Birmanie : la police tire sur les manifestants
100.000 personnes dans les rues de Rangoon. Comme hier et les jours précédents. Comme si la répression ordonnée aujourd'hui par la junte avait renforcé la détermination des manifestants. Car aujourd'hui, pour la première fois, police et soldats ont tiré sur la foule. Des coups de semonce en fait, pas une répression sanglante comme on avait pu le craindre un moment. La police a tiré, d'abord en l'air, puis sur la foule, pour tenter en fait de la disperser. Dernier bilan : trois bonzes et un civil ont été tués, 100 personnes ont été blessées. 200 manifestants ont été interpellés.
Situation sous tension à Rangoun. Mais pas de climat de guerre civile pour autant. C'est le sentiment en tout cas de ce Français qui travaille au centre culturel.
Pas de scènes de panique, et même, parfois, une certaine euphorie.
Dès ce matin, soldats et policiers anti-émeutes avaient pris position autour des pagodes de Rangoun, bouclant totalement les accès. Aux abords de la pagode de Shwedagon, la plus importante du pays, la plus sacrée aussi, les forces de sécurité ont chargé les manifestants à coups de bâton, avant de tirer en l'air, de faire usage de gaz lacrymogènes et, au final, d'arrêter plus de 300 moines qui tentaient d'entrer.
Une opération qui a suscité l'indignation de la Ligue nationale pour la démocratie, le parti d'Aung San Suu Lyi. Le régime a commis "une faute irréparable", selon la LND qui a demandé officiellement "l'ouverture d'un dialogue immédiatement pour régler tous les problèmes de la nation pacifiquement", selon un communiqué envoyé aux journalistes.
La situation est en tout cas jugée suffisamment préoccupante pour que le conseil de sécurité des Nations-Unies se réunisse, en urgence, ce soir. Réunion pour des "consultations" sur la Birmanie, selon l'ordre du jour officiel. Les Etats-Unis, eux, jugent "très troublantes" les informations qui font état aujourd'hui d'une répression des manifestations, et ont appelé la junte à faire preuve de retenue...
Le spectre de 1988 ressurgit : des manifestations avaient été réprimées dans le sang. La junte militaire n'a pas changé de nature, ce qui fait craindre le pire.
La junte a fait de la Birmanie l'un des pays les plus fermés au monde. A Oslo, des journalistes birmans en exil animent une chaîne de télévision financée par plusieurs pays nordiques. DVB, la "Voix Démocratique de Birmanie" couvre l'actualité grâce à ses correspondants, professionnels ou amateurs, présents dans le pays même.
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