Cet article date de plus de quatorze ans.

Au lendemain de sa libération, Aung San Suu Kiy a lancé un appel dimanche à l'unité des forces démocratiques birmanes

Alors que sa peine de sept ans d'assignation à résidence a pris fin samedi, l'opposante birmane a fait son retour sur la scène politique en prononçant un discours au siège de son parti.Elle s'est adressée à ses compagnons de la Ligue nationale pour la démocratie (LND) et aussi à des milliers de partisans venus l'écouter.
Article rédigé par France2.fr avec agences
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 7min
Aung San Suu Kyi apparaît à la grille de sa maison après l'annonce de sa libération (13 novembre 2010) (AFP)

Alors que sa peine de sept ans d'assignation à résidence a pris fin samedi, l'opposante birmane a fait son retour sur la scène politique en prononçant un discours au siège de son parti.

Elle s'est adressée à ses compagnons de la Ligue nationale pour la démocratie (LND) et aussi à des milliers de partisans venus l'écouter.

"Je veux travailler avec toutes les forces démocratiques", a déclaré la lauréate du prix Nobel de la paix. "Je n'ai aucune rancune à l'égard de ceux qui m'ont détenue. Je crois en les droits de l'homme et en la règle de droit", a indiqué l'opposante, vêtue d'une tenue traditionnelle bleu foncé. "La démocratie, c'est la liberté d'expression", a-t-elle insisté. "J'ai besoin de l'énergie du peuple (...). Je veux entendre la voix du peuple et, ensuite, nous déciderons de ce que nous voulons faire."

Aung San Suu Kyi a été accueilli au siège de la LND par des milliers de partisans en liesse. Elle s'y est entretenue avec des diplomates étrangers.

Son avocat, Nyan Win, a confirmé que sa libération s'est faite sans condition. "Elle est complètement libre et elle est très heureuse", a-t-il déclaré.

Aung San Suu Kyi est libre
Assignée à résidence depuis sept ans, Aung San Suu Kyi a été libérée samedi, à l'expiration de sa peine.

L'opposante birmane, prix Nobel de la Paix, est apparue souriante aux grilles de sa maison quelques minutes après avoir pris connaissance de son ordre de libération.

Des responsables officiels sont entrés dans la maison d'Aung San Suu Kyi samedi vers 17h heure locale pour lui lire l'ordre de libération de la junte, selon le responsable cité par l'AFP. Puis la police a enlevé les barrières menant à la maison.

Une demi-heure plus tard, l'opposante est apparue devant une foule qui s'était rassemblée devant chez elle, et elle a prononcé quelques mots inaudibles tant ils étaient couverts par les hurlements de joie et les applaudissements.

Des centaines de journalistes, de militants et de simples habitants de la région s'étaient rassemblés à Rangoun devant la maison d'Aung San Suu Kyi, à l'annonce de sa libération prochaine.


Sa libération intervient moins d'une semaine après les premières élections en 20 ans, dénoncées comme une mascarade par l'Occident. La dissidente, que le généralissime Than Shwe déteste, a vécu en résidence surveillée sans interruption depuis 2003 et pendant plus de 15 des 21 dernières années.

En mai 2009, elle était libérable lorsqu'un illuminé américain avait réussi à nager jusqu'à son domicile de Rangoun, situé sur les rives d'un lac. En août, elle était condamnée à 18 mois supplémentaires de résidence surveillée. Cette nouvelle condamnation l'a de facto écartée des élections de dimanche, les premières depuis 20 ans, dont la victoire a déjà été revendiquée par le parti spécialement créé par la junte, avant même les résultats officiels.

Aung San Suu Kyi et son parti, la Ligue nationale pour la démocratie (LND), avaient remporté une large victoire aux élections de 1990 mais la junte avait refusé d'honorer les résultats. La LND a boycotté les élections de dimanche. Et du coup, elle a été dissoute par la junte.

Le président américain Barack Obama s'est félicité de la libération d'Aung San Suu Kyi et a réclamé la libération de tous les détenus politiques birmans.

Le secrétaire général de l'Onu Ban Ki-moon a aussi salué sa libération, qu'il a qualifiée d'"exemple" pour le monde, tout en appelant la junte à libérer l'ensemble des opposants emprisonnés.

Aung Suu Kyi, 20 ans de lutte 15 ans sans liberté

L'opposante birmane Aung an Suu Kyi a été privée de liberté pendant près de 15 ans au total, sur trois périodes distinctes, depuis le début de son combat pour la démocratie en 1988.

- 1989-1995 (six ans) :
En juillet 1989, Aung San Suu Kyi est assignée à résidence. Dix mois auparavant, elle avait mis sur pied la Ligue nationale pour la démocratie (LND), après les émeutes pour l'établissement de la démocratie réprimées dans le sang en août 1988 par la junte. La LND obtient une victoire triomphale aux législatives de 1990, dont la junte rejette le résultat. L'opposante reçoit le prix Nobel de la paix en 1991. Elle recouvre la liberté en juillet 1995.

- 2000-2002 (19 mois) :
En 1998, elle adresse un ultimatum au gouvernement, lui demandant de convoquer l'assemblée élue en 1990, et qui n'a jamais siégé. En septembre 2000, elle est de nouveau placée en résidence surveillée, mais rouvre immédiatement des discussions secrètes et historiques avec la junte, par l'entremise de Razali Ismail, envoyé spécial de l'ONU. En mai 2002, elle est libérée, sous les vivats de milliers de sympathisants et en présence de la presse étrangère.

- Depuis le 30 mai 2003 (plus de sept ans écoulés):
Le convoi dans lequel Mme Suu Kyi circule avec de nombreux autres membres de la LND dans le nord de la Birmanie tombe dans une embuscade apparemment orchestrée par le régime. Quatre morts selon Rangoun, une centaine selon la Ligue. Mme Suu Kyi et de nombreux cadres de la LND sont arrêtés. La dissidente est placée au secret avant d'être de nouveau assignée à résidence chez elle. En mai 2009, alors qu'elle peut espérer être libérée, un illuminé américain s'introduit dans son domicile. Le 14 mai, elle est emmenée dans une prison. La junte la fait condamner en août à trois en de prison et de travaux forcés, puis commue sa peine en 18 mois supplémentaires de résidence surveillée.

Elle reprend des contacts avec les militaires, demande un entretien avec le généralissime Than Shwe, propose d'aider à la levée des sanctions occidentales. Mais les lois électorales de mars 2010 obligent la LND à choisir entre exclure l'opposante, et renoncer au scrutin. Le parti choisi la 2e option. Il est officiellement dissous.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.