Cet article date de plus de cinq ans.

Des applications numériques à la rescousse de l’agriculture africaine

Compter les mangues ou les oranges d’un champ grâce à une application sur son smartphone, gérer l’irrigation à distance à l’aide d’un simple SMS… L'intelligence artificielle et le big data peuvent aider les agriculteurs africains à booster productivité et revenus. "Le premier rendez-vous de l'agriculture numérique en Afrique de l'Ouest" s'est tenu à Dakar du 28 au 30 avril 2019.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Des travailleurs nettoient, trient et emballent des bananes dans une exploitation proche de la ville de Caxito et créée par le groupe agroalimentaire angolais Novagrolider, le 14 novembre 2018, à 60 km de la capitale de l'Angola, Luanda. L'agro-industrie est une secteur d'avenir pour les économies africaines. (RODGER BOSCH / AFP)

"Il y a une révolution numérique en Afrique", affirme Pascal Bonnet, directeur adjoint du Centre international de recherche agronomique pour le développement (Cirad). Cultiver n'est plus seulement une affaire d'agronomes, le numérique et les sciences de l'informatique prennent une importance croissante dans les métiers agricoles, explique Pascal Bonnet.

Exemple, le projet Pix Fruit qui vise à estimer la production d'un champ de manguiers. Un projet développé par le Cirad et l'Institut sénégalais de recherches agricoles.

Les paysans n'évaluent que très grossièrement leur production. Par exemple en comptant manuellement les mangues sur quelques-uns de leurs arbres et en multipliant par le nombre d’arbres du champ. Plus souvent, c’est l'acheteur qui fait ce calcul, avec des marges d'erreur énormes, de 1 à 5, explique Emile Faye, chercheur français en agro-écologie numérique et responsable de Pix Fruit. C'est ainsi qu'un acheteur peut ne payer que deux tonnes de mangues alors que le paysan lui en livre dix !

L'IA et le big data arrivent en Afrique

Pix Fruit est un système révolutionnaire, faisant appel à l'intelligence artificielle. Il permet de compter précisément la production : il suffit à l'agriculteur de photographier avec son smartphone quelques-uns de ses arbres dans chaque champ et le logiciel fait le reste, grâce à des modélisations complexes. En phase de finalisation pour les mangues, ce système peut être étendu à d'autres produits, comme le café, les agrumes, les litchis, précise Emile Faye. Résultat, les agriculteurs reçoivent une juste rémunération, les grossistes et négociants peuvent quant à eux évaluer à l'avance les productions qu'ils pourront écouler.

Jeune ingénieure télécom sénégalaise de 28 ans, également engagée dans l'humanitaire, Awa Thiam a fondé la société Lifantou et mis au point une plateforme de commerce électronique qui met en relation les cantines scolaires et les coopératives agricoles. Objectif : raccourcir la chaîne de ravitaillement entre cantines et agriculteurs.

"Il y a un besoin énorme"
, explique Awa Thiam à l’AFP, "aujourd'hui 25 à 50% du coût des repas va aux intermédiaires (grossistes, supermarchés...), alors que les écoles et les familles ont des budgets limités. En raccourcissant la chaîne, directement des producteurs aux consommateurs, les cantines peuvent baisser le prix des repas et proposer des menus plus variés".

Sa plateforme informatique baptisée "Graine de coeur" utilise l’analyse des données (big data) et des systèmes cartographiques pour répertorier les producteurs et les écoles sur tout le territoire sénégalais, croiser les besoins et les offres, regrouper les achats des écoles et organiser le transport des denrées. Avec un contrôle des opérations en temps réel.

L'innovation peut révolutionner l'agriculture

Parfois, des technologies plus simples peuvent changer la vie quotidienne d'un agriculteur. La Widim Pompe de la société Nanoair est un simple boîtier, commandé par SMS, qui permet de gérer un système d'irrigation. Avec, à la clé, des économies substantielles, même pour les petits paysans.

"Plus besoin pour l'agriculteur de marcher plusieurs kilomètres ou de dépenser de l'essence chaque jour pour rejoindre ses champs, ou bien d'embaucher un 'gardien-pompiste': il commande le départ et l'arrêt de l'arrosage avec son téléphone portable", explique Oumar Basse, jeune ingénieur informatique sénégalais de 27 ans, cofondateur et directeur de Nanoair. Le succès est au rendez-vous, avec 250 boîtiers déjà vendus, et des commandes du Maroc et de Zambie. La société compte 12 salariés au bout de deux ans d'existence.

Pour Pascal Bonnet du CIRAD, "partout en Afrique, il y a d'excellents chercheurs en informatique, l'agriculture numérique est une vraie chance pour la jeunesse africaine avec des emplois qualifiés à la clé".

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.