Avant la réouverture complète aux touristes, l'île Maurice confrontée à une vague de Covid-19
Loin des discours officiels et des campagnes promotionnelles, l'île bruisse d'inquiétude.
Les hôpitaux sont saturés, les respirateurs artificiels rares et le cimetière où étaient enterrées les victimes du coronavirus est plein : l'île Maurice fait face à une explosion de Covid-19 qui interpelle à moins de trois semaines de la réouverture complète de ses frontières. Officiellement, tout est prêt pour accueillir les touristes au 1er octobre dans ce paradis de l'océan Indien, prisé pour ses plages immaculées et ses eaux cristallines. L'objectif de vacciner 60% de la population a été dépassé, avec 61% des Mauriciens ayant reçu au moins deux doses au 11 septembre, ont notamment souligné la semaine dernière les autorités, qui ont rendu la vaccination obligatoire dans certaines activités, dont le secteur touristique, sous peine d'amendes ou de peines de prison.
"Bulles de villégiature"
Mais loin des discours officiels et des campagnes promotionnelles, l'île bruisse d'inquiétude.
"La situation empire. Mais il y a des instructions pour que nous ne communiquions pas. La priorité du gouvernement est d'assurer une ouverture en douceur des frontières le 1er octobre"
Un médecin, sous couvert d'anonymatà l'AFP
Le 15 juillet, l'archipel a rouvert ses frontières uniquement aux personnes vaccinées, qui devaient rester dans des "bulles de villégiature" pendant 14 jours avant d'être autorisés à s'aventurer plus loin, sous réserve d'un test PCR négatif. A partir du 1er octobre, les touristes, vaccinés ou non, seront libres de leurs mouvements dès lors qu'ils auront un test PCR négatif de 72 heures avant leur arrivée sur l'île.
"Devises ou variants ?"
Cette réouverture est très attendue dans le secteur touristique, qui représente 25% du PIB de l'île et 250 000 emplois directs et indirects.
"Mon restaurant est vide depuis mars 2020. Si les touristes ne reviennent pas, je serai obligé de mettre la clé sous le paillasson"
John Beeharry, restaurateurà l'AFP
Hôtesse d'accueil dans un hôtel, Diana Mootoosamy appréhende cette réouverture. "Il n'y a plus la quarantaine de 14 jours et du coup, nous nous retrouvons sans filet de protection. (...) En accueillant les touristes, allons-nous attirer des devises ou des variants ?", se demande-t-elle. Depuis la réouverture partielle mi-juillet, le nombre de cas a été multiplié par plus de cinq, de 2 461 le 16 juillet à 12 616 le 10 septembre. Cette augmentation est de loin la plus importante en Afrique sur cette période, selon les données compilées par l'AFP. Maurice a, depuis le début de la pandémie, enregistré 1 005 cas pour 100 000 habitants, un chiffre nettement supérieur à la moyenne africaine (598). Le gouvernement impute cette hausse à un relâchement des comportements, et souligne que les nouveaux cas sont majoritairement asymptomatiques. Accusées par la population de minimiser le nombre de morts, les autorités ont revu le bilan à la hausse. Initialement annoncé à 34, le nombre de décès a été porté à 89 depuis le début de la pandémie. Mais le ministre de la Santé a souligné que la majorité des décès n'étaient pas causés directement par le Covid-19 mais résultaient de comorbodité.
Méfiance
Au cimetière Bigara, où étaient enterrées les victimes de l'île contaminées au Covid-19, le secteur dédié à la pandémie est plein. Les corps sont désormais inhumés à Bois-Marchand, dans le nord de l'île, déclenchant la colère des riverains. Certains ont lancé des pierres sur un convoi des autorités sanitaires venues enterrer des corps mercredi 8 septembre. Le discours officiel suscite la méfiance.
"On avait fermé le pays mais malgré ça, le nombre de cas explose. Maintenant, avec une frontière ouverte comme une fenêtre, il y a de quoi frémir"
Paul Pierre, chauffeur de taxià l'AFP
Un variant, baptisé C.1.2, a été détecté mais il s'agit d'un variant "classique" et non d'un variant sujet d'inquiétude, a affirmé le représentant de l'OMS sur l'île, Laurent Musango. Malgré tout, l'état des hôpitaux n'est pas de nature à rassurer. "Les gens ne réalisent pas à quel point la situation est grave. On nous parle de nombreux cas asymptomatiques, mais nous sommes déjà au-dessus de nos capacités en termes de cas symptomatiques", affirme une infirmière d'un centre de traitement du Covid-19.
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