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Soudan: le président Omar al-Bachir oscille entre Ankara et Ryad
Tout en étant aligné sur le camp saoudien, le président Omar al-Bachir semble se tourner dans le même temps vers son homologue turc Recep Tayyip Erdogan. En confiant à Ankara la reconstruction de l’île de Suakin, important port africain sur la mer Rouge, le dirigeant soudanais prend le risque de voir ses relations avec Ryad se dégrader.
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Lors de sa première visite officielle à Khartoum le 24 décembre 2017 dans le cadre d’une tournée africaine, le président turc a marqué un point considérable face à l’Arabie Saoudite dans la course aux influences sur le continent.
Accompagné d’une forte délégation d’hommes d’affaires, Recep Tayyip Erdogan a signé avec l’administration soudanaise une vingtaine d’accords dans plusieurs domaines économiques, agricoles et de coopération militaire.
Al-Bachir dit «oui» à Erdogan pour la réhabiliation de l'île Suakim
Mais c’est surtout l’accord passé avec Omar al-Bachir sur l’île de Suakin, à l’est du Soudan, qui aura surtout frappé les esprits saoudiens.
Clôturant le lendemain le forum économique soudano-turc auquel il participait à Khartoum, le président Erdogan a révélé: «Nous avons demandé l’attribution de l’île Suakin pour une période déterminée, afin de la réhabiliter et lui redonner son visage d’antan… et le président al-Bachir a dit oui.»
Située sur la côte Ouest de la mer Rouge, cette ancienne île-ville portuaire de la côte soudanaise, construite principalement en corail et aujourd’hui en ruines, était autant un point de passage des pèlerins africains vers la Mecque qu’un port hautement stratégique pour l’empire ottoman.
Au cours de l’Histoire, elle a été supplantée par Port-Soudan, situé à une soixantaine de kilomètres plus au Nord, mais «elle a un très grand potentiel, car elle s’ouvre sur la mer Rouge», a déclaré le porte-parole de la présidence turque.
Ankara veut faire de Suakim une destination touristique
Rappelant que l’Agence turque de développement et de coopération (TIKA) y avait déjà restauré deux mosquées et un bâtiment douanier, Ibrahim Kalin a précisé: «Notre volonté est de réhabiliter totalement l’île et d’en faire une destination touristique. En effet, sous l’empire ottoman, c’était un port important du Hajj et l’Omra avant de se rendre à Jeddah», a-t-il dit.
Intervenant après le resserrement des liens d’Ankara avec le Qatar, en conflit avec l’Arabie Saoudite, et l’installation d’une importante base militaire turque en Somalie, l’annonce a aussitôt été raillée par le journal saoudien Okaz.
Proche du prince héritier Mohammed Ben Salman, cette publication titrait dès le lendemain: Khartoum attribue Suakin à Ankara… Le soudan dans les bras de la Turquie, révélant l’agacement de Ryad.
Très attentive au jeu d’alliances dans la région, le site de l’agence iranienne PressTV soulignait pour sa part qu’il s’agissait du «troisième pays arabe où la Turquie installe une base militaire… Au Soudan, elle pourra exercer sa mainmise sur la mer Rouge.»
La multiplication des bases turques, source de nervosité à Ryad
Et le site de rappeler qu’après une réunion tripartite des chefs d’état-major turc, soudanais et qatari à Khartoum, le 26 décembre 2017, Ryad avait dépêché son vice-ministre de la Défense à Khartoum pour rencontrer son homologue. Un geste interprété par l’agence comme un signe de nervosité des autorités saoudiennes.
Pour limiter les retombées de l’accord avec Ankara sur les relations avec Ryad, l’ambassade du Soudan en Arabie Saoudite a affirmé dans un communiqué: «Le Soudan ne menace pas la sécurité arabe par la signature d’un accord pour la réhabilitation du port de Suakim.»
Dans son communiqué rendu public par l’agence turque Anadolu, le ministre plénipotentiaire et responsable de presse de l’ambassade, Mutaz Ahmed Ibrahim, soulignait que le Soudan établit ses relations «pacifiquement… sans porter atteinte à la sécurité de la Nation arabe qui constitue un pilier dans la construction de ses relations étrangères».
«Suakin est dans les bras du Soudan et nulle autre partie», a conclu le diplomate.
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