draines, litornes, mauvis et musiciennes et les merles noirs peuvent être utilisés comme appelants", précise l'arrêté du 17 août 1989.

3Elle est pratiquée dans toute la France ?

Non, la chasse à la glu est autorisée dans cinq départements (Alpes-de-Haute-Provence, Alpes-Maritimes, Bouches-du-Rhône, Var et Vaucluse) pour une capture sélective des grives et des merles noirs. Des quotas sont définis par départements. Il est par exemple de 15 000 par an dans les Bouches-du-Rhône, précise l'Association nationale de défense des chasses traditionnelles à la grive. Le nombre de captures doit être noté par le chasseur dans un carnet tenu quotidiennement à jour et renvoyé au préfet avant le 31 décembre de chaque année. 

En règle générale, la période autorisée pour cette chasse va du début du mois d'octobre au 15 décembre. Le temps de chasse commence au lever du jour et se termine à 11 heures du matin. 

4Que dénoncent les associations de protection des oiseaux ?

Les défenseurs des oiseaux se battent depuis des années contre cette méthode, qu'ils qualifient de "cruelle" et jugent néfaste pour la santé des oiseaux capturés. "Penser qu'une fois délivrés et relâchés, les oiseaux sont sauvés et peuvent réintégrer leur environnement sans dommage est illusoire : des lésions des plumes, de l'appareil musculo-squelettique, des contaminations par la glu et les solvants, des atteintes métaboliques peuvent impacter à court terme la survie des oiseaux", détaille un rapport du Centre national d'informations toxicologiques vétérinaires, relayé par la Ligue de protection des oiseaux. 

Au-delà de ces risques, la LPO met en avant le risque que d'autres espèces que celles visées soient prises au piège, comme les mésanges, les rouges-gorges, voire certains rapaces. S'ils peuvent subir les conséquences de la glu sur laquelle ils s'arrachent les plumes, ils sont également victimes des solvants utilisés par les chasseurs pour les décoller, assure Yves Verilhac.

5Que signifie cette décision du Conseil d'Etat ?

La LPO avait déposé un recours auprès du Conseil d'Etat pour abroger l'arrêté du 17 août 1989 relatif à l'emploi des gluaux. Mais les juges du Conseil d'Etat ont rejeté cette demande, estimant que la réglementation prévoit déjà "un régime d'autorisation et de contrôle rigoureux". En effet, une directive européenne de 2009 interdit les "méthodes de capture ou de mise à mort massive ou non sélective" d'oiseaux, notamment la chasse à la glu, mais prévoit des dérogations quand "il n'existe pas d'autre méthode satisfaisante".  

La plus haute juridiction administrative justifie sa décision par les quotas de volatiles pouvant être chassés, fixés chaque saison, en fonction des prises réalisées par les chasseurs. A l'annonce de cette décision, les membres de la LPO se sont dit "plus déterminés que jamais" et ont annoncé, jeudi 3 janvier, une plainte contre la France devant la Commission européenne.

6Comment les chasseurs ont-ils réagi ?

L'Association nationale de défense des chasses traditionnelles à la grive, saluant la décision du Conseil d'Etat, a de son côté dénoncé sur son site internet des "campagnes de dénigrement infondées" de la part d'"Ayatollahs, apôtres de la pensée unique". La décision du Conseil d'Etat "met fin à une période extrêmement pénible pour tous les passionnés de ce mode de chasse (...) Il est donc grandement temps que toutes les personnes prenant part à ces campagnes anti-glu, le plus souvent mal documentées voire mensongères, réalisent qu'elles ne seront plus crédibles", ajoute l'association.

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