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Journée de la femme 2013: des Egyptiennes en guerre contre le terrorisme sexuel

Face à la multiplication des agressions sexuelles contre des manifestantes en Egypte, des femmes n'hésitent plus à braver l'opprobe pour obliger des autorités silencieuses et une société réticente à faire face à ce «terrorisme sexuel».
Article rédigé par Valerie Kowal
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Yasmin Baramawi victime d'une agression sexuelle place Tahrir, au Caire (25 Février 2013). (AFP/Gianluigi Guercia)

Beaucoup d'Egyptiennes ont récemment témoigné de leur calvaire à la télévision. Elles proclament très clairement que désormais elles ne se laisseront plus intimider par des violences visant, selon elles, à les bannir de la vie publique. «Nous ne sommes pas des victimes, nous sommes des révolutionnaires. Ce qui est arrivé nous a rendues plus fortes et nous continueront à descendre dans la rue», a déclaré sur une chaîne privée Aïda al-Kchef, une militante ayant été agressée.

Le harcèlement dans les rues du Caire n'est pas nouveau. Mais depuis la chute de Hosni Moubarak, il y a deux ans, des manifestantes sur la place Tahrir sont régulièrement attaquées par des groupes d'hommes organisés. Parfois armés de couteaux, ils dénudent les femmes avant de procéder à de violents attouchements.


Pour tenter de briser le déni qui entoure ces actes, les initiatives se multiplient depuis quelques mois. Des groupes auxquels se sont joints des hommes ont vu le jour, comme Operation Anti Sexual Harassment, dont les volontaires (la police étant absente) fournissent un soutien médical et psychologique aux victimes. «Ces attaques visent à exclure les femmes de la vie publique et à les punir de leur participation au militantisme politique et aux manifestations. Elles sont aussi une tentative de ternir l'image de la place Tahrir et des manifestants en général», accuse le groupe.

«Nous voulons que le terme harcèlement ne soit plus utilisé. Ce dont il s'agit aujourd'hui, c'est de terrorisme sexuel», déclare Inas Mekkawy, du mouvement de défense des droits des femmes Baheya ya Masr. Mais le problème se heurte toujours à l'indifférence des autorités et à l'opprobe d'une grande partie de la société.

«On dit à la victime: "Que faisais-tu place Tahrir, comment étais-tu habillée ? A quelle heure y es-tu allée?"» selon Soraya Bahgat, de Tahrir Bodyguard, un groupe qui s'est donné pour mission de protéger les femmes sur la place et organise des cours d'auto-défense. A la grande colère des militants, des membres du Sénat, dominé par les islamistes et qui assume le pouvoir législatif jusqu'à l'élection d'une nouvelle Assemblée, ont récemment fait porter aux victimes une part de responsabilité «parce qu'elles savent qu'elles vont au milieu de voyous», selon des propos rapportés par la presse locale.

Le Conseil national de la femme, un organe officiel, a annoncé avoir été chargé par le Premier ministre de préparer un projet de loi global contre toutes les formes de violences contre les femmes. Mais des militants se disent sceptiques sur la portée d'une telle législation en l'absence d'une véritable volonté de la mettre en application.

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