Mali : "L'avancée des islamistes a rendu l'intervention de la France plus urgente"
François Hollande a confirmé l'engagement militaire de la France au Mali. Francetv info revient sur la situation dans ce pays avec Pierre Boilley, spécialiste de l'Afrique.
Après plusieurs mois de crise au Mali, la France a décidé d'intervenir militairement dans le pays. "J'ai (…), au nom de la France, répondu à la demande d'aide du président du Mali, appuyé par les pays africains de l'Ouest", a déclaré François Hollande lors d'une brève allocution à l'Elysée vendredi 11 janvier. Le chef de l'Etat a également confirmé la présence des forces armées françaises "qui ont apporté leur soutien aux unités maliennes pour lutter contre les éléments terroristes" sur le sol malien. Pour mieux comprendre les enjeux de cette intervention, francetv info a interrogé Pierre Boilley, professeur à la Sorbonne et spécialiste de l'Afrique subsaharienne contemporaine.
Francetv info : Intervenir n'est-il pas risqué pour les otages français au Sahel ? Cette décision ne va-t-elle pas être perçue comme du néocolonialisme ?
Pierre Boilley : En ce qui concerne les otages, le gouvernement l'a déjà dit clairement : le chantage des ravisseurs, c’est terminé ! Face à la gravité de la situation, ne pas intervenir à cause des otages aurait été une décision frileuse.
Par ailleurs, les Maliens du Sud étaient, jusqu’à maintenant, partagés sur la question d'une intervention. Les putschistes et une partie de la population y étaient opposés, voyant cela comme du néocolonialisme. Cependant, chez une autre partie de la population, les prises de position de Paris étaient assez bien perçues. La France était vue comme la seule à agir pour le bien du Mali.
A l'extérieur du pays, des groupes musulmans pourraient percevoir une intervention occidentale comme une attaque contre l’islam. Ce qui a rien d’étonnant en soi : c’était aussi le cas de la guerre en Afghanistan, par exemple.
Pourquoi la France intervient-elle maintenant ?
L'avancée des islamistes a changé la donne : l’intervention s'est faite plus urgente. François Hollande vient de confirmer la présence des soldats français dans le pays, ce qui peut signifier un vrai tournant dans les opérations.
En décembre 2012, l'ONU a mis en place un cadre légal d’intervention autorisant la Communauté économique des Etats d'Afrique de l’Ouest (Cédéao) et l’Union africaine à intervenir militairement pour épauler l’armée malienne. La résolution prévoyait le déploiement de la Mission internationale de soutien au Mali (Misma) pour un an, sans qu’aucun calendrier précis ne soit fixé.
Romano Prodi, envoyé spécial des Nations unies au Sahel, a déclaré qu’elle ne pourrait pas avoir lieu avant septembre 2013, ce qui me semble réaliste. Cette mission est loin d'être prête : on ne sait pas sur quels voisins du Mali elle peut compter, de quelles forces et de quels financements elle disposera et, finalement, qui dirigera les opérations. De même, leurs équipes auraient sûrement besoin d’un soutien logistique occidental.
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