Papouasie Nouvelle-Guinée: comment lutter contre la culture du viol
Il y a longtemps que les organisations et associations, de la Banque mondiale à l’ONU, de Human Rights Watch (HRW) à Médecins sans frontières (MSF, voir le nouveau rapport du 1/03/2016), tirent le signal d’alarme. Implantée dans le pays depuis des années, MSF a offert une prise en charge médicale et psychologique complète auprès de 29.000 victimes notamment celles qui ont subi des violences sexuelles et familiales.
Selon une étude de l’ONU réalisée en 2013, 80% des hommes interrogés reconnaissaient avoir déjà agressé leur conjointe. La même année, un rapport de l’association humanitaire américaine ChildFund International pointait, elle aussi, le sort des femmes dans cette partie de l'île de la Nouvelle-Guinée: près de 90% d’entre elles avaient subi des violences lors de leur grossesse et une femme sur deux était violée pendant sa vie.
Rouées de coups
Dans un autre rapport publié fin 2015, Rouées de coups : Violences conjugales en Papouasie Nouvelle-Guinée, HRW y voit des raisons multiples: polygamie, femmes accusées de sorcellerie, ou encore le paiement d’une dot lors des mariages (les femmes sont littéralement achetées par leur mari).
Pourtant, une loi sur la protection de la famille a été promulguée en 2013 prévoyant de nouvelles peines pour les auteurs de violences. Des unités de police spécialisées pour protéger et accompagner les victimes ont été créées. Mais dans les faits, ces mesures sont assez peu appliquées.
D’autres lois plus anciennes allaient dans le même sens. En 1984, une loi interdit la discrimination à l’encontre des femmes et 20 ans plus tard une autre sanctionne la violence conjugale. Mais cela n’a pourtant pas empêché depuis plusieurs années que le viol et les violences faites aux femmes restent des problèmes majeurs pour ce pays.
L’Etat, la police et la justice sont également pointés du doigt et accusés de laxisme dans cette violence endémique, n’apportant aucune réponse adéquate à ces femmes. «Les autorités négligent leurs besoins de sécurité, de services sociaux et d’accès à la justice», déclare HRW. «Lorsque les victimes de violence conjugale grave demandent de l’aide auprès de la police, leurs plaintes sont ignorées, ou bien on leur conseille de retourner vivre auprès de leur mari... Sans assistance de la part de la police, ces femmes se retrouvent à la merci de leur agresseur», précise Heather Barr de HRW.
Changer les mentalités
Mais un long travail pour changer les mentalités doit aussi être mis en place. Près d’un quart des hommes en Asie-Pacifique reconnaissent avoir déjà violé une femme ou une fille. Le viol conjugal en est la forme la plus courante. En Papouasie-Nouvelle-Guinée, le chiffre grimpe à 62%. 73% des hommes considèrent avoir le droit d’assouvir leurs pulsions sexuelles que la femme soit consentante ou pas.
Rachel Jewkes du Medical Research Council déclare: «Au vu des taux élevés de viols présents dans le monde entier, nos résultats montrent clairement que les stratégies de prévention doivent mettre davantage l’accent sur les facteurs de risque structurels et sociaux qui l’entraînent. Nous devons maintenant évoluer vers une culture de prévention des actes de viol afin qu’ils ne se produisent jamais, et non plus concentrer la prévention sur des mesures punitives.»
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