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Egypte : le président Morsi, de plus en plus isolé

Un porte-parole du président égyptien et un autre du gouvernement ont démissionné. Un peu plus tôt, Mohamed Morsi a rejeté l'ultimatum lancé par l'armée.

Article rédigé par franceinfo avec AFP et Reuters
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Après les opposants au président Mohamed Morsi, ses partisans ont défilé au Caire (Egypte), le 2 juillet 2013. (MOHAMMED HOSSAM / ANADOLU AGENCY / AFP)

L'armée lui avait laissé, lundi 1er juillet, "48 heures pour satisfaire les demandes du peuple". La présidence égyptienne a rejeté implicitement, dans la nuit de lundi à mardi, l'ultimatum lancé plus tôt par l'état-major. Dans un communiqué, Mohamed Morsi affirme que "la déclaration des forces armées n'a pas été soumise au président" avant sa diffusion et contient "des signes pouvant causer la confusion".

Dans son communiqué, le président Morsi se pose en garant de "la réconciliation nationale" et de "la paix sociale". Il "poursuit ses consultations avec toutes les forces nationales afin de sécuriser la voie du changement démocratique", explique notamment le texte, qui dénonce "toute déclaration qui approfondirait la division" dans le pays déjà coupé en deux. Mais en rejetant l'ultimatum de l'armée, Mohamed Morsi s'est davantage isolé. Francetv info vous explique pourquoi.

Morsi lâché par le gouvernement et la présidence

Quatre ministres ont déjà présenté leur démission lundi, et un cinquième, le ministre des Affaires étrangères, leur a emboîté le pas mardi matin. Celui-ci, Mohammed Kamel Amr, est le plus important membre du cabinet à quitter le gouvernement.

Un porte-parole du président égyptien et le porte-parole du gouvernement ont aussi démissionné, dans la foulée des ministres. Le porte-parole de la présidence Ehab Fahmi, détaché du ministère des Affaires étrangères, a décidé de quitter son poste. Le porte-parole du gouvernement, Alaa al-Hadidi, a de son côté affirmé à l'agence officielle Mena qu'il avait remis sa démission au Premier ministre, Hicham Qandil.

La justice lui inflige un revers

La justice égyptienne a ordonné mardi la réintégration du procureur général, limogé en novembre par décret présidentiel. "La cour d'appel rend une décision définitive de réintégration d'Abdel Méguid Mahmoud [au poste de] procureur général", a indiqué l'agence officielle Mena. 

Abdel Méguid Mahmoud avait été nommé du temps du président déchu Hosni Moubarak. Il était accusé par les militants de la révolte de 2011 d'être à l'origine de l'insuffisance des preuves présentées par le parquet dans les procès des responsables de l'ancien régime. Son limogeage et la nomination de son successeur, Talaat Abdallah, accusé d'être favorable aux Frères musulmans, avait renforcé le bras de fer qui oppose depuis son élection Mohamed Morsi à l'appareil judiciaire égyptien.

L'armée choisit de défendre les opposants

L'armée a pris implicitement la défense des opposants à Morsi en lançant l'ultimatum. "L'armée s'est rangée au côté du peuple", a estimé le mouvement Tamarrod ("rébellion" en arabe), à l'origine de manifestations. "L'armée se pose en arbitre d'une situation chaotique", estime plutôt Christian Malard, éditorialiste de politique étrangère à France Télévisions.

Christian Malard

Dans le même temps, l'opposition, galvanisée par les manifestations monstres de dimanche, a refusé tout dialogue avec le président issu des Frères musulmans. "Nous n'allons pas discuter avec Morsi car nous considérons qu'il n'est plus légitime", a déclaré Khaled Dawoud, le porte-parole du Front de salut national (FSN), coalition rassemblant des libéraux et des personnalités de gauche. Le FSN a décidé de désigner Mohamed El Baradei comme son représentant dans d'éventuelles discussions avec l'armée.

Après l'annonce de l'armée, lundi, des dizaines de milliers de manifestants enthousiastes ont défilé dans les rues du Caire, d'Alexandrie et d'autres grandes villes du pays. Mais mardi, l'opposition a tenu à clarifier sa position : elle n'est pas favorable à un "coup militaire".

L'ONU et le président américain appellent au calme

De leur côté, les Nations unies ont appelé au dialogue, en soulignant que l'issue de cette nouvelle crise aurait un "impact important" sur l'évolution des autres pays de la région. Le Haut Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme a invité, mardi, les autorités égyptiennes à prendre en compte les demandes de la population. Il les incite aussi à entamer "un dialogue national sérieux" pour désamorcer la crise.

Pour sa part, Barack Obama a invité "toutes les parties à faire preuve de retenue". Le président américain a téléphoné mardi à Mohamed Morsi pour lui exprimer son inquiétude. Il l'a invité à répondre aux revendications des manifestants. Barack Obama, qui achève une tournée africaine en Tanzanie, "a déclaré au président Morsi que les Etats-Unis étaient déterminés à favoriser le processus démocratique en Egypte et qu'ils ne soutenaient aucun camp ou parti", selon la Maison Blanche. "Le président Obama a (…) souligné que la crise actuelle ne pouvait être résolue que par la négociation", a-t-elle ajouté.

Sur le plan international, pour l'instant, seul l'Iran continue de soutenir le président égyptien. Le vice-ministre iranien des Affaires étrangères a appelé mardi l'armée égyptienne à respecter "le vote des électeurs", après l'ultimatum des militaires lancé à Mohamed Morsi.

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