Gros sous et basses manœuvres : pourquoi les négociations patinent à la COP21
Au troisième jour de la conférence sur le climat, Laurent Fabius a appelé les négociateurs à "accélérer" le mouvement. Les discussions achoppent encore sur plusieurs aspects.
"Il faut accélérer." En sa qualité de président de la conférence climat (COP21), Laurent Fabius a rappelé à l'ordre les négociateurs des 195 pays, mercredi 2 décembre. "Il nous reste beaucoup de travail. Des formules de compromis doivent être dégagées le plus rapidement possible", a-t-il insisté en conférence de presse.
Jeudi matin, un nouveau brouillon de l'accord a été publié, d'une épaisseur de 50 pages (contre 55 jusque-là). Mais il reste 1 400 phrases ou expressions entre crochets, c'est-à-dire des options qui n'ont pas encore été tranchées. Le temps presse. Les négociateurs doivent rendre un texte raccourci et clarifié samedi midi, afin que les ministres puissent prendre le relais de façon convenable.
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En attendant, francetv info vous explique pourquoi le rythme des négociations est si lent.
Parce que ça coince toujours sur les financements
Les différentes nations sont loin d'être tombées d'accord sur la question des financements, principal point d'achoppement de cette COP21. Le ton est d'ailleurs monté, mercredi. Le groupe "G77 + Chine", qui représente 134 pays en développement, s'inquiète que les pays riches ne respectent pas leurs obligations en la matière.
Leur crainte est née de l'introduction de nouvelles expressions dans le texte, impliquant que la base des donneurs soit élargie. Selon le Telegraph (en anglais), les passages suggèrent que le financement devra se faire non seulement par des pays développés mais aussi par ceux "en position de le faire". Si l'Union européenne et les Etats-Unis ont donné leur accord, le G77 s'étouffe.
Dans un communiqué, relayé sur Twitter, le groupe se dit "profondément préoccupé par les tentatives d'introduire des conditions économiques dans la section sur les finances en cours de négociation". Pour lui, cette précision gomme la responsabilité historique des pays riches dans le réchauffement climatique.
#G77 deeply concerned with the attempts to introduce economic conditions in the #finance section currently under negotiation #ADP2015
— Amb. Mxakato-Diseko (@ClimateG77) December 2, 2015
Parce que la méthode de travail n'est pas assez efficace
L'organisation entre les différentes délégations ne semble pas optimale pour assurer des discussions efficaces. Comme l'a rappelé la Fondation Hulot, jeudi matin, plus de 50 réunions de groupes de travail ont eu lieu en trois jours de conférence. Un nombre trop important pour assurer une bonne coordination. Pour les prochaines heures, les négociateurs devraient changer leur méthode de travail : diminuer le nombre de sous-groupes et traiter les points-clés en même temps.
Parce que les pays du Golfe jouent les trouble-fête
Dans ces discussions, les pays du Golfe, peu motivés dans la lutte contre le réchauffement climatique, n'aident pas franchement à faire avancer le processus. Et notamment sur l'objectif de réchauffement, que les petites îles du Pacifique souhaitent faire passer de 2 à 1,5 degré. Mercredi, l'Arabie saoudite a ainsi tenté de bloquer toute référence à ce nouvel objectif dans le brouillon de l'accord, raconte une députée écologiste du Canada sur Twitter.
Saudi Arabia trying to block reference to 1.5 degrees in draft decision/ADP group, saying it plays to media; not science. #COP21 #climate
— Elizabeth May (@ElizabethMay) December 2, 2015
Selon les informations de francetv info, Riyad exploiterait également le blocage sur la question du financement pour traîner des pieds dans les négociations.
Parce que certains tirent un peu au flanc
Selon la Fondation Hulot, certains pays ne sont pas à la hauteur dans ces premiers jours de négociations et devraient assumer un leadership plus fort. En conférence de presse, le porte-parole de la fondation Hulot Matthieu Orphelin a ainsi appelé certains à faire davantage de propositions. "Des pays peuvent faire plus que ce qu'ils font aujourd'hui, des groupes de pays, par exemple l'Union européenne", a-t-il pointé du doigt. Les négociateurs ont désormais moins de quarante-huit heures pour remettre un brouillon clair.
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