Cet article date de plus de neuf ans.

Algérie : la bataille de l’après-Bouteflika a commencé

La grande muette est sortie de son silence pour apporter son soutien au controversé secrétaire général de l’ancien parti unique, le FLN, Amar Saadani. La déclaration du chef de l’état-major, Gaid Salah, scandalise l’opposition et certains médias. L’ANP, faiseuse de présidents, a-t-elle déjà choisi le successeur d’Abdelaziz Bouteflika ?
Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Le chef d'état-major Gaid Salah à l'Académie militaire de Cherchell (Mohamed Basher Zamry / Anadolu Agency/AFP)

Il n’est pas éternel, sa santé est fragile, ses partisans et ses adversaires le savent. Le grand absent, visible uniquement dans des séquences muettes à la télévision d’Etat lors des réceptions des chefs d’Etat de passage, est très présent. La succession d’Abdelaziz Bouteflika est ouverte. Selon de nombreux observateurs, les stratégies se mettent en place. Pour les médias comme pour les citoyens, le marionnettiste se trouve à la présidence (El Mouradia). Il est rarement à plus de quelques mètres du président, son ombre, selon certains, le véritable président pour d’autres. Opposants et partisans s’accordent à donner des pouvoirs extraordinaires à Saïd Bouteflika, le frère cadet du président.


Dérapage ou nuage de fumée ? En rendant public son soutien au patron du FLN (Front de libération national) Amar Saadani, le chef de l’état-major et vice-ministre de la Défense Ahmed Gaid Salah a encore brouillé les cartes. L’Armée ne cessait de répéter sa neutralité politique. «En affichant son soutien à Amar Saadani, Gaïd Salah annonce le soutien de l’armée à une faction du FLN contre une autre. C’est une démarche dangereuse, qui révèle une régression inquiétante dans la perception des affaires de l’Etat. A ce niveau de la responsabilité, on ne peut pas commettre des impairs de cette nature», s’indigne l’éditorialiste Abed Charef. Et de demander la démission du ministre. 


 
Pour le quotidien El Watan, «cette prise de position aussi surprenante qu’inquiétante provoquera, sans nul doute, une division périlleuse dans la société autour d’une armée nationale qui n’a pas vocation à être au service d’un parti et encore moins d’un clan. Le risque de créer un schisme au sein des forces armées peut devenir réel. L’unité des rangs en prend assurément un sérieux coup, alors que les forces de l’armée sont déployées sur le terrain pour combattre le terrorisme».  
 
Les grandes manœuvres pour la succession de Bouteflika ont bel et bien commencé. Au-delà de la crispation politique, avec une opposition inaudible, le régime en place n’arrive pas à se renouveler, désespérant une classe moyenne citadine impatiente d’accéder aux responsabilités. D’où le verrouillage du champ politique.
 
La machine électorale est en marche. La reconduction du secrétaire général du FLN à son poste et le retour de l’ancien Premier ministre Ahmed Ouyahia, conseiller spécial du président Bouteflika, à la tête du RND (Rassemblement national démocratique) ce mercredi 1à janvier 2015 ne sont pas fortuits. Le message du clan présidentiel est clair : on s’occupe d’abord de nos amis, nos deux principaux appuis, dans l’éventualité d’une élection anticipée. Ces deux partis sont fidèles à Abdelaziz Bouteflika.
 
Pour le candidat malheureux à la présidentielle de 2014 (12,18%), Ali Benflis, la prise de position de l’Armée soulève deux risques majeurs. «Ce qu’il y a d’exceptionnellement grave dans cette lettre est qu’elle est de nature à perturber tant la cohésion de nos forces armées que celle de la nation elle-même». 

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.