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Au Mali, des amputations dans le Nord rappellent "les horreurs" de la crise de 2012

Trois civils qualifiés de "voleurs" ont été mutilés par des jihadistes dans la région de Gao. 

Article rédigé par Eléonore Abou Ez
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Des familles de la commune de Mondoro, dans un camp de déplacés à Gao en octobre 2020. (MICHELE CATTANI / UNOCHA)

La Mission des Nations unies au Mali (Minusma) s'est dite très inquiète concernant des cas d’amputation, survenus le 2 mai dernier, d’au moins trois civils dans la région de Gao.

Que s’est-il passé ?

Début mai, des membres présumés du groupe Etat islamique au Grand Sahara (EIGS) ont rassemblé la foule lors du marché hebdomadaire dans le village de Tin-Hama, dans la région de Gao (nord-est), pour lui présenter trois "voleurs" à qui ils avaient coupé la main droite et le pied gauche. Dans la loi islamique, l'amputation croisée est appliquée dans les cas de banditisme de grand chemin.

L’information a été relayée par des habitants sur place, sous couvert de l’anonymat par peur de représailles. Pour la Minusma, ces développements, aussi limités soient-il, sont d’autant plus choquants qu’ils rappellent "les horreurs" qui ont marqué la crise de 2012.

"De tels châtiments corporels exécutés par des groupes armés en dehors de tout cadre légal sont de graves atteintes aux droits de l'Homme, y compris le droit de tout être humain à un procès juste et équitable devant un tribunal régulièrement constitué"

El-Ghassim Wane, chef de la Minusma

dans un communiqué

Dans quel contexte ?

Ce n’est pas la première exaction dans cette région en proie au banditisme, à la criminalité et à l’instabilité. L’ONU alerte depuis plusieurs mois, à travers plusieurs rapports d'experts, sur la détérioration de la situation sécuritaire dans le nord et le centre du Mali.

Les groupes terroristes prolifèrent dans l’immense région de Gao – plus grande que la Tunisie –, où de vastes territoires échappent complètement au contrôle de l’Etat. Mais cette fois-ci, les jihadistes s'emploient à apparaître auprès des populations comme administrant la justice. C’est ainsi qu’ils ont procédé à des amputations au nom d'une interprétation rigoriste de la charia, la loi islamique.

Des cas isolés ?

Il est difficile à ce stade de savoir s’il s’agit de cas isolés ou d’un message du groupe Etat islamique dans le Grand Sahara, une franchise de Daech qui cherche à marquer son empreinte dans cette région. En 2012, de multiples châtiments corporels (amputations, flagellations, lapidations à mort) avaient été commis par les groupes islamistes armés qui contrôlaient le Nord. Dix ans après, les milices continuent de semer la terreur dans la région et au centre du pays.

Plus de 400 cas de meurtres, exécutions sommaires, enlèvements, viols et menaces ont été répertoriés au Mali rien qu’au premier trimestre 2021, selon un rapport de la mission de paix de l’ONU.

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