Cet article date de plus d'onze ans.

Paris sous la menace d'une "crue du siècle"

La Seine est haute en ce moment à Paris. Elle culmine à 3,6 mètres de hauteur entraînant – les Parisiens y sont habitués – une fermeture partielle des quais. Désagréable pour les automobilistes. Mais ce n'est rien en comparaison de ce qui attendrait les Parisiens en cas de "crue du siècle" semblable à celle qui a touché Paris en 1910. Une crue centennale qui arrivera un jour, les spécialistes en sont certains. Dès lors, les autorités se préparent à affronter une telle montée des eaux.
Article rédigé par Baptiste Schweitzer
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
  (Clara Beaudoux Radio France)

Le calcul est simple. Chaque
année, il existe une chance sur 100 que Paris soit touchée par une crue
centennale. La dernière datant de 1910, les statistiques sont formelles : la
probabilité de voir l'eau monter à plus de huit mètres se rapproche.

Ce scénario s'est produit il
y a donc 103 ans. Du 20 au 28 janvier, le niveau de la Seine atteint 8,62 mètres à Paris Austerlitz, qui sert de zone de mesure de référence. Une partie de la ville est sous l'eau, des barques circulent dans certaines rues, les caves sont inondées,
les égoûts saturés. Il faudra attendre deux mois pour que les Parisiens
reprennent une vie normale. 

Quarante milliards d'euros de dégâts

Un tel scénario est envisagé
par les autorités qui s'y préparent. Le point de départ est simple : les fortes pluies ruissellent sur les sols gelés pendant plusieurs jours. Le débit des affluents de la Seine augmente gonflant celui du fleuve (en 1910 il est ainsi passé de 200 m3 /seconde à 2.000 m3) et en quelques jours l'eau monte et passe les huit
mètres, un seuil critique.

Le fil des évènements est
ensuite facile à dérouler. Les égoûts sont submergés, les caves inondées, le
métro touché, la circulation des trains perturbée, la vie économique paralysée.
"Les dégâts sont évalués à environ 40 milliards d'euros"
, raconte le
colonel Frédéric Lelièvre, chargé de la protection des populations à la
préfecture de police de Paris. Parmi ses fonctions, étudier les différentes
solutions pour protéger les Franciliens des risques de crue. Ils sont 850.000 à
habiter en zone inondable.

Vérifiez si vous êtes en zone inondable sur la carte publiée sur le site de la DRIEE > http://bit.ly/Wmr4Hv

Une crue centennale prévisible 

La "chance" dans
cette affaire, c'est qu'en Île-de-France, les crues ne sont pas subites comme cela peut être le cas
dans le sud de la France en cas de pluies torrentielles. "On a quatre à cinq jours pour s'y
préparer"
, raconte Frédéric Lelièvre. Le site du ministère de l'Écologie vigicrues publie d'ailleurs des bulletins quotidiens.

En cas d'alerte, tous les secteurs ont des plans préétablis. Dès que l'alerte est donnée, les hôpitaux
déprogramment par exemple les opérations non urgentes et ceux éloignés des zones inondables se préparent à recevoir les malades soignés dans ceux proches de la Seine.

La RATP a également son
processus bien rôdé. Avec 140 km de voies inondables sur les 250 que compte le réseau,
des précautions doivent être prises. "Plutôt que de lister les lignes
inondées, il est plus simple de dire celles qui ne le seront pas. Seule la ligne
2 est préservée"
, sourit Frédéric Lelièvre.

Néanmoins, la RATP a mis
plusieurs processus en place pour tenter de limiter les dégâts. Des pompes sont
prêtes à être déployées et du matériel – comme des bétonnières – a été stocké en région parisienne. Le coût de ce dispositif est évalué à six millions d'euros.
Une goutte d'eau en comparaison du risque financier couru par la RATP en cas de
crue. Il est compris entre deux et cinq milliards d'euros.

Voir notre encadré : la RATP affine son dispositif contre les crues > http://bit.ly/12kGBgm

Problèmes d'eau, d'électricité, de poubelles

"La vie des Parisiens
sera touchée"
, raconte Frédéric Lelièvre qui liste quelques unes des conséquences. "Les gestionnaires de parkings souterrains ont quatre jours pour retirer les
voitures et les stocker au Bois de Boulogne"
, précise-t-il. Plus grave, plusieurs centaines de milliers de Parisiens risquent d'être privés d'électricité...voire d'eau potable. "Il restera de l'eau dans les
réseaux de distribution notamment pour pouvoir éteindre les incendies, mais elle  pourrait nesera plus être potable"
, explique Frédéric Lelièvre. Il faudra
donc acheminer des bouteilles.

Les autorités ont également envisagé la question des ordures ménagères. Pas question de les laisser s'entasser. "De bacs de collecte seront mis en place aux abords des zones inondables.
Ensuite ces déchets seront amenés dans des points de stockage comme par exemple à
la porte de Versailles. Enfin, des 
norias de camions les transporteront de nuit dans les décharges de
la région parisienne
", détaille Frédéric Lelièvre.

Reste que toutes ces
précautions n'empêcheront pas l'eau d'envahir les rues. Et une fois la décrue amorcée, il faudra entre 40 et 50 jours pour enregistrer un
début de retour à la normale, sans compter les opérations de nettoyage qui
prendront du temps. 

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