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La peine de mort recule en Afrique subsaharienne

Dans son dernier rapport sur le recours à la peine de mort dans le monde, rendu public le 12 avril 2018, Amnesty International souligne qu'en Afrique subsaharienne, il y a eu en 2017 une diminution significative du nombre de sentences capitales prononcées. Peut-être le signe avant-coureur de l'abolition de la peine de mort dans la région. Le constat est partagé par d'autres associations.
Article rédigé par Véronique le Jeune
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Publié Mis à jour
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L'Afrique pourrait bien être le prochain continent abolitionniste, selon Amnesty International et l'association ECPM (Ensemble contre la peine de mort). (Gianluigi GUERCIA / AFP)

Selon Amnesty International, le nombre d'exécutions capitales est en recul dans le monde. Et l'Afrique ne déroge pas à la tendance.

Dans son dernier document, l'ONG y enregistre une amélioration notable sur la partie subsaharienne du continent. En 2016, la Guinée est en effet devenue le 20e pays de la région à abolir la peine de mort, pour tous les crimes. Et le nombre de condamnations a diminué, de 1.086 en 2016 à 878 en 2017.

Un progrès qui doit être «reconnu»
La Gambie a, de son côté, signé un traité international l'obligeant à ne pas mener d'exécutions et à progresser vers l'abolition de la peine de mort.  
«L'évolution perçue en Afrique subsaharienne renforce l'espoir d'une suppression définitive des sanctions cruelles, inhumaines et dégradantes», a affirmé Salil Shetty, secrétaire générale de l'ONG.  

Un progrès qui mérite d'être «reconnu», a déclaré à l'AFP Makmid Kamara, directeur adjoint du programme sur les questions mondiales, avant d'ajouter que ces chiffres «inciteront peut-être d'autres gouvernements à suivre le même l'exemple».

«Chaque année depuis 10 ans, un pays africain abolit la peine de mort», explique pour sa part Raphaël Chenuil-Hazan, directeur général de l'association Ensemble contre la peine de mort (ECPM), qui organisait un congrès sur ce thème à Abidjan, les 9 et 10 avril 2018.

«L'Afrique est le prochain continent abolitionniste»
«C'est une tendance continue. Après l'Europe et l'Amérique du Sud, l'Afrique est le prochain continent abolitionniste», juge-t-il.

Ainsi, le Kenya a supprimé le recours obligatoire au châtiment suprême, en cas de meurtre. Le Burkina Faso et le Tchad ont également pris des mesures pour le supprimer en adoptant de nouvelles lois ou en déposant des projets de loi en ce sens.

Sur les 54 pays que compte le continent africain, il en reste 11 qui appliquent encore la peine capitale. Ce sont le Botswana, l'Egypte, l'Ethiopie, la Guinée Equatoriale, la Libye, le Nigeria, l'Ouganda, la Somalie, le Soudan, le Soudan du Sud et le Zimbabwe.
 
Selon les chiffres d'EPCM, 68 personnes ont été exécutées en 2016 en Afrique.


Susan Kigula, symbole de lutte contre la peine de mort
Dans le public du congrès de l'association en Côte d'Ivoire, l'Ougandaise Susan Kigula, qui a passé 16 ans dans le couloir de la mort dans son pays, accusée d'avoir tué son mari, bien qu'elle ait toujours clamé son innocence.
 
Libérée en 2016, cette mère de deux enfants a passé pendant son incarcération un diplôme de droit de l'université de Londres, lancé une chorale de détenues et est devenue un symbole de la lutte contre la peine de mort en Ouganda, qui l'applique toujours.

Selon Mme Kigula, «si un gouvernement fait preuve de volonté politique pour abolir la peine de mort, l'opinion publique suit».

Un avis que partage Pete Ouko, lui aussi passé par le couloir de la mort pendant 18 ans au Kenya et libéré en 2016. «Je vois un changement progressif dans l'attitude des gens», remarque-t-il tout en précisant qu'il faut d'abord agir sur les «causes sociales du crime».

L'exception du Nigeria
Le pays le plus peuplé d'Afrique (190 millions d'habitants en 2017), est le seul dans lequel le nombre de condamnations à mort a augmenté au cours des douze derniers mois, avec 621 condamnés supplémentaires. Ce que condamne Amnesty International qui précise qu'«il y a un total de 2.285 personnes dans le couloir de la mort au Nigeria, soit le chiffre le plus élevé de la région». L'organisation de défense des droits humains s'appuie sur des chiffres fournis par le Nigeria Prisons Service.

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