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Congrès des maires : une simulation d'inondation pour aider les élus à mieux protéger leur ville

Pour aider les élus locaux à faire face aux intempéries, comme les inondations qui ont touché le Pas-de-Calais en novembre, des chercheurs ont mis au point une maquette. Elle représente une ville exposée aux risques d'inondation et elle est à tester en ce moment au Congrès des maires de France.
Article rédigé par Thomas Giraudeau
Radio France
Publié
Temps de lecture : 7min
François Rio, maire de Saint-Jean-de-Védas dans l'Hérault, coche les options qu'il choisit pour le jeu et qu'il a appliquées dans sa ville. (THOMAS GIRAUDEAU / FRANCEINFO)

Sur une table, il y a une maquette, le modèle réduit d'une ville côtière typique du Sud-Est, bâtie sur les flancs d'une colline et cette ville est traversée par une rivière. Cette maquette va subir une simulation d'inondation. Ce "serious game" est présenté fin novembre au Congrès des maires de France à Paris. Comment prévenir le risque d'inondation ? Comment protéger les populations ? C'est une préoccupation pour les élus, sachant que 17 millions de Français sont exposés à ce risque, d'après le portail gouvernemental Géorisques.

Des chercheurs de l'Institut National de Recherche Agronomique et Environnementale (INRAE), et du CNRS ont conçu cette simulation d'inondation pour aider les élus locaux à choisir telle ou telle méthode pour éviter de se retrouver les pieds dans l'eau. Sur la maquette, la commune est fictive mais elle présente des caractéristiques similaires à celles qui subissent régulièrement des inondations dans le Sud-Est.

Le co-créateur de la simulation, Franck Taillandier, chercheur spécialisé dans la gestion des risques et l'aide à la décision à l'INRAE, explique les règles de ce jeu baptisé "SIM-MANA" : "Vous allez avoir un certain nombre de solutions à choisir. Vous pouvez construire un barrage, ou bien des digues sur le haut de la ville, la zone la plus critique. Ensuite, vous avez aussi des solutions fondées sur la nature, comme des toitures végétalisées, des bassins d'infiltration qui vont permettre de recueillir l'eau en excédent et d'absorber une partie des précipitations".

Le jeu permet de déplacer des habitants

Il existe d'autres options comme les noues, des fossés végétalisés, ou bien des choix plus radicaux, comme le déménagement des habitants et des commerces dans des zones moins à risques. "Il y a des choses très intéressantes que j'ai déjà mises en place sur la ville", indique François Rio, le maire de Saint-Jean-de-Védas, une commune de 13 000 habitants à côté de Montpellier. L'élu fait donc le test pour voir si les choix faits dans sa ville sont judicieux.

"Je coche les protections amovibles pour les commerces, des revêtements perméables, détaille-t-il. Je viens de les lancer sur ma commune pour un budget de 1,9 million d'euros. Concrètement, on enlève le béton et on revégétalise des cours d'écoles. Et j'agrandis les zones naturelles pour éviter de construire à certains endroits". Dans sa commune, la rivière de la Mosson débordait régulièrement quand il était enfant, et c'était encore le cas ces dernières années dans des villes voisines.

La simulation est lancée : Saint-Jean-de-Védas et François Rio obtiennent la note de 4,23, sur un maximum autour de 10. "Ce n'est pas si mal que ça. Sur le risque inondation, malgré tout, on voit qu'il y a eu des dommages, sur le haut de la ville, mais ils auraient été nettement plus importants sans vos investissements", analyse Franck Taillandier de l'INRAE. Sur une carte, affichée sur l'écran d'ordinateur, on distingue des carrés de couleur jaune, orange et rouge qui matérialisent les dégâts selon les quartiers : les rues et les maisons inondées, les personnes blessées aussi.

Franck Taillandier, chercheur spécialisé dans la gestion des risques et l'aide à la décision à l'INRAE, a conçu ce "serious game" de simulation d'inondations. (THOMAS GIRAUDEAU / FRANCEINFO)

"Je trouve le jeu très intéressant parce qu'on n'est pas formé à cela, ajoute François Rio. Quand on arrive et qu'on devient maire, il n'y a pas sur le bureau une pile de dossiers sur 'que faire s'il pleut, que faire en cas d'incendie'. Il faut qu'on se forme et qu'on apprenne. Et puis, nous n'avons pas des budgets extensibles, cela coûte quand même beaucoup d'argent"

Dans la simulation, si le maire choisit trop d'options, il perd des points. Le budget de sa commune ne peut pas supporter toutes ces dépenses. Dominique Cap, le maire de Plougastel dans le Finistère, une commune où il pleut davantage que la moyenne nationale, et qui a été touchée aussi par les vents très violents de la tempête Ciaran début novembre, vient de découvrir une option plutôt abordable. "Je ne connaissais pas du tout mais les protections amovibles devant les locaux les plus exposés sont très intéressantes. Leur coût est faible. Je trouve que cela a du sens. En revanche, j'ai déjà installé un barrage en amont, investi dans la revégétalisation de places de parking, et des noues", précise-t-il. Dominique Cap va réfléchir à acheter et installer ces plaques de métal devant les commerces pour éviter qu'ils ne soient inondés.

Trois ans de recherches

Les créateurs de cette simulation cherchent, de leur côté, à aller dans les villes intéressées afin de proposer aux élus et aux agents communaux de faire le test. Cette simulation, co-financée par la fondation MAIF, vient tout juste d'être terminée après trois ans de recherches. En situation réelle, hors du salon des maires, une maquette plus grande est installée dans une pièce, et les participants sont invités à jouer des rôles (maire, conseiller municipal, techniciens...) et à simuler des prises de décisions courant sur plusieurs mandats.

Annabelle Moatty, géographe au CNRS et co-créatrice du jeu, reconnaît l'une de ses limites : la ville fictive étant bâtie sur les flancs d'une colline, les caractéristiques des inondations qui y interviennent sont différentes de celles qui ont eu lieu récemment dans le Pas-de-Calais, par exemple. "Les inondations dans ce département ont été plus lentes, elles ont duré de longues semaines. Les autorités ont dû mettre en place des dispositifs de pompage car les nappes phréatiques sont surchargées et empêchent l'évacuation des eaux", estime-t-elle.

"En revanche, en termes de stratégie d'aménagement du territoire et de conciliation, à la fois de la gestion des risques et de la préservation de l'environnement, on peut avoir des leçons qui sont tout aussi utiles aux petites communes du sud de la France que dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais. Mais avec des solutions différentes, que l'on peut proposer à la fin du jeu aux communes", poursuit Annabelle Moatty. Elle et Franck Taillandier souhaitent proposer une maquette plus adaptée à partir de 2024 pour les villes au profil plus plat.

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