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Cinq règles de base pour prendre un bon "selfie"

Le mot anglais "selfie" désigne un autoportrait, souvent réalisé avec un smartphone. Au Royaume-Uni, il a été nommé "mot de l'année" par le Oxford Dictionnary. Et sa pratique ne cesse de se développer partout dans le monde, avec des résultats... mitigés. 

Article rédigé par Marie-Adélaïde Scigacz
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
Une adolescente se prend en photo avec les statues de cire du groupe britannique One Direction, au musée de Madame Tussauds, à Sydney (Australie).  (NEWSPIX / REX / SIPA )

"Selfie : une photographie qu'une personne a pris d'elle-même, généralement avec un smartphone ou une webcam, et téléchargé sur un réseau social." Voici comment l'art de l'autoportrait numérique a fait son entrée dans l'Oxford English Dictionary en août 2013. Lundi 18 novembre, consécration : le néologisme est élu "mot de l'année" par le vénérable dictionnaire, devant le très controversé "twerk".

Selon ses rédacteurs, l'usage du terme "selfie" a augmenté de 17 000% au cours des douze derniers mois (lien en anglais). Sur Google trends, l'outil permettant d'observer l'évolution d'une requête sur le moteur de recherche depuis 2004, les occurrences explosent en milieu d'année 2012 dans le monde et début 2013 en France. Evidemment, les internautes ne se contentent pas d'en parler. Avant de vous auto-immortaliser, voici quelques astuces. 

1 Préférez cadrer votre visage (plutôt que vos parties génitales)

Décliné de "soi" ("self" en anglais), le selfie n'a de limite que votre anatomie. Ainsi, le "helfie" désigne un selfie cadré sur les cheveux ("hair"), un belfie se concentre sur votre arrière-train ("bottom"), tandis qu'un "drelfie" désigne un selfie alcoolisé ("drunk"). Quant aux photos de jambes nues en contreplongée, internet leur a trouvé un nom : les hot-dog legs. Autant de figures de style que de paliers sur l'échelle de la honte numérique. Ci-dessous, un "belfie" collectif réalisé par l'équipe d'une radio galloise, en train de twerker. Supercombo.

Puisqu'un bon selfie se partage, éviter d'y montrer des parties de votre corps que vous n'exhiberiez pas dans d'autres circonstances. L'ancien candidat à la mairie de New York, Anthony Weiner, a payé cher son goût pour l'autoportrait sous la ceinture (c'est flouté, mais c'est sur TheDirty.comen anglais). En 2012, l'homme politique a utilisé cette photo bien cadrée pour séduire une jeune femme sur Facebook. Une rechute politiquement fatale. Le 6 novembre 2013, les New-Yorkais ont choisi un autre maire. Démocrate aussi, mais adepte de selfies plus conventionnels.

2 Sachez que le selfie ne mérite pas qu'on meure pour lui

Sur le réseau de partage de photos Instagram ainsi que sur Twitter, les mots-dièses #drivingselfie (selfie au volant), #drivingtowork (sur la route du travail), #drivingfast (conduire vite) ou encore le très optimiste #hopeidontcrash (j'espère ne pas me planter) rassemblent plusieurs milliers de clichés. Le phénomène a pris tant d'ampleur que l'Association des automobilistes américains (AAA) a publié un communiqué, lundi, suggérant aux conducteurs de ne "pas devenir ce crétin, mort en prenant un selfie" (lien en anglais)

"Un conducteur qui met deux secondes à prendre une photo quitte la route des yeux sur la distance d'environ deux terrains de basket (...)", prévient l'association. De ce côté de l'Atlantique, la Sécurité routière rappelle que l'usage du portable au volant multiplie par trois le risque d'accident. En France, se faire pincer avec un téléphone au volant est passible d'une amende de 135 euros et d'un retrait de 3 points sur votre permis. "Ne shootez pas en conduisant", prévient donc la marque Toyota dans sa dernière campagne.

3 Racontez des histoires

Le Oxford English Dictionnary pense avoir retracé le premier usage du terme le 13 septembre 2002, sur un forum de discussion australien. Il y accompagne une anecdote. "Heu, j'étais bourré aux 21 ans d'un pote, a écrit l'internaute visionnaire. J'ai trébuché sur des marches et atterri la lèvre (et les dents) en avant. J'avais un trou long d'un centimètre à travers la lèvre inférieure. Désolé pour le point [focal], c'était un selfie." Photo (floue) à l'appui.  

Depuis, les réseaux sociaux ont poussé les internautes à se présenter via leur photo de profil, puis à nourrir leur identité en ligne. Dans cette débauche de moues et de clins d'œil, le défi consiste à sortir du lot. Evitez donc la stratégie "Benny Winfred", l'Américain de 37 ans dont voici un aperçu du compte sur Instagram.

Sur son compte Instagram, Benny Winfred, alias mrpimpgoodgame, ne poste que des "selfies" quasi-identiques.  (BENNY WINFRED / REX / SIPA )

Selon un sondage (lien en anglais) réalisé en août, la moitié des Britanniques (les trois quarts, pour la tranche d'âge 18-24 ans) ont déjà réalisé un selfie. 35% d'entre eux le font pour immortaliser un bon moment (comme Eminem), 34% pour se souvenir d'un instant drôle (comme cette supportrice), 15% parce qu'ils se trouvent bien habillés (comme Tyler, The Creator), bien coiffés (14%), ou juste confiants (13%), comme Rihanna (élue reine du selfie par des gens qui ont vraiment pris le temps de poser la questionen anglais). Face à leur smartphone, stars et anonymes mènent un même combat. 

Bonus : Synthèse parfaite du "photobomb" (un intrus fait irruption dans le cadre) et du selfie classique, la photo volée au côté d'une célébrité mérite doublement d'être partagée. En particulier quand la star joue le jeu, comme le pape (ci-dessous) ou Beyoncé.

4 Vantez-vous, mais avec parcimonie

Moment important + belle tenue = selfie valide ? Le phénomène des selfies d'enterrements, réunis sur un Tumblr, a outré les réseaux sociaux. Même chose pour la photo de ces touristes chinois, à la cool avec un dauphin agonisant (lien en anglais) et celle de l'avocat de George Zimmerman, Don West, fêtant sa victoire dans le procès de l'homme qui a tué Trayvon Martin, avec ses filles : "papa a tout tué" (lien en anglais).

De plus, tout le monde sait que plus vous postez de selfies, moins vous avez confiance en vous. "Pour certain, cela représente le mouvement de façon plus attirante (et donc plus satisfaisante) [à l'opposée de l'image, statique]. Cette vitalité a tendance à gommer des défauts que les personnes remarqueraient davantage si elles se voyaient en photo", explique le docteur Pamela Rutledge, directrice du Media Psychology Research Center, un centre de recherche américain, cité par Mashable (en anglais)

5 Gardez à l'esprit qu'un selfie reste une photo

Il fallait autrefois se photographier face au miroir, tout flash dehors et appareil numérique à la main. Mais l'objectif placé à l'avant d'un smartphone, installé en 2010 sur l'iPhone 4, a permis au selfie "d'avoir l'air aussi travaillé et précis qu'une photo de groupe prise par un tiers", écrit le New Yorker (lien en anglais). Cette évolution a bouté hors du cadre "le miroir et la main bizarrement contorsionnée", deux éléments repoussoirs du selfie de l'ère Myspace.

Outre les applis 100% selfie, comme Shots of Me, en partie financée par le chanteur Justin Bieber, vos smartphones permettent aujourd'hui de soigner vos photographies. Côté mise en scène, le photographe britannique Nigel Barker préconise de fixer le plafond quelques instants avant le "click", histoire de se détendre la peau du cou et d'éviter l'effet double menton une fois la tête revenue en position normale. Inutile aussi de tenir l'appareil au-dessus de votre tête ou d'aspirer vos joues façon "duck face" (face de canard), conseille-t-il sur abc (lien en anglais).

Puisque, depuis octobre, le selfie s'expose au musée, à Londres, n'hésitez pas à jouer l'audace. Comme le comédien britannique Ricky Gervais, vous pouvez n'en faire qu'à votre tête. Et quelle tête.

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