Le Niger condamné à verser plus de 75 000 euros d'indemnités à un activiste détenu "illégalement"
L'affaire remonte à 2018, en marge d'une vague de contestations liée à la loi de finances jugée antisociale.
La Cour de justice de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) a ordonné à l'Etat du Niger de verser 50 millions de FCFA (plus de 75 000 euros) de dommages à Sadat Illiya Dan Malam, selon son avocat. L'arrestation, puis la longue détention de l’activiste, ont été jugées "arbitraires" et "illégales".
Vingt mois sous les verrous
Les faits remontent à 2018. En avril, Sadat Illiya Dan Malam, un enseignant nigérien, est arrêté à Zinder dans le sud du pays alors qu’il se préparait à participer à une manifestation contre la loi de finances jugée antisociale. Comme plusieurs autres activistes, il contestait de nouvelles taxes et impôts en dénonçant des "cadeaux fiscaux" accordés aux compagnies de téléphonie.
Accusé de "participation à un mouvement insurrectionnel" et de "conspiration contre l’Etat", le défenseur des droits de l'Homme passera vingt mois en prison, jusqu’à l’abandon des lourdes charges qui pesaient contre lui. Entretemps, il perd son emploi d'enseignant pour abstentéisme, selon Amnesty international.
"Les Etats ne peuvent plus continuer à invoquer l’ordre public, cette notion fourre-tout, pour empêcher les manifestations pacifiques de la société civile ou de l’opposition. C’est l’un des acquis majeurs de cet arrêt"
Me Boudal Effred Mouloud, avocatà RFI
Réparations de préjudices
Quelques semaines avant sa libération en novembre 2019, son avocat, Me Boudal Effred Mouloul, porte l’affaire devant la justice de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest. Près de 18 mois plus tard, cette dernière juge que l'arrestation et la détention de Sadat Illiya Dan Malam étaient "arbitraires et illégales". Elle ordonne à l'Etat du Niger de lui payer la somme de 50 millions FCFA (plus de 75 000 euros) "à titre de réparations de préjudices immatériels", selon l'avocat qui qualifie la décision d'historique, comme le soulige RFI. Une première du genre alors que plusieurs personnes ont été arrêtées et écrouées au Niger pour avoir bravé l'interdiction de manifester contre la loi contestée.
L'avocat, qui a saisi la Cédéao, n'en est pas à sa première action. En 2018, il avait porté plainte auprès de la justice de son pays suite à la fermeture d'une télévision locale. L'Etat du Niger avait été condamné à verser des indemnités à la chaîne dont la fermeture temporaire avait été jugée "illégale".
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