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Les «chaebols», ces trusts mal aimés des Sud-Coréens

Ces groupes ont été le moteur du miracle économique de la Corée du Sud, passée de la misère noire dans les années 50, au rang de quatrième économie d'Asie en quelques décennies. Mais aujourd'hui, de nombreuses critiques estiment que ces groupes empêchent les petites et moyennes entreprises de se développer et de créer un tissu économique dynamique.
Article rédigé par Jean Serjanian
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Manifestants de la Confédération syndicale sud coréenne du Commerce contre les «chaebols» à Séoul, lors de l’éclatement de la crise financière (24-04-98) (AFP PHOTO / LEE JAE-WON)

La croissance de la Corée du Sud d'après la guerre (1950-1953) s'est faite autour de ces énormes conglomérats appelés chaebols («association des entrepreneurs»). Ils représentent aujourd’hui 15% du PIB coréen et 75% des exportations coréennes dont 50% sont réalisées uniquement par les quatre plus grands ─ Samsung, LG, Hyundai Motors, SK Group (énergie et chimie) ─, devenant incontournables pour l’Etat coréen.

L'empire Samsung


Un Oeil sur la Planète, janvier 2011

Ces mastodontes sud-coréens exportent à travers le monde des voitures (Hyundai, Kia), des navires (Hyundai Heavy) ou encore de l'électronique (Samsung, LG). Mais, revers de la médaille, ils ont aussi été l'une des principales causes de la crise financière de 1997-98 en Corée du Sud, en raison de leurs dettes faramineuses accumulées pour financer leur expansion.

De timides réformes ont tenté de les modifier, mais les familles fondatrices de ces groupes continuent de contrôler ces empires via des participations croisées, bien qu'elles ne détiennent en réalité qu'une faible participation dans le capital.

Ces gigantesques conglomérats sud-coréens sont aujourd'hui la cible de toutes les critiques des candidats à l'élection présidentielle du 19 décembre 2012. Moteurs du redressement du pays après la guerre, ils sont désormais accusés de concurrence déloyale, profitant de leur taille pour investir tous les secteurs, d'étouffer l'économie et les petites entreprises, de freiner l'innovation et les créations d'emplois.

Proposition de réforme
Les trois candidats à l'élection, y compris la candidate du parti conservateur, traditionnellement pro-entreprises, ont tous proposé une série de réformes destinées à réduire l'emprise des chaebols sur l'économie sud-coréenne.

- Park Geun-Hye, la candidate du parti conservateur actuellement au pouvoir, veut des peines plus lourdes pour les patrons de chaebols condamnés pour corruption ─ et parfois amnistiés par le pouvoir. Elle veut aussi imposer des restrictions sur les investissements croisés entre leurs multiples filiales.

- Ahn Cheo-Soo, le candidat indépendant qui a fait fortune dans l'informatique, est le plus acerbe. Il estime que son pays connaîtrait plus de succès semblables au sien si les chaebols étaient moins puissants. «Il n'y a pas d'avenir dans le système économique actuel, où la richesse et les opportunités sont dominées par quelques uns», a-t-il renchéri la semaine dernière. «Je changerai cette situation injuste». Il a notamment promis de revoir la gouvernance de ces conglomérats et de les empêcher d'investir de nouveaux secteurs où ils tuent à petit feu les petites entreprises.

- Moon Jae-In, du Parti uni démocrate (opposition, centre-gauche), s'est engagé à diviser les chaebols en unités plus petites et à relâcher l'étreinte des familles fondatrices sur leur direction.

Pour les observateurs de la vie politique en Corée du Sud, les électeurs se montrent désormais plus soucieux de protection sociale et des disparités entre les revenus qu'auparavant, des sujets qui n'étaient pas la priorité du président Lee Myung-Bak dont le mandat s'achève en décembre. Surnommé «Monsieur économie», Lee, un ancien de la division construction du conglomérat Hyundai, est accusé par ses opposants de compter surtout sur les chaebols pour tirer la croissance.

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