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Nicaragua: des élections sans opposition, ni observateurs internationaux

Grand favori dans les sondages face à une opposition affaiblie, le président du Nicaragua Daniel Ortega brigue un quatrième mandat. Le 6 novembre 2016, quelque 3,8 millions d'électeurs sont appelés aux urnes, pour un scrutin qualifié de «farce» par l'opposition visant, selon elle, à «renforcer une dictature dynastique».
Article rédigé par Dominique Cettour-Rose
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3 min
Affiche électorale à Managua montrant le chef de l'Etat sortant Daniel Ortega, qui vise un quatrième mandat de président, et son épouse Rosario Murillo, candidate à la vice-présidence, sous la bannière du Front sandiniste de libération nationale (FSLN, gauche). (RODRIGO ARANGUA / AFP)

C'est en tandem avec sa propre épouse, Rosario Murillo, 65 ans, que Daniel Ortega brigue un nouveau mandat sous la bannière du Front sandiniste de libération nationale (FSLN, gauche). Le président sortant et son parti sont accusés par l'opposition nicaraguayenne de noyauter les institutions. Elle reproche à Ortega d'être tenté par le népotisme en ayant choisi sa propre épouse comme colisitère. Porte-parole du gouvernement, cette militante sandiniste et poétesse est mariée depuis 2005 à l'ancien guérillero.


M.Ortega avait déjà défendu l'idée d'un «gouvernement conjoint» avec son épouse comme un symbole d'égalité entre les sexes. «Nous ne doutons pas que (le candidat à la vice-présidence) devait être une femme, et comment trouver mieux qu'une partenaire qui a déjà fait l'épreuve du travail et s'est montrée très efficace et disciplinée?», avait-il déclaré en août devant ses partisans en annonçant sa candidature à la présidentielle.

Face à une myriade de petits partis qui, réunis, n'obtiendraient que 6% des suffrages, selon certaines projections, le président sortant est le seul candidat ayant des chances de l'emporter. Une étude de l'institut M&R, publiée à la mi-octobre, le crédite de 64,2% des voix. Dans cette enquête, 72% des 2.000 personnes interrogées estiment que l'appel à l'abstention lancé par l'opposition «n'a pas d'importance». Reste toutefois une inconnue pour 23,2% des sondés qui ne se prononcent pas sur leur vote.

Ortega musèle le PLI, parti d'opposition
Loin derrière M.Ortega, le parti libéral constitutionnaliste (PLC, droite) de Maximino Rodriguez. Toujours selon M&R, il ne recueillerait que 8,3% des intentions de vote. Quant au parti libéral indépendant (PLI, droite), deuxième force politique du pays lors de l'élection de 2011, il s'est retrouvé privé de son leader, Edduardo Montealegre, sur décision de la Cour suprême de justice (CSJ) le 8 juin 2016. La CSJ a nommé à sa place un illustre inconnu, proche du pouvoir, Pedro Reyes, qui a aussitôt dissous la coalition d'opposition CND obligeant cette dernière à retirer son candidat à l'élection du 6 novembre, Luis Callejas.

A 70 ans, dont près de dix ans déjà passés à la tête du pays, Daniel Ortega est resté très populaire auprès des Nicaraguayens qui lui sont reconnaissant d'avoir fait passer le taux de pauvreté du pays de 42,5% en 2009 à 30% en 2014.

Le président sortant Daniel Ortega est au centre d'un graffiti représentant les dirigeants de la révolution, à San Jorge, dans le Rivas, département du sud du Nicaragua. (Inti OCON / AFP)

Mais cette fois, Ortega n'aura certainement pas les voix des habitants du Rivas, partie méridionale du pays où les paysans sont menacés d'expropriation, sans aucun recours possible, pour permettre les travaux du projet de canal interrocéanique censé concurrencer le canal de Panama. Un projet qui inquiète les défenseurs de l'environnement et des droits de l'Homme et qu'un rapport de la FIDH préconise d'annuler. Lequel n'a pas été commenté par les autorités nicaraguayennes.

50.000 soldats et policiers déployés
Ortega avait dirigé le Nicaragua pour la première fois de 1985 à 1990 avant de revenir aux affaires, en 2006, en tant que chef du Front sandiniste de libération nationale. Réélu en 2011, il n'a jamais abandonné son discours anti-impérialiste, tout en se rapprochant au fil des années des milieux d'affaires. Une stratégie qui a conduit au maintien de la croissance économique du pays durant ces cinq dernières années, à 5% par an en moyenne.

Outre l'élection du président et du vice-président, les Nicaraguayens sont également appelés, le 6 novembre, à désigner les 90 députés de l'Assemblée nationale nicaraguayenne et 20 autres au parlement d'Amérique centrale pour un mandat de cinq ans. Ce scrutin, boycotté par l'opposition, suscite des inquiétudes au Nicaragua jusqu'à Washington qui regrette aussi l'absence d'observateurs internationaux.

Plus de 50.000 soldats et policiers doivent être déployés pour sécuriser les 4.308 bureaux de vote, transporter le matériel électoral (urnes et bulletins) dans tout le pays.

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