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Vanille: les vicissitudes de la production malgache

A Madagascar, la production de vanille, ressource clé de l'île, est victime de son succès. Les cours galopants de l'épice rendent gourmands certains acteurs du secteur, au risque de tuer la poule aux œufs d'or.
Article rédigé par Falila Gbadamassi
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Gousses de vanille sur un marché de Nosy Be (nord-ouest de Madagascar).

 (DOELAN YANN / HEMIS.FR / HEMIS)

Madagascar fournit 80 à 85% de la production mondiale. A environ 250 dollars le kilo, le commerce de l’épice est très lucratif. D'autant qu'il sert parfois à blanchir l’argent du commerce illégal (depuis 2010) du bois de rose dans le pays. La vanille est devenue l’objet de toutes les convoitises et engendre des pratiques peu orthodoxes qui menacent l’ensemble d'une filière, vitale pour l'économie malgache. 

Le secteur «fait vivre près de 100.000 paysans éparpillés dans huit régions, sans parler des préparateurs, collecteurs et exportateurs», souligne L’Express de Madagascar. «En 2015, 2.500 tonnes ont été exportées, pour un total de 118 millions de dollars.» La vanille est la troisième source de devises (après le nickel et la girofle) d’un pays qui en est le premier producteur mondial.

Insécurité et spéculation
«La recrudescence des vols de gousses sur pied, la violation des règles de production, de récolte et de conservation figurent parmi les différents obstacles sur le chemin de ce produit phare des exportations malgaches», peut-on lire dans les colonnes du quotidien malgache. 

Dans un document publié en 2015, le spécialiste français de la vanille Eurovanille faisait les mêmes constats. «En deux ans, à Madagascar, le prix de la vanille verte a été multiplié par dix. Cette tension a poussé les planteurs à récolter prématurément leurs vanilles alors que la floraison avait été tardive, afin d’éviter les vols de gousses sur pied.»

Autre pratique: «La mise sous vide des vanilles dans un état de semi-séchage (pour) conserver le poids et donc d’obtenir un meilleur prix.» Conséquence: «Un faible taux de vanilline ainsi qu’un risque de moisissures (...) sur les vanilles de la récolte 2015.» Les prochaines exportations auront lieu entre novembre et décembre 2016.

Il faut environ un an pour obtenir un bon produit. La gousse de vanille est le fruit d'une orchidée. La vanille planifolia est la variété cultivée à Madagascar. La floraison intervient entre novembre et décembre. La récolte, dont la date est fixée par le gouvernement malgache, se fait entre fin juin et début juillet. Les mois qui suivent servent à «la préparation», le processus qui donne toutes ses qualités à l'épice. 

En mars 2016, le ministère malgache du Commerce a annoncé une série de mesures pour maintenir la qualité de la vanille de Madagascar, notamment la fin de la pratique du sous-vide (la vanille verte est conservée au détriment de la préparation).

Fleur et gousse de vanille de Madagascar (Dominique Halleux / Biosphoto)

Monopole
«La production de vanille (en 2016) pourrait ne pas dépasser les 1.500 tonnes, alors qu’auparavant elle avait atteint 3.000», a déploré le 11 mars 2016 Irène Souchaud, présidente de la Plateforme nationale de la vanille (PNV), regroupant des professionnels du secteur dans l'île, rapporte L’Express de Madagascar

«En quatre ans, le prix de la vanille s’est multiplié par 4, voire 5», explique Mélanie Legris, responsable commerciale et marketing chez Eurovanille. A l’origine de cette hausse des prix, entre autres, «l’augmentation de la demande mondiale due au fait de la hausse de la consommation de vanille naturelle. Les Chinois, par exemple, en sont de plus en plus demandeurs». La vanille est un ingrédient majeur de l'industrie agro-alimentaire. 

Entre 2010-2012, la continuelle chute des prix de la vanille a poussé les autres producteurs (Réunion, Comores, Mexique, Ouganda, Inde, Indonésie, Papouasie-Nouvelle-Guinée et Tahiti) à privilégier des cultures plus rentables, offrant une situation de monopole aux Malgaches. Le travail de la vanille demande une importante main d'oeuvre. 

«Le niveau des salaires à Madagascar (1,5 dollar par jour) rend impossible la compétition pour les autres pays producteurs quand les prix sont en dessous de 20 dollars le kilo», confie Josephine Lochhead, présidente de la firme américaine Cook Flavoring Co. à Food Business News. «Le salaire moyen dans les autres pays est environ de 10 dollars par jour». «Par ailleurs, en 2012, précise Mélanie Legris, la production a baissé à Madagascar à cause d’un champignon, le fusarium, qui a ravagé les plants de vanille»

Même si dans des pays comme l’Inde, des initiatives sont prises pour relancer la production de vanille de façon durable selon Mélanie Legris, il faut au moins attendre trois ans, pour une récolte a minima, et quatre ans pour une bonne récolte.

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