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L’ancien président américain Jimmy Carter appelle Washington et Pékin à coopérer davantage en Afrique

Les tensions entre la Chine et les Etats-Unis ont atteint des sommets en 2018. Inquiet d’un risque de guerre froide entre les deux pays, Jimmy Carter appelle les deux puissances à œuvrer en commun pour le développement du continent africain.

Article rédigé par Michel Lachkar
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
Artisan du rapprochement avec la Chine, l'ancien président américain Jimmy Carter avec le président chinois Xi Jingpin à Pékin le 13 décembre 2012. (MA ZHANCHENG / XINHUA)

A l'occasion du 40e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques entre Pékin et Washington en janvier 1979, Jimmy Carter a fait part de son inquiétude "face à deux puissances se voyant de plus en plus comme une menace l'une pour l'autre".

"Si les plus hauts responsables des gouvernements adoptent ces concepts dangereux, une guerre froide contemporaine entre nos deux nations n'est pas inconcevable", écrit dans le Washington Post l'ancien président âgé de 94 ans.

Jimmy Carter, partisan actif du rapprochement avec la Chine durant son mandat, s'est ensuite consacré à l'éradication de la pauvreté dans le monde. Aujourd'hui, il estime que le "meilleur chemin" vers une coopération entre les Etats-Unis et la Chine se situe en Afrique.

"Les deux pays sont déjà fortement impliqués en Afrique pour combattre les maladies, construire des infrastructures et maintenir la paix – parfois conjointement, écrit-il. Mais chaque nation a accusé l'autre d'exploitation économique ou de manipulation politique."

En travaillant ensemble avec les Africains, les Etats-Unis et la Chine s'aideraient aussi eux-mêmes à dépasser leur défiance et à rebâtir cette relation vitale.

L'ancien président américain Jimmy Carter

au Washington Post

Washington a intensifié ces derniers mois ses mises en garde à propos de l'aide chinoise, accusant Pékin d'attirer des pays avec des projets se transformant en pièges à dettes.

Le désinvestissement américain en Afrique

Tout semble montrer que les Etats-Unis ne s’intéressent plus vraiment à l’Afrique, si ce n’est dans leur rivalité avec Pékin ou avec la Russie. Une région pourtant stratégique où la compétition entre puissances est de plus en plus forte et les défis toujours aussi importants.

Il y a peu, les Etats-Unis ont ébauché une stratégie africaine par la voix de John Bolton, nouveau conseiller de Donald Trump à la Sécurité nationale. Ce faucon, ardent défenseur de la guerre en Irak, a annoncé des changements importants vis-à-vis de la coopération américaine. 

John Bolton a fortement critiqué les missions onusiennes de maintien de la paix, jugées "inefficaces et chères". Il a prévenu l’ONU "que les Etats-Unis ne financeraient plus des missions sans fin". Quant à l’aide bilatérale, même humanitaire, "celle-ci restera strictement définie par les intérêts américains". Il a même menacé les pays africains qui reçoivent une aide "généreuse" et qui voteraient contre la position des Etats-Unis dans les forums internationaux ou ne respecteraient pas la volonté américaine. 

Contrer l'influence chinoise en Afrique

Fini la main tendue aux pays africains en difficulté, John Bolton a mis l’accent sur l’investissement privé et les accords de libre-échange bilatéraux. Les intérêts économiques immédiats des Etats-Unis avant tout.

"Le discours de Bolton est plus un avertissement aux Africains sur les dangers de la présence chinoise et russe qu’un plaidoyer pour un engagement économique accru avec les Etats-Unis. Presque un retour à la Guerre froide", explique le chercheur associé à l'Institut des relations internationales et stratégiques, Jeff Hawkins.

Le président américain Jimmy Carter avec le vice-président chinois Deng Xiaoping devant la Maison Blanche en janvier 1979. (ANN RONAN PICTURE LIBRARY / ANN RONAN PICTURE LIBRARY)

A ce jour, peu d’éléments, si ce n'est la pression diplomatique, sont susceptibles d’inciter les Africains à s'éloigner de Pékin et considérer les Etats-Unis comme un partenaire commercial privilégié. "Cette stratégie aura très peu de chances de susciter un vrai partenariat et ne fera rien, ou très peu, pour devancer à l’avenir des concurrents russes et chinois très présents dans la région" explique Jeff Hawkins.

Dans le Washington Post, Jimmy Carter critique implicitement la vision africaine de l'administration Trump. Cet activiste de la paix, hier au Proche-Orient, aujourd'hui en Afrique, souvent accusé d’être une colombe, sera-t-il cette fois entendu ?

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