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Affaiblir le groupe "Etat Islamique dans le grand Sahara", nouvelle priorité de la force française Barkhane

La stratégie françise au Sahel, redéfinie le 13 janvier 2020 lors du sommet de Pau, vise à renforcer la lutte contre l'EIGS, dirigé par Walid al Sahraoui, quitte à négocier avec les "rebelles" maliens Iyad Ag Ghali et Amadou Koufa.

Article rédigé par Michel Lachkar
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Hélicoptères de la force française Barkhane lors d'une opération au Mali. La France a décidé de renforcer ses troupes au Sahel pour les faire  passer de 4500 à 5100 hommes d'ici mars 2020. Photo prise le 27 mars 2019 dans la région de Gourma. (DAPHNE BENOIT / AFP)

Le gouvernement nigérien a annoncé le 21 février avoir mis hors de combat 120 "terroristes" appartenant à EIGS (Etat islamique dans le grand Sahara). L'opération, coordonnée avec la force française Barkhane, a eu lieu dans la région de Tillabéri, au sud-ouest du Niger, à la frontière du Mali. C'est dans cette vaste zone instable dite des trois frontières (Niger, Burkina, et Mali) que le président français Emmanuel Macron et ses homologues du G5 Sahel ont décidé, le 13 janvier 2020 à Pau, de concentrer leur action militaire en visant en priorité l'EIGS (Etat islamique au Grand Sahara).

Cette focalisation sur la branche sahélienne de l’État islamique a été justifiée par l’ultra-violence et les opérations d’envergures menées par l'EIGS contre les armées du Mali, du Niger et du Burkina Faso. C’est dans cette zone des trois frontières que quelque 174 soldats ont été tués en décembre et janvier, comme à Inates (71 morts, 10 décembre 2019) ou à Chinégodar (89 morts le 8 janvier).

Toutes ces attaques ont été revendiquées par le groupe Etat islamique. L’EIGS n’hésite pas à s’en prendre à la population civile et aux chefs de village.   

Jonction avec Boko Haram

C’est en octobre 2016 qu’Abou Walid Al-Sahraoui, ancien porte-parole du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (MUJAO), fait allégeance à l’Etat Islamique. Alors que les mouvements jihadistes du Sahel se revendiquaient jusqu’alors d’Aqmi, Al-Qaïda au Maghreb islamique.

Cette jonction avec Boko Haram aurait permis à l’EIGS de durcir ses attaques contre les armées locales. Le spécialiste de l’EI Matteo Puxton soupçonne la présence de Nigérians de Boko Haram (mouvement actif au Nigeria et au Cameroun) aux côtés des jihadistes de l’EIGS avec l’apparition "de véhicules kamikazes en ouverture des assauts" et de "troupes de chocs avec ceinture d’explosifs, apparues au Nigeria".

Pour Matteo Puxton, "comme au Nigeria entre juillet 2018 et début 2019, l'ex-EIGS cherche à 'faire le vide' dans la zone des trois frontières, en éliminant les installations militaires pour se créer un sanctuaire".

"Négocier" avec les jihadistes maliens

La stratégie du G5 Sahel est de combattre militairement l’EIGS d’Al Sahraoui (ancien membre du Front Polisario) tout en tentant un dialogue avec les katiba d’Amadou Koufa (composées essentiellement de Peuls maliens) et d’Iyad Ag Ghali (Touareg malien). Deux chefs locaux (contrairement à al Sahraoui qui est Sahraoui) que l’on espère pouvoir détourner du combat terroriste par la négociation. La France montre surtout qu'elle combat des terroristes "étrangers" (comprendre non-maliens). 

Après avoir longtemps refusé tout contact avec les jihadistes traités de "terroristes", le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, à entrouvert la porte à des pourparlers. Une stratégie qui vise à diviser et affaiblir le front terroriste. Parler avec les groupes maliens et combattre les étrangers: une tactique qui reste un pari.

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