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Nouveau massacre à Beni : Kinshasa dénonce «une menace djihadiste»

«Notre gouvernement est incapable de nous sécuriser», c’est le cri de colère des habitants de Beni. Ils ont manifesté le 14 août dans cette ville martyre de l’Est de la RDC, après un nouveau massacre qui a fait plus de 50 morts et des dizaines de blessés.
Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
La détresse des rescapées de l’attaque des rebelles islamistes ougandais au nord de Beni, dans l’est de la RDC, le 14  Mai 2015. Vingt trois civils avaient été sauvagement massacrés.
  (Photo AFP/Kudra Maliro)

 
Pris à partie par ses propres citoyens, Kinshasa dénonce l’indifférence de la communauté internationale face à «des actes terroristes» perpétrés sur son territoire.
 
«Nous avons l’impression d’être plus ou moins abandonnés à nous-mêmes face à cette menace que nous avons clairement identifiée comme une menace provenant de l’islamisme radical qu’on appelle djihadisme…Ces actes ne diffèrent en rien de ceux signalés notamment au Nigéria, au Mali, au Cameroun ou hors du continent comme en France, en Belgique ou aux Etats-Unis d’Amérique», affirme le porte-parole du gouvernement congolais, Lambert Mende sur le site Politico.Cd
 
Ces djihadistes pointés du doigt par Kinshasa, ce sont les rebelles musulmans ougandais des Forces démocratiques alliées (ADF) qui sévissent dans l’est du pays depuis 1995. Ils sont accusés d’être les principaux auteurs des massacres qui endeuillent la région de Beni. Plus de 650 civils tués depuis octobre 2014.
 
Les victimes sont découpées à la machette et leurs maisons sont brûlées. Selon des témoins, personne n’est épargné, y compris les femmes et les enfants. La société civile dénonce un déficit sécuritaire criant.
 
Interrogé par RFI, Gilbert Kambale, membre de la coordination de la société civile à Beni, ne décolère pas. Il estime qu’il est grand temps que la population de Beni se prenne en charge pour assurer sa défense.
 
«Nous allons entrer en brousse et nous voulons aller les chercher nous-mêmes. Nous allons couper les arbres pour fouiller les forêts. Parce que tous ceux qui nous aident ici sont en train de montrer leurs limites».
 

Des habitants de Beni, dans l’est de la RDC, portent sur une civière le corps d’une victime tuée par des rebelles islamistes ougandais (ADF) le 16 avril 2015. (Photo AFP/Kudra Maliro)


Tollé de l’opposition contre le gouvernement
Depuis plus de deux ans, l’armée congolaise mène des opérations de ratissage  contre ces rebelles dont plusieurs camps ont été détruits. Mais la concentration des troupes congolaises et onusiennes dans cette région n’a pas empêché la poursuite des massacres.
L’opposant Moise Katumbi, candidat à la prochaine élection présidentielle, dénonce l’inaction du gouvernement dans cette région martyre.
 
«Des innocents sont massacrés chaque jour et notre gouvernement détourne le regard. L’inaction de nos dirigeants est déplorable, inacceptable», accuse l’opposant congolais. «Trop occupés à tenter de s’accrocher illégalement au pouvoir, nos dirigeants en oublient la protection de nos concitoyens» déplore-t-il, dans un communiqué remis à la presse.
 
Le président de l’Union pour la Nation Congolaise, Vital Kamerhe, appelle aussi le gouvernement à prendre ses responsabilités.
 
«L’incapacité manifeste du pouvoir en place à mettre fin à ces massacres qui perdurent, démontre l’impérieuse nécessité de l’alternance démocratique pour créer les conditions requises pour une pacification durable de l’est de la RDC», écrit l’opposant congolais dans un message de condoléances publié à Kinshasa après le massacre.
 
Le dernier massacre perpétré contre les habitants de Beni remonte à début mai 2016. Il avait fait une cinquantaine de morts et suscité l’indignation et la colère des Congolais sur les réseaux sociaux.
 
 

Les hastag #JesuisBeni et #JusticeforBeni avaient été créés pour dénoncer les «massacres en silence de la population de Beni».Avec des photos de corps mutilés de civils. La population de Beni est très remontée contre les casques bleus de l’ONU présents dans la région, qui assistent «sans rien faire», selon elle, à ces tueries sauvages.
 
La nouvelle attaque a eu lieu 72 heures après une visite dans la région du président Joseph Kabila, pendant laquelle il a promis de tout faire pour imposer la paix et la sécurité. Le chef de l’Etat congolais a décrété un deuil national de trois jours à la suite de ce nouveau massacre.

Un tweet d'un internaute congolais mise en ligne après le massacre pérpétré à Beni, dans l'est de la RDC, en mai 2015. Le gouvernement congolais a décrété un deuil national de trois jours après la tuerie du 13 aôût 2016. (DR/Capture d'écran)

 

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