Infographie Le mont Blanc a perdu plus de deux mètres en deux ans et culmine désormais à 4 805,59 mètres

Si l'altitude de la plus haute montagne d'Europe occidentale oscille naturellement en fonction des vents et des chutes de neige à son sommet, sa baisse depuis dix ans pourrait être un indicateur du réchauffement climatique, selon les scientifiques.
Article rédigé par Paolo Philippe
France Télévisions
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Une vue du sommet du mont Blanc (Haute-Savoie), le 23 juin 2023. (GREGORY YETCHMENIZA / LE DAUPHINE LIBERE / MAXPPP)

Le mont Blanc, plus haut sommet des Alpes et d'Europe occidentale, a été mesuré mi-septembre à 4 805,59 mètres, en baisse de plus de deux mètres en deux ans par rapport aux derniers relevés, ont annoncé, jeudi 5 octobre, les géomètres-experts de Haute-Savoie. En 2021, le point culminant des Alpes avait été mesuré à 4 807,81 mètres.

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Entre le 14 et le 16 septembre, une équipe d'une vingtaine de personnes composée de géomètres, de scientifiques, mais aussi de sportifs comme l'ancien biathlète Martin Fourcade et l'alpiniste Liv Sansoz, a gravi le mont Blanc pour effectuer des mesures pendant trois jours. Un procédé effectué tous les deux ans depuis 2001.

Alors que la mesure effectuée en 2019 avait été tenue "secrète" car "exceptionnellement basse" (4 806,03 m), le mont Blanc a récemment perdu plusieurs mètres : 4 808,72 m en 2017, 4 807,81 m en 2021 et 4 805,59 m en 2023.

"Une variabilité saisonnière naturelle"

Ces chiffres varient d'une année à l'autre en raison de la taille de la couche de neige qui recouvre le mont Blanc – le sommet rocheux culmine pour sa part à 4 792 mètres et bouge seulement de quelques millimètres en raison de la surrection des Alpes, les mouvements de plaques. "La variabilité du mont Blanc entre 4 806 mètres et 4 811 mètres a toujours existé. Toutes les calottes glaciaires ont une variabilité saisonnière naturelle en fonction des précipitations et des vents", explique à franceinfo Ludovic Ravanel, directeur de recherche au CNRS à Chambéry et géomorphologue.

Lors de la première mesure de la société des géomètres-experts de Haute-Savoie, en 2001, le mont Blanc – dont le sommet est une crête de neige et de glace balayée perpétuellement par les vents – culminait à 4 810,40 mètres d'altitude. Deux ans plus tard, il avait perdu deux mètres (4 808,45 m), avant de repasser au-dessus de la barre des 4 810 m en 2007, et ce jusqu'en 2015, où il est retombé à 4 808,73 m. "Les précipitations et le vent influent sur l'épaisseur des neiges dites éternelles", résume Luc Moreau, glaciologue au laboratoire Edytem à Chamonix (Haute-Savoie).

S'il neige toute l'année au sommet du mont Blanc, et que la fonte y est encore minime, voire inexistante à cette altitude-là, la baisse du point culminant des Alpes "n'est pas représentative du réchauffement climatique", prévient Luc Moreau. Cette donnée offre seulement "une indication du changement climatique, mais ne peut pas être interprétée comme son résultat". Le glaciologue explique ainsi que la mesure du sommet alpin est faite à un instant T et qu'elle aurait pu être différente quelques jours plus tard, en fonction de la météo et des chutes de neige.

"Etant donné le manque de précipitations depuis deux hivers et les deux canicules de 2022 et 2023, l'altitude mesurée répond au climat que l'on a eu depuis deux ans, poursuit Luc Moreau. Cela va dans le sens d'une sécheresse qui résulte aussi d'un réchauffement climatique global en Europe, plus particulièrement dans les Alpes."

Vers une disparition inexorable des glaciers

"Une altitude plus faible que d'habitude peut trouver son origine dans le réchauffement climatique, qui s'opère également à haute altitude", développe Ludovic Ravanel, spécialiste de l'évolution des milieux de moyenne et haute montagne face à l'évolution du climat. Il rappelle que cette mesure, mi-septembre, fait suite "à deux étés où les températures [en très haute montagne] ont été régulièrement positives, y compris au sommet du mont Blanc, ce qui est un marqueur du réchauffement climatique". Le 18 juin 2022, une température de 10,4°C a ainsi été mesurée à la station météo du col Major (4 750 mètres), à proximité du sommet, soit 3,6°C de plus que le précédent record datant de juin 2019.

"Il va maintenant falloir surveiller si la tendance à la baisse de l'altitude du mont Blanc se confirme dans les prochaines années ou si, dans deux ou quatre ans, le sommet est remonté. Mais on a le sentiment qu'on commence à avoir une baisse de l'épaisseur de la glace", concède le géomorphologue Ludovic Ravanel.

D'ici 2100, une très grande majorité des glaciers vont disparaître en raison du réchauffement climatique causé par les activités humaines. "À l'échelle alpine, on va perdre entre 85 et 99% du volume des glaciers à la fin du siècle", prévient Ludovic Ravanel. Et le mont Blanc aussi va être touché. "Il risque d'être de moins en moins blanc, complète Luc Moreau. D'ici 30 à 50 ans, les températures positives vont s'y multiplier, les glaciers froids [comme le mont Blanc, à la différence des glaciers dits tempérés à plus basse altitude] vont se réchauffer et le mont Blanc va fondre et diminuer en épaisseur."

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