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La Mongolie, pays pauvre courtisé pour ses richesses minières

Enclavée entre la Russie et la Chine, la Mongolie est un pays très pauvre, avec la densité de population la plus faible au monde. Mais ses immenses richesses minières, très convoitées, nourrissent sa croissance.
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
La Mongolie, un pays très peu peuplé, couvert de steppes et de déserts (AFP - Hemis.fr - Emmanuel Berthier)

La démocratie après 70 ans de tutelle soviétique
Entre 1921 et 1990, la République populaire de Mongolie a vécu sous la tutelle soviétique. L’héritière de l’immense empire de Gengis Khan, le mythique souverain du XIIIe siècle, a su se dégager en douceur de cette pesante férule qui exploitait avidement ses ressources minières. En 1992, elle s’est dotée d’une Constitution établissant un régime démocratique.

En 1996, la principale formation d’opposition, le Parti démocratique, qui se définit comme libéral et social-démocrate, gagne d’une courte tête les élections au Grand Houral (Parlement), mettant fin à la suprématie des communistes du Parti révolutionnaire du peuple mongol (PRPM). Vont alors se succéder, durant une douzaine d’années, de fragiles coalitions entre les deux partis.
 

CARTE MONGOLIE (AFP/LF)

 

Un tournant en 2008
En juin 2008, le PRPM emporte le scrutin législatif. Pendant la campagne, les deux grands partis ont chacun fait de la surenchère: en cas de victoire, les démocrates promettaient à chaque citoyen l’équivalent de 550 euros, leurs adversaires 820…

De violentes émeutes éclatent lorsqu’est proclamée la victoire des anciens communistes : plusieurs milliers de manifestants, qui contestent le résultat, ravagent l’immeuble de l’ex-PC à Oulan Bator, la capitale. Le président Nambarlin Enkhabayar, issu du PRPM, proclame l’état d’urgence. Cinq personnes sont tuées, plus de 300 blessées.

Pour le pays, habitué «à une vie politique animée et chaotique mais jamais violente», ces évènements sont un «choc». Au-delà des violences, la crise survient à un moment clef, après la découverte d’immenses réserves de charbon, de cuivre et d’or, qui attirent la convoitise des Chinois et des Occidentaux. Les richesses minérales (plus de 40 % du PIB) portent la croissance dans une période de hausse des matières premières.

Une répartition inégale de la croissance
Pour certains observateurs, les émeutes expriment la «frustration économique» des Mongols. Ceux-ci s’interrogent notamment sur la répartition de la croissance qui ne profite qu’à 10 % de la population dans un pays parmi les plus pauvres d’Asie : un tiers des 2,7 millions de Mongols (dont 1,2 million à Oulan Bator) ne vivent qu’avec 1,30 euro par jour (chiffre 2008).
 

Le siège de l'ex-PC mongol à Oulan Bator, mis à sac lors des émeutes de 2008 (AFP - TEH Eng Koon )

 

En 1999 et 2000, des intempéries ont aggravé la situation économique, notamment celle de l’importante population nomade (plus de 30 % des Mongols). Quelque 3 millions de têtes de bétail (sur un total de près de 20 millions) seraient mortes de faim et de froid. Ces intempéries ont accéléré l’exode rural vers Oulan Bator, accroissant les difficultés sociales dans la capitale.

Le décollage du pays
A la suite des élections de 2009, le président sortant Nambarlin Enkhabayar a été battu par le représentant du Parti démocratique, Tshakhia Elbegdorj, l’un des artisans de la révolution pacifique qui a mis fin au régime communiste. Pour la première fois, le poste échappe à l’ancien PC.

Sous la conduite de Tshakhia Elbegdorj, le pays a connu un développement important. En 2009, la Mongolie a signé un accord de 4 milliards de dollars avec des investisseurs étrangers pour l’exploitation de la mine de Oyu Tolgo (cuivre et or), dans le désert de Gobi (sud). Selon la Banque Mondiale, le développement de ces gisements et les exportations de charbon vers la Chine ont permis à Oulan Bator d’afficher une croissance de 17,4 % en 2011. Le pays est désormais très courtisé par les Etats-Unis et, surtout, son voisin chinois. Un voisin qui est son principal client.
 

Exploitation minière dans la province d'Ömnögov dans le désert de Gobi (sud de la Mongolie) (AFP - Hemis.fr - Emmanuel Berthier)

 

Face à la pression populaire, les autorités ont tenté de renégocier les termes d’un contrat avec les deux plus importants exploitants étrangers, l’australo-britannique Rio Tinto et le canadien Invahoe Mines, pour l’exploitation du gisement d’Oyu Tolgo. En vain.

Stratégie de «troisième voie»
Le pays n’en est pas moins devenu un bon élève de la classe occidentale, dans le cadre d’une stratégie de «troisième voie» pour réduire l’influence de la Chine et de la Russie. «Depuis le démantèlement du bloc soviétique en 1991, la Mongolie a fait des progrès remarquables dans sa transition vers la démocratie et l’économie de marché», note un rapport de l’Union européenne. Et pour les Etats-Unis, le pays est «un brillant exemple à suivre pour les autres nations en transition». Une nation qui a envoyé quelques dizaines de militaires en Afghanistan et plusieurs centaines en Irak.
 

Le président mongol Tsakhiagiin Elbegdorj (en Lituanie le 30-6-2011 (AFP - PETRAS MALUKAS )

 

La présidence de Tsakhiagiin Elbegdorj, considéré comme un «héros de la démocratie» par le think tank républicain américain IRI, s’est traduit par des avancées politiques. En janvier dernier, la peine de mort a été abolie de fait.

En avril dernier, l’ancien président Nambariin Enhkbayar a été arrêté pour corruption malgré une manifestation en sa faveur. Mais en mai, Amnesty International a demandé aux autorités mongoles que l’ex-dirigeant, qui a fait une grève de la faim, «soit traité conformément aux normes internationales en matière de droits humains».

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