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Hong Kong : quatre questions sur la situation du campus de PolyU, où des centaines de manifestants sont encerclés par la police

Des centaines de manifestants retranchés dans ce campus ont utilisé des arcs et des cocktails Molotov pour faire face aux forces de l'ordre, dimanche. La police a menacé de répondre avec des "balles réelles" aux "armes létales" des protestataires.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Encerclés par la police, des manifestants quittent l'université polytechnique de Hong Kong en descendant en rappel d'une passerelle, le 18 novembre 2019 au soir. (YE AUNG THU / AFP)

Et si, après plus de cinq mois de contestation, la révolte à Hong Kong se cristallisait autour d'un campus universitaire ? Plusieurs centaines de manifestants faisant partie du noyau dur des opposants à l'influence de Pékin occupent depuis samedi 16 novembre le campus de l'Université polytechnique de Hong Kong, surnommée PolyU.

Retranchés dans ces locaux situés sur la péninsule de Kowloon, ils sont désormais cernés de toutes parts par la police qui multiplie les arrestations, après avoir menacé de répondre avec des "balles réelles" aux "armes létales" des protestataires.

Franceinfo revient sur ce qui est devenu le face-à-face le plus tendu depuis le début du mouvement.

1Comment les protestataires se sont-ils installés sur le campus ?

Après l'évacuation d'une première université, vendredi, les manifestants les plus virulents contre l'influence de Pékin sur l'archipel ont commencé à occuper le lendemain le campus de la PolyU. Un lieu "beaucoup plus compact, qui est devenu le nouveau bastion de la résistance et de la rébellion antigouvernementale", écrit Le MondeLes lieux ont également le mérite d'occuper "une position stratégique, à la sortie du tunnel central, le plus fréquenté des trois tunnels qui relient l’île de Hong Kong au reste du territoire de la région administrative spéciale", et qui est bloqué depuis mardi. 

Affrontements entre la police et des manifestants non loin du campus de l'université polytechnique de Hong Kong, le 18 novembre 2019. (DALE DE LA REY / AFP)

Dès dimanche, de violents affrontements avec les forces de l'ordre ont éclaté. Des protestataires ont volé des arcs de compétition sportive de l'université et fabriqué des catapultes pour lancer des briques. La police a déclaré qu'un de ses officiers avait été touché au mollet par une flèche.

Les forces de l'ordre ont répliqué en déployant des canons à eau et en tirant de nombreuses grenades lacrymogènes contre les manifestants retranchés sur le campus.

2Quelle est la situation sur place ?

La situation a empiré dans la nuit de dimanche à lundi. Des manifestants ont incendié à coups de cocktails Molotov un blindé de la police qui tentait de forcer une barricade située non loin de l'université.

En fin de nuit, les manifestants ont incendié la principale entrée de ce campus, après avoir repoussé un assaut de la police. 

En réaction, les forces de l'ordre ont refoulé les protestataires qui tentaient de fuir le campus en utilisant de nombreuses grenades lacrymogènes, contraignant les occupants à se replier à l'intérieur de l'université. Des dizaines de personnes ont été arrêtées, parfois très violemment. La police a également annoncé qu'un de ses officiers avait tiré trois balles réelles face aux "armes létales" des manifestants radicaux, en précisant que personne n'avait été blessé.

Cette stratégie a eu pour effet de placer la PolyU en véritable état de siège. Alors que l'occupation avait commencé de façon organisée, la confiance des protestataires est en chute libre avec le blocage désormais total de la police qui empêche tout ravitaillement en nourriture, notamment.

Quelques dizaines de manifestants assiégés par la police ont toutefois réussi lundi soir à s'enfuir du campus en descendant en rappel d'une passerelle, avant d'être récupérés sur une route en contrebas par des personnes à moto.

3Comment la population réagit-elle ?

D'après la correspondante du Monde dans l'archipel, l'annonce par les autorités de tirs à balles réelles sur le campus ainsi que le partage sur internet d'images de policiers s'échangeant des armes semi-automatiques "ont déclenché une vague de panique et de soutien d’une partie de la population, inquiète pour ses jeunes présents sur le campus", et qui seraient quelques milliers.

En solidarité, des Hongkongais se sont alors rapprochés de la zone de tension, "pour bloquer les véhicules de police ou pour tenter des diversions", écrit la journaliste. Le quotidien fait également état de barricades dressées sur l'un des principaux axes du territoire situés non loin du campus, "afin de soutenir moralement les occupants de PolyU et compliquer la ­tâche de la police".

4Dans quel contexte cette situation a-t-elle émergé ?

Ces scènes de siège se déroulent alors que la mobilisation en cours dans l'ex-colonie britannique depuis plus de cinq mois a basculé la semaine dernière dans une phase beaucoup plus radicale et violente, qui a entraîné entre autres la fermeture des écoles.

L'exécutif hongkongais, qui est aligné sur Pékin, s'est refusé à accéder aux revendications des manifestants, qui demandent notamment l'avènement du suffrage universel dans la mégapole de 7,5 millions d'habitants, et une enquête sur les violences policières. Au contraire, la Chine a maintes fois averti qu'elle ne tolérerait pas la dissidence, et l'inquiétude monte face à la possibilité d'une intervention chinoise pour régler cette crise politique inédite.

>> GRAND FORMAT. "Nous perdons nos libertés" : ces habitants de Hong Kong se battent pour préserver leur identité face à la Chine

La contestation était montée d'un cran lundi dernier avec une nouvelle stratégie baptisée "Eclore partout" ("Blossom Everywhere"), qui consiste à multiplier les actions – blocages, affrontements, vandalisme – pour éprouver au maximum les capacités de la police. Conséquence : un blocage quasi général des transports en commun la semaine dernière pendant cinq jours. Lundi, les écoles n'ont pas rouvert.

Les protestataires entendent toutefois poursuivre les blocages pour "étrangler l'économie" d'un des principaux centres financiers de la planète, désormais en récession.

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