COP21 : les cinq questions qui fâchent (encore) à l'ouverture des négociations
Les négociations seront inévitablement très délicates entre les 195 pays représentés à la conférence sur le climat.
C'est parti pour deux semaines de COP21. Les représentants de 195 Etats sont rassemblés du lundi 30 novembre au vendredi 11 décembre au Bourget, afin de trouver un accord pour limiter à 2°C le réchauffement mondial d'ici la fin du siècle. Les négociateurs, eux, se retrouveront dès dimanche pour commencer les discussions. La température croît à un rythme inédit sous l'effet des gaz à effet de serre, pour l'essentiel liés à la combustion d'énergies fossiles.
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Pour parvenir à cet objectif, les Etats doivent concéder des efforts. Avant l'adoption (ou non) d'un texte juridique permettant d'acter un mode d'action ainsi qu'un calendrier, les représentants de chaque Etat feront valoir leurs intérêts sur plusieurs questions particulièrement épineuses, recensées par francetv info.
Le financement de la transition vers un monde propre
En 2009, les pays industrialisés se sont engagés à fournir 100 milliards de dollars annuels à compter de 2020, pour financer les politiques climatiques des pays en développement. Mais qui paiera et à hauteur de combien ? L'obtention à Paris d'un accord universel contre le réchauffement climatique dépendra de la capacité à s'accorder sur la question financière, a reconnu François Hollande, dans une interview à L'Express. "Les pays émergents - Inde, Brésil, Chine, Afrique du Sud... - ne veulent pas que la lutte contre le réchauffement climatique bride leurs économies", a-t-il rappelé, estimant que c'est sur cette question du développement économique "qu'existe le principal risque de blocage. (...) Nous devons bâtir un système qui puisse leur fournir des financements et un accès aux nouvelles technologies pour réduire l'étape des énergies fossiles", a-t-il ajouté.
A noter que les pays les plus pauvres sont également les premières victimes du réchauffement climatique. "Ils exigent des mesures d'urgence et ne veulent pas attendre, car ils redoutent des mécanismes compliqués qui retarderaient les choix. Ils sont prêts à empêcher un accord, s'il est trop timide", a ainsi rappelé le président de la République. De leur côté, les pays du Nord, et notamment les Européens, peinent à redresser leur économie depuis la crise financière de 2008.
Les modes de contrôles des engagements
Avant la conférence, 170 des 195 pays représentés à la COP21 ont fourni une liste d'engagements, soit les efforts qu'ils sont prêt à concéder, à titre individuel, pour limiter leurs émissions de gaz à effet de serre. S'il s'agit pour la plupart de bonnes intentions, comment s'assurer que ces engagements seront tenus ? Pour cela, des Etats, comme la France, espèrent un accord juridiquement contraignant, quand d'autres refusent de voir leurs politiques environnementales scrutées en permanence. "Les modes de contrôle feront partie de l'accord", a encore assuré François Hollande, dans les pages de l'Express. Mais il a toutefois concédé que "peu de gouvernements acceptent que des institutions indépendantes aillent vérifier le respect de leurs obligations". Trouver une façon de contrôler les Etats sans s'immiscer dans leurs affaires intérieures relève du numéro d'équilibriste.
Même le Premier ministre de la Chine, un pays qui a pourtant fait preuve de bonne volonté pour réduire ses émissions ces dernières années, a émis des "réserves", a ajouté le chef de l'état. "Il ne peut s'agir d'une intrusion", a-t-il conclu.
Les efforts demandés aux pays producteurs de pétrole
L'abandon des combustibles fossiles est loin de réjouir les pays producteurs de pétrole. De l'Arabie Saoudite au Canada, ils traînent évidemment les pieds, arguant que leur forage peuvent assurer un carburant bon marché pour encore plusieurs décennies. Certains d'entre eux n'ont d'ailleurs pas présenté de plan national de réduction d'émissions en vue de la COP21. Là encore, François Hollande a estimé qu'il fallait négocier en douceur : "plutôt que de les mettre au pilori - je rappelle que nous sommes aussi des acheteurs de leur pétrole -, nous devons les accompagner dans la montée en puissance des énergies propres". Cela pourrait-il passer par des transferts de technologies ? Des incitations financières ? Là encore, il faut débattre.
La fixation du prix du carbone
Définir le prix du carbone doit favoriser les investissements dans des technologies plus sobres. En faisant payer les émissions de gaz à effet de serre, l'objectif serait de pousser les entreprises à investir dans des technologies plus vertes. Or, cet enjeu de taille restera pourtant en dehors des négociations climat de la COP21, malgré les nombreux appels en faveur d'un tel dispositif. Dirigeants internationaux, chefs d'entreprise, Fonds monétaire international (FMI), Banque mondiale, tous ont appelé de leurs vœux la mise en place, à l'occasion de la conférence de Paris, d'un prix correspondant au coût de la tonne de carbone émise.
Si ce dispositif n'a pas vocation a atterrir dans l'accord qui devra être signé à l'issue de la COP (il s'agit d'un texte de loi, pas d'une liste d'initiatives concrètes), il fera l'objet de discussions : Brice Lalonde, conseiller spécial des Nations Unies, assure par ailleurs que cet absence"illustre parfaitement le côté un peu abstrait des négociations et du monde dans lequel vivent les diplomates par rapport à la réalité économique du monde." D'ailleurs, il a glissé à l'AFP qu'un volet prix du carbone dans l'accord international n'était "pas totalement exclu", mais peu probable en raison de l'opposition des pays pétroliers et charbonniers.
La fin des subventions aux combustibles fossiles
Les Etats du G20 soutiennent la production d'énergies fossiles à hauteur de 452 milliards de dollars par an, et ce malgré leur impact sur le changement climatique, selon un rapport de l'Overseas Development Institute et de Oil Change International, publié deux semaines avant le lancement de la COP21.
Pour donner un ordre de comparaison, les deux ONG affirment avoir découvert "que le soutien qu'apporte le G20 à la production de combustibles fossiles représente presque quatre fois le montant total des subventions mondiales aux énergies renouvelables (121 milliards de dollars)". Parmi les pays qui apportent le plus important soutien financier aux énergies fossiles, se trouvent la Chine, les Etats-Unis, le Royaume-Uni et le Japon. Autant de pays qui pourraient être invités à rendre des comptes devant les pays les plus vulnérables face au réchauffement climatique.
Ces pays qui n'ont pas souvent voix au chapitre (et certainement pas au G20), bénéficient d'une voix comme les autres dans l'arène des Nations unies. Elles pourraient s'en servir pour peser dans la négociation en mettant les pays riches face à leurs contradictions.
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