Gabon : des écoutes révèlent les doutes des observateurs de l'Union européenne sur le résultat du scrutin
Selon "Le Journal du Dimanche", les services secrets gabonais ont placé les observateurs de l'Union européenne sur écoutes.
Un "Watergate au Gabon". En pleine élection présidentielle, les services secrets gabonais ont espionné les observateurs de l'Union européenne dépêchés pour veiller à la régularité du scrutin, révèle dimanche 2 octobre Le Journal du Dimanche. Un scrutin qui s'est conclu par la réelection contestée du président Ali Bongo face à Jean Ping.
Au moins six personnes ont été mises sur écoute, explique l'hebdomadaire, qui a eu accès à "une vingtaine d'enregistrements clandestins, un échantillon puisé dans un ensemble certainement plus vaste". On y entend ces fonctionnaires s'inquiéter pour leur sécurité, alors que des émeutes secouent le pays et que des menaces de mort fleurissent sur les réseaux sociaux.
"Ils sont en train de chercher comment tricher"
Mais, au-delà de ces craintes, ces écoutes commandées par le pouvoir gabonais révèlent surtout que les observateurs sont persuadés que le scrutin est truqué. Sans s'embarrasser du langage policé de la diplomatie, un membre de la mission ironise, alors que les résultats tardent à être officialisés :
Ils sont en train de chercher comment tricher et que ça ne se voie pas trop
"Bongo sait qu'il a perdu, mais comment il va faire pour annoncer qu'il a gagné ?", s'amuse son interlocuteur, lui aussi membre de la mission européenne. "Des urnes sont en cours d'acheminement à Libreville et vont faire la différence", ajoute l'un des deux hommes.
Le 31 août, le ministère de l'Intérieur donne de premiers résultats, la victoire d'Ali Bongo avec 5 500 voix d'avance. Les chiffres du Haut-Ogooué, le fief des Bongo, suscitent des interrogations : 97% de participation (contre 59,5% dans le reste du pays), 95,46% pour Ali Bongo.
Selon les observateurs de l'Union européenne, les partisans d'Ali Bongo ont poussé le vice jusqu'à traffiquer la page Wikipedia de cette province : la veille, le Haut-Ogooué a gagné 22 000 habitants en une nuit. Polyna Lemos, chef-adjointe de la mission, déplore au téléphone : "Ils ont fait exactement ce que j'espérais qu'ils n'allaient pas faire".
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