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Au Rwanda, une activiste condamnée à 15 ans de prison pour "incitation à la violence" sur Youtube

Yvonne Idamange, critique à l'égard du président Paul Kagame, avait abordé le sujet sensible du génocide.

Article rédigé par Eléonore Abou Ez
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
L'activiste rwandaise Yvonne Idamange est suivie par près de 19 000 abonnés sur Youtube. (Capture d'écran de la chaîne Youtube "Idamange")

Arrêtée le 15 février 2021 après la publication d’une vidéo sur sa chaîne Youtube, Yvonne Idamange a été condamnée à 15 ans de prison ferme. Elle est notamment accusée "d'incitation à la violence et à l'insurrection" après des propos critiques sur les commémorations du génocide ou bien encore sur le président Kagame.

Un verdict disproportionné

Au Rwanda, tout va très bien tant qu’on ne parle pas de ce qui va mal ou de ce qui fait mal. Yvonne Idamange, 44 ans, vient d’en faire les frais et écope de 15 ans de prison ferme. Le verdict se base sur six chefs d’accusation comprenant, entre autres, "l'incitation à la violence et à l'insurrection", le dénigrement des mémoriaux du génocide et la propagation de rumeurs.

Dans ses vidéos diffusées sur sa chaîne Youtube Idamange, l’activiste rwandaise accuse le président Paul Kagame d'avoir mis en place une dictature, d'instrumentaliser le génocide de 1994 et d’avoir transformé les mémoriaux du génocide en attractions touristiques. Elle aborde ainsi des sujets sensibles qui rentrent dans le cadre de la loi contre l'idéologie du génocide et lui valent une sanction disproportionnée.

Une loi "ambiguë"

A la suite du génocide de 1994 qui a fait plus de 800 000 morts, une législation a été créée pour interdire les discours de haine et d'incitation au génocide ou au divisionnisme, afin de réconcilier les Rwandais et prévenir une tragédie similaire, comme l'explique Global Voices. Le site qui défend la liberté d’expression souligne néanmoins qu’il s’agit d’une loi "ambiguë""souvent utilisée pour faire taire les voix dissidentes".

Human Rights Watch (HRW) rappelle de son côté que le Code pénal du Rwanda comprend plusieurs dispositions qui permettent des poursuites abusives. L'organisation de défense des droits de l'Homme s'était d'ailleurs inquiétée fin mars de l'arrestation de plusieurs personnes qui s'étaient exprimées sur Youtube en abordant des sujets parfois controversés. Depuis un an, au moins huit personnes ont été menacées, arrêtées ou poursuivies, selon l'ONG.

Si le Rwanda se targue aujourd’hui d’être un modèle de développement économique en Afrique, il est encore loin d’être celui de la liberté d’expression.

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