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Coup d'Etat au Soudan : l'administration en résistance

Le pouvoir militaire ne maîtrise pas encore tous les rouages de l'administration soudanaise qui, elle, n'entend pas accepter un "retour en arrière", et réclame un  gouvernement de civils. 

Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3min
Un jeune manifestant dans Khartoum le 26 octobre 2021. (MAHMOUD HJAJ / ANADOLU AGENCY)

Sporadiquement, Khartoum est le théâtre de manifestations de la population, que l’armée s’empresse de disperser, souvent dans le sang. Le bilan provisoire s’élève désormais à huit morts et 170 blessés.

Mais la résistance s’opère également au sein des organes de l’Etat qui ne sont pas encore totalement victimes de purges. En première ligne, le ministère de la Culture et de la Communication a mené la résistance dès le premier jour, donnant des informations sur l’évolution de la situation via sa page Facebook. Il n’a pas hésité à utiliser le slogan "pas de retour en arrière possible", le mot d’ordre des partisans du transfert du pouvoir aux civils. Des informations relayées par les grands organes de presse occidentaux (comme l’AFP), ce qui contribue à entretenir l’impression d’un coup d’Etat loin de tout maitriser.

La presse muselée

De la même manière, les membres, encore en liberté, du cabinet du Premier ministre Abdallah Hamdok, réclament le retour des autorités "légitimes", alors que leur "patron" a été placé en résidence surveillée.

Pourtant la télévision nationale est toujours muette, tout comme l’agence de presse nationale Suna. Selon l’AFP ses journalistes ont été remerciés manu militari mercredi 27 octobre. Le directeur de la télévision, Ahmed Loqman, défenseur de longue date d'un pouvoir civil, a été limogé.

La résistance émane également du gouvernorat de Khartoum. Si le gouverneur, résolument pro civils, a été arrêté pendant le putsch, les directeurs généraux ont appelé à soutenir "la désobéissance civile". Le gouvernorat a condamné le coup d’Etat et refusé "tout retour en arrière", c’est-à-dire à la confiscation du pouvoir par les militaires comme sous le régime d’Omar el-Béchir.

(Au monde libre : le peuple du Soudan lutte pacifiquement contre le coup d'Etat et prépare des manifestations le 30 octobre. Quand les gens libres s'unissent, ils font la différence)

La fronde a aussi gagné la diplomatie soudanaise, souligne l’AFP. 68 diplomates soudanais, dont les ambassadeurs les plus importants, ont annoncé refuser les nouvelles autorités promises pour bientôt par le général Burhane. Certains ont même apporté leur soutien aux manifestants rassemblés devant leurs ambassades respectives, se déclarant  "contre le coup d’Etat".

"Nous réaffirmons notre engagement indéfectible et notre soutien total à la lutte du peuple soudanais pour la liberté, la paix et la justice, ainsi qu'au processus de transition visant à établir un système démocratique permanent dans le pays", a écrit notamment l’ambassadeur soudanais basé à Genève. La réaction ne s’est pas faite attendre, six ambassadeurs ont été limogés dont ceux en Chine, en France, aux Etats-Unis, en Suisse et auprès de l’Union européenne.

Les opposants au coup d’Etat ont appelé à une manifestation dans Khartoum samedi 30 octobre. Ils espèrent réunir dans le calme un million de participants. Des marches sont également organisées dans 58 autres villes dans le monde.

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