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A la télé centrafricaine, «on met avant tout l’accent sur la paix»

Nommée il y a sept mois à la tête de la télévision nationale centrafricaine, la spécialiste en communication Lydie Nzengou Koumat Gueret, réputée à Bangui pour son franc-parler, revient sur le travail colossal qui l’attend. Seule chaîne centrafricaine diffusée dans le pays, la TVCA tente de revenir au premier plan, dans un pays qui peine à sortir de la crise. Interview.
Article rédigé par Noe Michalon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
La directrice générale de la télévision centrafricaine, Lydie Nzengou Koumat-Gueret. (Lydie Nzengou)

Comment se porte la télévision nationale centrafricaine ?
Quand je suis arrivée, c’était assez désorganisé, avec aucun moyen pour fonctionner. J’ai passé les trois premiers mois à restructurer la télévision, à pousser les uns et les autres à travailler ensemble et à préparer des partenariats. Je pense que c’est un pari réussi, même si je ne suis pas encore satisfaite : il faut qu’on relève le défi de la formation du personnel. Beaucoup d’employés n’utilisent les logiciels qu’à 10 ou 15% de leur potentiel, donc on doit renforcer leurs capacités. Mais je tire mon chapeau à la profession, qui arrive à travailler avec quasiment rien, en termes d’équipement.

Quels sont vos principaux partenaires, pour vous développer ?
Nous allons travailler avec le géant chinois Startimes, qui va nous aider à passer de l’analogique au numérique ainsi que dautres. La Société SDG du Mali va nous aider dans la formation, l'habillage et de l'équipement. La chaîne camerounaise CR TV et le Ministère de la Communication du Cameroun vont aussi nous aider pour la formation et l’équipement de notre personnel. Nous collaborons avec l’ORTM, au Mali, qui nous fournit aussi du contenu, tout comme la WebTV Banguiwood.

Avez-vous un modèle de chaîne de télévision qui vous inspire particulièrement ?
Le challenge que je me suis donné, c’est que l’on ressemble à la RTI ivoirienne, et le reste de l’équipe a pris ce défi à bras le corps, pour essayer d’innover, de diffuser des nouveautés ou de l’humour… Pour l’instant, la TVCA dépend encore du ministère de la communication, mais nous ouvrirons bientôt un office, la Radio-Télévision Centrafricaine (RTC) qui sera indépendante.

En tant que télévision publique, parvenez-vous à garder, justement, une certaine indépendance éditoriale vis-à-vis du gouvernement ?
Je pense qu’on s’en sort plutôt bien. Nous couvrons les événements publics, nous invitons les ministres à rendre compte de leur action sur le plateau, mais nous ne faisons pas dans le culte de la personnalité. Nous n’avons aucune censure, je sens une importante marge de manœuvre. Nous arrivons à tenir une ligne éditoriale, qui met avant tout l’accent sur la paix dans le pays.


Les journalistes arrivent-ils à travailler malgré l’insécurité qui persiste dans certaines régions ?
Nous ne sommes pas en mesure de couvrir tous les événements du pays. Nous avons des correspondants là où c’est calme, mais nous ne pouvons pas nous permettre d’envoyer des journalistes avec des caméras dans des endroits risqués. Une fois que le pays ira mieux, nous espérons pouvoir courir tout le territoire !

Quel est le rapport des Centrafricains à l’information ? Y a-t-il beaucoup de téléspectateurs ?
Nous n’avons pas de chiffres récents, mais une étude qui date de la crise (2012-2013 NDLR) estimait à moins de 10% des habitants de Bangui et de ses environs ceux qui regardaient la chaîne. Mais en attendant d’avoir de nouvelles mesures, j’ai l’impression que nous avons beaucoup progressé, les gens regardent beaucoup le journal télévisé et espèrent que nous aurons plus de moyens pour développer la chaîne.

Les quotidiens nationaux sont tirés à assez peu d’exemplaires. Avec les différentes crises et les années scolaires blanches qu’elles ont causées, il y a un vrai problème d’éducation des masses dans le pays. Il n’y a plus cette culture d’antan qu’avaient les Centrafricains, qui voulaient s’informer sur tout. Les gens ont des problèmes plus urgents, à commencer par manger. Pourtant, avoir une information de qualité est crucial et vital pour que le pays se relève.

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