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"Les gens ne se rendent pas compte qu'un mot peut détruire une vie", témoigne Camille, victime de cyberharcèlement

Alors que le gouvernement présente, mercredi, en conseil des ministres, son projet de loi contre les violences sexuelles et sexistes, franceinfo a recueilli le témoignage de Camille, une jeune fille de 16 ans, harcelée pendant des mois, sur internet.

Article rédigé par franceinfo - Marion Jort
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le gouvernement veut punir le cyberharcèlement dans la future loi contre les violences sexuelles et sexistes (illustration). (MAXPPP)

Le projet de loi contre les violences sexuelles et sexistes est présenté, mercredi 21 mars, par Marlène Schiappa en conseil des ministres. Outre le harcèlement de rue, le gouvernement veut pénaliser le cyberharcèlement

Dans les cas de harcèlement "en meute", c'est-à-dire à plusieurs sur internet, le texte prévoit qu'une personne pourra être poursuivie même si elle n'a envoyé à titre personnel qu'un seul message injurieux. Aujourd'hui, il faut plusieurs personnes pour parler de harcèlement de groupe. L'objectif est de mieux protéger les victimes, comme Camille, 16 ans. L'adolescente a été cyberharcelée pendant des mois. Elle témoigne pour franceinfo.

Camille, 16 ans, victime de cyberharcèlement : un reportage de Marion Jort

Son grand sourire qui ne laisse pas deviner ce qu'elle traverse encore aujourd'hui. Le calvaire de Camille commence au collège, en 3e. En classe, certains élèves se moquent de son physique. Le harcèlement continue sur internet. Pendant plusieurs mois, la jeune fille reçoit entre trois et cinq messages haineux par jour sur le réseau social Sarahah où les envois sont anonymes.

Un an plus tard, la jeune fille garde tous ces messages dans son téléphone. Ils sont d'une extrême violence : "Même ta mère m'a dit qu'elle aurait voulu te tuer à la naissance", "Demain, tu seras au ciel j'espère, crève ce soir !", ou encore "Pourquoi tu es en vie ? Une fille comme toi devrais mourir."

Idées suicidaires et hospitalisations

Assise sur son lit, l'adolescente un peu timide explique avoir reçu "environ 80" messages de harcèlement. "Les gens ne se rendent pas compte qu'un mot peut détruire une vie, nous anéantir", dit Camille. Le plus difficile, c'était de ne pas comprendre pourquoi on me harcelait"

On finit par se voir comme les personnes nous décrivent. On se dit : 'Je l'ai cherché, je l'ai provoqué et je le mérite.'

Camille, victime de cyberharcèlement

à franceinfo

"On peut perdre toute confiance en soi", ajoute la jeune fille qui a attendu un mois avant d'en parler à ses parents. Elle confie aussi avoir eu des idées suicidaires. Elle a été hospitalisée deux fois. Aujourd'hui, Camille est suivie par un psychologue. 

La difficulté de porter plainte

C'est grâce au soutien d'une association, Les Parents-We are heroes, que l'adolescente est allée porter plainte contre X. Mais, une fois au commissariat, il a fallu prouver son harcèlement. "Ils prennent cela pour des jeux d'enfants, [ils estiment] que tout le monde se critique et [que] c'est la nouvelle génération avec les écrans", raconte Camille.

Alors, la jeune fille montre son téléphone : "Quand ils ont vu la quantité de messages qu'il y avait et les incitations au suicide, ils ont commencé à comprendre que c'était quand même un peu dangereux", se souvient-elle. Camille peut enfin déposer plainte. Rien n'a bougé depuis. "Pour l'instant, je n'ai pas encore eu de nouvelles et je ne sais pas si ça va donner quelque chose ou pas : X, c'est très compliqué de retrouver la personne", lâche-t-elle fataliste.

Aujourd'hui, Camille ne reçoit plus aucun message : elle a désinstallé l'application. Elle espère que le projet de loi dissuadera de potentiels cyberharceleurs.

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