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L'aide de la France à l'Afrique contre le Covid-19 : détail, critique et polémique...

Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a annoncé une aide de 1,2 milliard d'euros pour aider l'Afrique à lutter contre le coronavirus. Une aide, ou plutôt un prêt.

Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
A l'entrée de l'hôpital de Yaoundé, capitale du Cameroun, le 6 mars 2020 (AFP - mlo)

La France va accorder une aide de "près de 1,2 milliard" d'euros pour la lutte contre la propagation du Covid-19 en Afrique, a annoncé le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, le 8 avril 2020, comme l'a rapporté franceinfo. Il s'agira de réorienter "une partie substantielle de notre aide au développement sur les enjeux de santé et les enjeux alimentaires, pour près de 1,2 milliard d'euros", a-t-il dit. Plusieurs associations ont dénoncé "la faiblesse de cette aide" et du fait qu'il s'agira de "prêts". Dans le même temps, l'annonce du ministre a déclenché une polémique sur les réseaux sociaux.

"Les besoins sont immenses", a souligné Jean-Yves Le Drian, selon le texte de son intervention cité par l'AFP. Il a appelé à renforcer "les systèmes de soins" en Afrique ainsi que "les capacités de détection et de recherche scientifique en appuyant la recherche africaine". Il faut aussi "assurer une mobilisation financière considérable", a insisté le chef de la diplomatie française en invitant le G7 et le G20 à œuvrer en ce sens.

"Première réponse"

L'aide évoquée par Jean-Yves Le Drian entre dans le cadre du plan appelé "Covid 19-santé en commun", détaillé sur le site de l'Agence française de Développement (AFD). Cette aide, qui "cible en priorité le continent africain", "constitue une première réponse face à la crise sanitaire et à ses conséquences économiques et sociales immédiates".

"Elle comprend plusieurs leviers d’actions : 150 millions d’euros sous forme de dons, un milliard d’euros sous forme de prêts afin de répondre aux enjeux de court terme des pays ou des banques publiques de développement partenaires de l’AFD", précise l'agence.

"La faiblesse de l'annonce" ministérielle

Sept ONG, parmi lesquelles Médecins du Monde (MDM), Oxfam France, Sidaction et Action contre la faim, se sont alarmées "de la faiblesse de cette annonce".

Nous dénonçons fermement le fait qu’il ne s’agisse pas d’argent additionnel, mais d’un détournement des budgets d’aide existants, ainsi que le format de la réponse dont un milliard d’euros se fera sous forme de prêts, une solution inadaptée à la crise actuelle

Les ONG après l'annonce de Jean-Yves Le Drian

Les associations s'inquiètent notamment du fait que l'aide promise se fasse principalement sous forme de prêts. "Cela va accroître l'endettement des pays du Sud, tout en allant à rebours des dynamiques internationales", estime-t-on chez Oxfam. L'association rappelle ainsi que le 2 avril 2020, le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire avait soutenu l'idée d'"un moratoire de la dette des pays les plus pauvres dans les mois à venir"

La réponse de la France, sixième puissance économique, est "particulièrement faible", estime par ailleurs Oxfam. Et ce alors que la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (Cnuced) a proposé "un plan de 2 500 milliards dans le cadre de la crise du coronavirus dans les pays en développement" : 1 000 milliards pour lutter contre les conséquences de la pandémie sur l'économie, 1 000 milliards pour le remboursement des dettes et 500 autres milliards pour un "plan Marshall" en matière de santé. 

Polémique

Dans le même temps, les propos du ministre ont déclenché une polémique sur les réseaux sociaux.

"Alors qu’elle peine déjà à convenablement protéger les siens contre l’épidémie, la France va s’investir aux côtés de l’Afrique où 'les besoins sont immenses'", écrit de son côté Valeurs Actuelles. "Pour l’heure, ce soutien 'considérable' semble déplacé, alors que la situation, en France, est critique : le personnel soignant manque de masques, tout comme le reste de la population, et le pays n’est pas en capacité de tester les Français en masse'", poursuit l'hebdomadaire d'opinion.

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