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Au Sahel, l’avenir de l'électrification appartient au solaire et aux batteries

1,2 milliard de personnes dans le monde n’ont pas accès à l’électricité et 50% d’entre elles vivent en Afrique subsaharienne et tout particulièrement dans les pays du G5-Sahel (Mauritanie, Burkina Faso, Niger, Mali et Tchad).

Article rédigé par franceinfo Afrique
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La centrale solaire de Zagtouli près de Ouagadougou en novembre 2017. (LUDOVIC MARIN / POOL / AFP)

Le taux de connexion à l’électricité n’atteint pas les 30% dans les pays du Sahel (Mauritanie, Burkina Faso, Niger, Mali et Tchad). Un taux largement inférieur à celui du reste de l’Afrique. Et encore ce chiffre ne traduit pas les différences entre les zones urbaines et rurales où l’absence d’électricité touche plus de 70% de la population.

Accès à l'électricité dans les pays du Sahel (trackingsdg7.esmap.org / AFD)

Un retard important

Cette absence d'électricité pèse fortement sur les capacités de développement de ces pays que ce soit pour l'éducation, la communication ou encore l’économie (agriculture). Impossible de lire à la maison ou de faire ses devoirs, difficultés pour charger un téléphone portable, impossibilité de conserver les aliments, handicaps pour la productivité agricole…

Résultat : les habitants sont, quand ils le peuvent, obligés d’avoir recours à des groupes électrogènes fonctionnant au fuel ou à l'essence qui reviennent très cher.

La révolution solaire

Un paradoxe dans des pays qui disposent d’un atout important : le soleil. Des centrales solaires sont déjà installées. Au Burkina Faso, la centrale solaire de Zagtouli, la plus grande d’Afrique de l’Ouest au moment de son inauguration en 2017 en présence du président français Emmanuel Macron, permet de fournir de l’énergie propre à environ 660 000 personnes et d’économiser 26 000 tonnes de gaz carbonique par an.

Selon tous les experts, le prix du photovoltaïque dégringole favorisant un développement de la production électrique à base de panneaux solaires. Ainsi, le coût du kw/h solaire a connu une baisse des prix impressionnante en quelques années et cette baisse devrait continuer. Le ministre de l’Energie du Burkina Faso fait d’ailleurs le parallèle avec la révolution du téléphone portable. "Avant, le téléphone était filaire et nécessitait des investissements importants dans les infrastructures. C’était un luxe. Or, ce qui se passe aujourd’hui avec l’électricité photovoltaïque, c’est la même chose que ce qui s’est passé avec le développement du téléphone sans fil", explique Bachir Ismaël Ouedraogo. 

Dans ce secteur, la deuxième révolution provient de la chute du prix des batteries qui permettent le stockage de l'énergie produite pendant les heures diurnes. La baisse du coût du stockage permet de mieux réguler la distribution de l'électricité. Elle permet de développer des mini-réseaux de distribution dans des villages isolés ou de multiplier les kits individuels solaires (le hors réseau). 

Un fort soutien international 

Les pays du G5-Sahel bénéficient pour les investissements dans l'énergie d'une aide internationale. Plusieurs organismes internationaux (UE, AFD, Banque mondiale, Banque Africaine de développement) se sont unis pour développer de nombreux projets destinés à accroître le nombre de foyers bénéficiant de l'électricité. 

Ces acteurs réunis dans une Alliance Sahel ont mis sur pied des projets à hauteur de 2,4 milliards d'euros pour le secteur de l'énergie et du climat. 

La stabilité de la région, minée par la pauvreté et un faible développement, est un des objectifs avoués de cette alliance. Le "Sahel est une région géostratégique pour l'Union européenne", explique Carla Montesi de la Commission européenne. 

Une insécurité persistante

Géostratégiquement parlant, la région est en effet instable. L'Europe soutient militairement le G5-Sahel supposé lutter contre les opérations islamistes. Sur le terrain, les obstacles restent cependant nombreux sur la route de l'électrification. Outre les problèmes humains (la formation des spécialistes) ou géographiques (l'étendue des territoires oblige à faire des choix compliqués en matière de réseaux), l'insécurité rend prudent les éventuels investisseurs.

Plusieurs pays de la région connaissent en effet des situations politico-militaires "délicates" ou sont carrément touchés par des combats, ce qui oblige au déploiement de forces militaires nationales ou internationales. 

Cependant, les autorités politiques estiment que les investissements, dans l'énergie notamment, doivent "continuer dans les zones instables. Cela a un coût supplémentaire mais c'est une nécessité pour que les gens de ces régions ne puissent pas dire : 'on nous a délaissé'", affirme le ministre burkinabè de l'Energie. 

Une ambition à long terme

"D’ici à 2030, garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables et modernes, à un coût abordable", tel est l'objectif de l'ODD7 (le 7e Objectif de développement durable) défini par la communauté internationale. Dans ce cadre, le groupe "Energie" de l'Alliance Sahel a mis sur pied quelque 47 projets répartis dans les cinq pays du Sahel (dont des projets transfrontaliers). Reste à savoir si ces projets verront tous le jour d'ici 2030. Une date lointaine dans une région très largement déstabilisée.

Projets d'investissement dans l'énergie au Sahel (AFD)

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