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Adoption en RDC: des petits enfants finissent «esclaves domestiques ou sexuels»

C’est l’un des pays africains où les trafiquants rivalisent de ruses pour obtenir des «enfants à adopter» en toute illégalité. Des petits Congolais se retrouvent parfois à des milliers de kilomètres de leur pays natal, à la merci de familles qui les exploitent sans scrupules comme «esclaves domestiques ou sexuels». Le combat est engagé à Kinshasa pour tenter d’y mettre fin.
Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Des enfants congolais séparés de leurs parents dans un centre de la Croix-Rouge à Goma, après l'éruption du volcan Nyiragongo, le 22 janvier 2002. De nombreux orphelins en provenance du Nord-Kivu en guerre ont été transférés dans les orphelinats de Kinshasa.  (Photo AFP/Pedro Ugarte)

Des individus se présentant comme des membres d’une organisation caritative n’hésitent pas à piéger les parents congolais démunis. Ils leur promettent de scolariser leurs jeunes enfants. Souvent, il est déjà trop tard quand les familles découvrent la supercherie.
 
Séquestrés dans des centres d’hébergements clandestins à Kinshasa, certains de ces petits Congolais ont pu retrouver leurs familles qui ont alerté des proches. Les plus malchanceux entament un voyage sans retour. Ils atterrissent entre des mains inconnues, au Liban, en Inde, ou dans des pays européens. Soumis à des secondes adoptions, hors de tout cadre légal, ils sortent totalement des radars et subissent le calvaire de leurs bourreaux qui en font leurs esclaves.
 
«Des actes qui blessent la conscience»
Le gouvernement congolais a dénoncé «un certain nombre d’actes qui blessent la conscience». Des enfants adoptés auraient été «abusés» et «maltraités». 

Autre pratique, interdite en République démocratique du Congo, parce qu'elle choque les habitants, le placement d'enfants chez des couples homosexuels. Aussi, Kinshasa a décidé de suspendre l’adoption des enfants congolais à l’étranger, jusqu’à nouvel ordre. Plus d’autorisations de sortie du territoire d’enfants depuis septembre 2015. Une seule exception a été autorisée par le ministre de la Justice en novembre 2015 pour 69 enfants en partance pour les Etats-Unis, la France, la Belgique et l’Italie, notamment.
 
Résultat, un millier d’enfants adoptés par des familles occidentales attendent toujours dans les orphelinats, de rejoindre leurs nouveaux parents. La France et les Etats-Unis sont intervenus auprès des autorités congolaises pour débloquer les dossiers d'adoption déposés par leurs ressortissants. Mais en vain.
 
«L’adoption ne doit pas être un écran de fumée derrière lequel se cachent des trafiquants et toutes sortes d’intermédiaires qui revendent des enfants avant de s’évanouir dans la nature», explique à Radio Okapi, Maître Ruffin Luko’O, chercheur congolais en droit qui appelle à l’encadrement de ce secteur par les pouvoirs publics.

Une maman adoptive française tient par la main un petit garçon congolais à la maison de l'espoir à Kinshasa, le 26 novembre 2015. (PhotoAFP/Junior Kannah)
 
Une nouvelle loi pour sécuriser les procédures d’adoption
Le gouvernement congolais demande aux familles d’adoption d’être patientes. Il veut sécuriser au maximum les procédures d’adoption par une nouvelle loi qui sera bientôt soumise au parlement.
 
«Le gouvernement a donné des instructions claires et nettes qui consistent à vérifier l’authenticité des jugements qui ont été rendus. Parmi les abus qui ont été décriés, on a constaté qu’il y a des jugements qui ont été attribués à des juridictions qui les ignoraient simplement. On a fabriqué des jugements dans les couloirs, dans les cafés. Et tous ces jugements malheureusement ont failli servir pour les sorties d’enfants», déplore Albert Paka, conseiller juridique au ministère de l’Intérieur, sur les antennes de Radio Okapi.
 
En 2014, une ressortissante belge avait passé quatre mois et demi en prison à Kinshasa à la suite d’une condamnation à six mois de prison pour avoir tenté de faire voyager illégalement la fille de six ans qu’elle avait adoptée.

Les autorités congolaises expliquent que le pays veut protéger ses enfants qui sont parfois «revendus par internet au plus offrant».
 
 
 
 

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