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Tchad : le récit d'un opposant en exil

Ngarlejy Yorongar est arrivé jeudi en France et devrait probablement demander un asile politique. Lors d'une conférence de presse, il a évoqué de nombreux sujets et ironisé sur la commission mise en place par les autorités tchadiennes pour "faire la lumière" sur le sort des opposants.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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  (Radio France © RF/ Matteu Maestracci)

"C'était la 14e fois que je me voyais embastillé, torturé, battu, humilié". Ainsi, entre autres commentaires, Ngarlejy Yorongar décrit-il son arrestation au début du mois de février. Député, coordinateur exécutif du Parti fédéraliste, cet opposant au président Idriss Déby a rencontré les journalistes français aujourd'hui à Paris.

Arrêté pendant les combats ayant opposé le pouvoir et les rebelles, début février, il est longuement revenu sur sa détention, son départ secret vers la France via le Cameroun. Détenu, enchaîné, couché "à même le sol" pendant dix-huit jours, Ngarlejy Yorongar a ensuite fait l'objet d'une exécution "ratée", entre deux tombes d'un cimetière du sud de N'Djamena, la capitale tchadienne.

Selon lui, plusieurs chefs d'Etat seraient "intervenus" pendant sa détention, et fait pression sur Déby. Le Gabonais Omar Bongo, le Sénégalais Abdulaye Wade qui aurait envoyé un émissaire, Blaise Compaoré du Burkina, et Nicolas Sarkozy.

Aujourd'hui, le député n'a pas encore fait sa demande d'asile à la France. Il a seulement évoqué des contacts avec les autorités pour une "demande d'audience", mais "(sa) fiche n'aurait pas encore été transmise".

Le discours de Ngarlejy Yorongar n'est pas tendre à l'encontre du président Déby. Selon lui, ce dernier opère un "nettoyage politique, pour éliminer ses opposants crédibles, et s'assurer le renouvellement de l'Assemblée nationale pour être réélu". L'an prochain, les Tchadiens éliront leurs députés, avant une présidentielle en 2010.

Concernant les autres opposants, il s'est redit "très inquiet" quand au sort d'Ibni Oumar Mahamat Saleh, dont on est sans nouvelles. "Soit il est dans un hôpital tenu secret, ce dont je doute, soit il est mort à moins d'un miracle". Pour lui, la commission mise en place pour enquêter sur le sort des rebelles ne serait qu'un "machin", puisque "sept membres sur onze représentent le gouvernement".

Au sujet de la rébellion, Ngarlejy Yorongar préfère selon ses mots le combat "politique, démocratique" à Idriss Déby. Ses seuls contacts avec les rebelles tchadiens auraient été pour les "ramener à la raison". Il a promis de rentrer au Tchad pour "marquer Déby à la culotte".

Enfin, interrogé sur sa possible demande d'asile auprès d'un pays aux relations ambigues avec le Tchad, M. Yorongar a affirmé "ne pas avoir d'élément" sur le rôle joué par l'armée française début février, qui aurait appuyé logistiquement les forces gouvernementales. Il s'est prononcé pour une présence militaire "propre" de la France en Afrique, qui ne serait pas utilisée par exemple comme "un parapluie" par Déby pour se protéger de tout changement.

Matteu Maestracci

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