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Le Niger peine à empêcher l’implantation de groupes djihadistes sur son sol

L’armée nigérienne s’est déployée ces derniers jours dans la région de Torodi, au sud-ouest du pays, pour empêcher que la zone ne devienne un sanctuaire terroriste. Assassinats, rapts, extorsion de fonds, destruction d'écoles: les groupes djihadistes venus du Mali et du Burkina Faso tentent de gagner la confiance de la population, mais avec des méthodes proches du banditisme.
Article rédigé par Michel Lachkar
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
Patrouille de soldat nigériens dans la région de Diffa (juin 2016)  (Reuters/Luc Gnago )

 
«L'armée nigérienne a détruit cette semaine plusieurs camps de présumés djihadistes dans le sud-ouest du pays, près de la frontière avec le Burkina Faso», a affirmé samedi 3 novembre 2018 le ministre nigérien de l'Intérieur, Mohamed Bazoum.

Le Niger n'abritait pas, jusqu'à présent, de bases arrière terroristes, mais le pays subit depuis des mois les attaques répétées de groupes venus du Mali ou du Burkina faso.

Le secteur dit des «trois frontières», déjà théâtre d'attaques, d'assassinats ciblés et d'enlèvements fréquents, est en passe de devenir «un sanctuaire de groupes terroristes et criminels», a alerté le général Ahmed Mohamed, patron des armées du Niger lors d'une réunion à Niamey du G5-Sahel.

Razzia et racket
«Depuis deux mois, nous vivons un phénomène nouveau: des groupes lourdement armés circulent à moto pour terroriser les gens et prélever la zakat», s'inquiète Soumana Hassane, un député de Tillabéri. La zakat est l'aumône légale, troisième pilier de l'islam.

Des villages ont versé entre 700.000 francs CFA (1.000 euros) et 900.000 francs CFA (plus de 1.300 euros) au titre de la zakat. «Si vous refusez de payer, ils vous tuent», affirme l'élu. «Ces bandits obligent les villageois à écouter leurs prêches et vont brûler les écoles après», s'indigne-t-il. «Ils comptent les têtes de votre bétail et prélèvent de gré ou de force la zakat en fonction du nombre», a témoigné sur une télévision locale un élu d'Inates, une commune nigérienne proche du Mali.

Le drapeau noir du djihad flotte la nuit
«Apparemment, ces groupes armés veulent s'installer définitivement dans la zone», estime Amadou Bounty Diallo, ex-militaire et ressortissant de Tillabéri.
«La nuit, ils implantent le fanion noir (drapeau du djihad) dans les villages isolés et ils font l'exégèse du Coran», soit un prêche public obligatoire, en menaçant de s'en prendre aux enseignants et aux forces de sécurité, a indiqué M.Diallo citant des témoignages d'autochtones.
 
Eviter un sanctuaire terroriste
Interpellé le 3 novembre au Parlement, le ministre nigérien de l'Intérieur a déclaré que deux opérations militaires étaient en cours pour juguler l'insécurité dans le sud du pays. Un état-major tactique spécial a investi une petite forêt de la préfecture de Torodi, le long de la frontière avec le Burkina Faso et «tous les camps (des groupes armés) qui s'y trouvaient sont en train d'être nettoyés». Les soldats progressent pour investir une autre grande forêt, a-t-il détaillé.

Selon le ministre, les groupes qui écument la zone très boisée de Torodi «ont la même filiation idéologique» que les groupes actifs dans le nord du Burkina Faso, notamment Ansarul Islam créé par un prêcheur local, Ibrahim Dicko, qui était proche du prédicateur malien Hamadoun Koufa, le fondateur de la Katiba djihadiste Macina. Dans cette région du Mali, les islamistes armés ferment les écoles où l'on parle le français et exigent désormais l'enseignement du Coran, menançant de punir ceux qui ne respectent pas «la nouvelle loi».

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