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RDC : "Un procès au goût d'inachevé", les Congolais réagissent à la condamnation de Vital Kamerhe

Certains Congolais saluent "un sursaut de l'Etat de droit" tandis que d'autres dénoncent "un procès politique" à charge.

Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Vital Kamerhe était considéré comme n°2 du régime congolais. L'ancien directeur de cabinet du président Félix Tshisekedi a été condamné à 20 ans de prison pour corruption le 20 juin 2020. (FABRICE COFFRINI / AFP)

Il y a quelques semaines, Vital Kamerhe exerçait encore les fonctions de tout puissant directeur de cabinet du président de la RDC, Félix Tshisekedi. Il vient d'être condamné à 20 ans de travaux forcés pour corruption. Le 20 juin, la justice congolaise l'a reconnu coupable de détournement de quelque 50 millions de dollars de fonds publics.

Un coup de pied dans la fourmilière

Dans le pays, ce procès, qualifié d'historique, n'a laissé personne indifférent. Les réactions enregistrées à l'annonce du verdict sont à la hauteur des attentes d'une population fatiguée par des décennies de corruption devenue systémique. Pour de nombreux Congolais, "c'est du jamais vu". Ils ont le sentiment qu'un grand coup de pied vient d'être donné dans la fourmilière.

Au moins chacun de nous a désormais une petite peur au ventre. Sachant que s'il tripote dans les fonds publics, ça ne restera pas impuni.

Un habitant de Kinshasa à l'annonce du verdict

à l'AFP

Mais l'entousiasme suscité par ce premier procès anti-corruption est tempéré par l'influente Eglise catholique du Congo, qui se demande si cette affaire n'a pas permis tout simplement de se débarrasser d'un allié politique encombrant. "Il faut observer pour voir si la condamnation de Vital Kamerhe est quelque chose qui a été fait pour règler un problème politique ou si c'est vraiment une nouvelle dynamique", ont fait savoir les évêques catholiques du pays, cités par la presse congolaise.

Durant son procès, Vital Kamerhe n'a cessé de clamer son innocence affirmant être victime d'une procédure judiciaire pour l'éliminer de la scène politique. Pourtant, certains Congolais ont salué ce qu'ils considèrent comme "un sursaut de l'Etat de droit" dans leur pays. Même s'ils estiment que le détournement de fonds publics au Congo n'est pas l'affaire d'une seule figure politique.

Certains acteurs-clé dans le mécanisme de détournement semblent avoir été épargnés. C'est difficilement compréhensible.

Floribert Anzuluni, Mouvement citoyen Filimbi

à l'AFP

Des réserves aussi de la part du Collectif anti-corruption Unis qui constate qu'au moment où le combat contre la corruption est engagé, des millions en argent en liquide circulent toujours, y compris au sein de la présidence.

"Ceux qui ont fait la même chose sous l'ancien président Joseph Kabila ne sont pas inquiétés et cela ressemble à une prime à l'impunité", regrette Jean-Jacques Lumumba, défenseur congolais des droits de l'Homme.

Malgré les réserves exprimées sur ce procès "au goût d'inachevé", l'Association congolaise pour l'accès à la justice (ACAJ) félicite vivement les magistrats qui ont fait leur travail "avec professionnalisme". Mais son président, Georges Kapiamba, pointe de graves dysfonctionnements du cabinet du président Félix Tshisekedi révélés au cours des auditions. Il faut que le chef de l'Etat fasse appel à des collaborateurs intègres, a-t-il déclaré sur Radio Okapi. De nombreux Congolais appellent à un sursaut afin que la politique cesse d'être "un secteur d'affaires pour s'enrichir". Pour que la corruption cesse d'être considérée comme "un véritable sport national" en République démocratique du Congo.

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