Lagos, une ville qui renaît à la modernité
L’Afrique est capable de bien des surprises. Après des années d’inertie, la mégapole de cet Etat de plus de 160 millions d’habitants redresse la tête et s’inscrit de plain-pied dans le 21e siècle.
En 2013, 7.000 tonnes d’ordures sont ramassées quotidiennement, contre 2.000 en 2003. De nouveaux immeubles de deux ou trois étages remplacent de plus en plus les bicoques aux toits en tôle ondulée. Mais le plus grand changement concerne les moyens de transport de la capitale, ville chaotique entourée de lagunes où les embouteillages sont légendaires.
Dans la journée, de nombreuses routes sont quasiment impraticables durant des heures. Cette situation de blocage pénalise gravement la production de la ville. Pourtant, de jeunes diplômés venus d’universités anglo-saxonnes réfléchissent sur les moyens de décongestionner les routes. Un transport de bus moderne, géré par le privé, a été crée alors qu’un premier tronçon de 22 kilomètres d’autobus roulant sur site propre a été lancé dans un secteur particulièrement dense, de Mile 12 à Lagos Island. Les usagers, gagnent non seulement du temps, mais aussi de l’argent, le ticket étant deux fois moins cher qu’auparavant.
Le financement public, grâce aux revenus du pétrole et aux financements internationaux, dont l’Agence française de développement, va permettre de construire une seconde ligne de bus en site propre. La réussite de ces réalisations est due à la politique de planification du Lamata (Lagos Metropolitan Area Transport Authority), mise en place il y a dix ans. Son directeur explique que le plan de développement mis en œuvre intègre l’ensemble de moyens de transport, train et bateau compris. Les Lagociens, jusque-là peu enclins à pratiquer la navigation pour aller au travail, font désormais la queue pour rejoindre les débarcadères, un gilet de sauvetage sur les épaules, et prendre les navettes-bateaux qui divisent par quatre ou cinq leurs temps leur trajet.
L’amélioration des transports a rendu aux habitants un sentiment de fierté. Cet état d’esprit positif les incite à participer aux efforts de réhabilitation de la cité. Désormais, ils sont de plus en plus nombreux à accepter de payer les factures d’eau ou d’électricité, même si l’énergie est coupée de longues heures au cours de la journée. De même, les impôts rentrent mieux. Les Lagociens, aidés par des affiches ou des autocollants proclamant «Payez vos factures», disposés dans de nombreux endroits de la ville, ont payé en 2012 pour 970 millions d’euros d’impôts et de redevances diverses, contre 340 millions en 2007 et 2,89 millions en 1999, l’année du retour à la démocratie. 50% de hausses d’impôts sont attendues dans les prochaines années.
Le retour des expatriés
La transformation de Lagos est un signe de plus pour ceux qui croient au décollage économique du Nigeria. D’autant plus que la croissance du pays a été de 7% chaque année de 2007 à 2013. Une analyse partagée par nombre de cadres nigérians expatriés dans les capitales européennes ou à Washington et New York. Le résultat: les membres de la diaspora reviennent en nombre à Lagos faire du business, lancer des start-up, ouvrir des boutiques dans la mode, etc. Selon wazobiajobs.com une société de chasseurs de têtes, ils sont ainsi 10.000 par an à se lancer dans l’aventure.
Autre chiffre significatif: quelque 2.800 bouteilles de champagne sont consommées par jour dans la capitale, indique le magazine M (Le Monde). La preuve que le succès des affaires rime avec ambiance festive. Ce boom entrepreuneurial se produit alors qu’au nord du pays, six provinces sont sous le régime d’état d’urgence en raison de la confrontation entre l’armée et les islamistes de Boko Aram. Cette guerre larvée aurait fait 3.600 morts depuis 2010, selon Human Right Watch.
Le moteur de ce développement, c’est la montée en puissance de la classe moyenne. Les économistes se basent sur le concept de «petite prospérité», une population ni riche ni pauvre, capable de satisfaire ses besoins élémentaires et disposant d’un surplus à dépenser. Soit quelque 60 millions de personnes sur 160 millions.
Au passage, il convient de noter que 48 millions de Nigérians sont connectés à Internet. Ce qui explique que les sociétés de vente sur la toile font un tabac, permettant à tout un chacun d’accéder à des produits vendus au même prix dans toutes les régions du pays.
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