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Apple et Google peuvent-ils révolutionner l'industrie automobile ?

Les deux géants de la Silicon Valley travaillent sur des projets de voitures électriques et autonomes.

Article rédigé par Louis Boy
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4 min
Un prototype de voiture sans chauffeur au siège de Google, en Californie (Etats-Unis), le 2 février 2015. (JUSTIN SULLIVAN / GETTY IMAGES NORTH AMERICA)

Ouvert au public du 5 mars au 15 mars, le salon international de l'automobile de Genève, un des plus grands de la profession, est l'occasion pour les observateurs d'avoir un aperçu des modèles les plus futuristes du marché. Mais cette année, deux noms sont sans doute sur toutes les lèvres, malgré leur absence des allées du salon : Apple et Google. En février dernier, plusieurs journaux ont révélé qu'Apple travaillait sur sa vision de la voiture de demain. Un autre grand géant de la Silicon Valley, Google, oeuvre depuis plusieurs années sur la Google Car, une voiture sans chauffeur, dont elle a dévoilé un nouveau prototype en décembre.

Issus d'une culture différente, et dotés d'une ambition et de moyens financiers démesurés, les deux rivaux semblent idéalement placés pour bousculer les constructeurs historiques. Seront-ils les fabricants de votre voiture du futur ?

Non, la voiture sans chauffeur existe déjà

Dans quelques années ou décennies, votre véhicule aura sans doute beaucoup en commun avec le prototype de la Google Car : une voiture électrique, et capable de circuler sans conducteur - les sources divergent sur l'intention d'Apple de concevoir un voiture autonome. Mais l'industrie automobile n'a pas attendu Google pour travailler sur des voitures capables de se diriger et d'éviter des obstacles. En janvier, Mercedes a présenté un prototype de voiture capable de rouler sans chauffeur, et d'éviter les obstacles et les piétons, en marge du CES, grand salon de l'électronique à Los Angeles.

"Les constructeurs réfléchissent à des systèmes qui surveilleront en permanence le fonctionnement de la voiture" confie Jean-François Belorgey, associé au sein du cabinet de conseil Ernst & Young et spécialiste du marché automobile. Ils pourront analyser les informations transmises par ces voitures connectées et communiquer avec le conducteur. "Un système qui relève de la technique automobile" pour l'expert, qui estime qu'Apple et Google n'ont pas beaucoup à apporter dans ce domaine.

Oui, la voiture du futur sera connectée

"A partir du moment où on aura le droit de lâcher le volant de sa voiture, celle-ci deviendra un salon roulant" préfigure Jean-François Belorgey. Si les véhicules autonomes ne seront pas forcément capables de rouler seuls en permanence, ils devraient laisser beaucoup de liberté au conducteur et aux passagers. Le prototype de Mercedes, avec ses sièges capables de se retourner et ses écrans tactiles sur chaque porte, donne un aperçu possible de l'habitacle potentiel de ces futures voitures. 

"Le conducteur sortira du domaine de l'automobile pour entrer dans celui du web" estime Guillaume Crunelle, en charge de l'industrie automobile au cabinet de conseil Deloitte. Un domaine où les géants de la Silicon Valley ont une avance considérable sur les constructeurs automobile. Au-delà de leur savoir-faire pour concevoir des produits attractifs et faciles d'accès, leur force est de pouvoir "donner du sens aux données" estime Guillaume Crunelle. Il imagine des véhicules capables de choisir le parcours le plus rapide et le moins coûteux, ou de conseiller des destinations au conducteur selon ses préférences. Pour lui, "les commerces seront prêts à payer" pour faire partie de ces suggestions, comme ils le font pour apparaître sur les pages des moteurs de recherche.

Il imagine également une autre révolution : si, aujourd'hui, le constructeur conçoit toutes les fonctionnalités d'une voiture, du logiciel à l'autoradio, l'arrivée d'Apple et Google pourrait changer la donne, explique Guillaume Crunelle. Qui prédit des véhicules ouverts à tous les développeurs et services qui le souhaitent, comme les applications sur les smartphones, et donc "d'avantage d'inventivité".

Non, on ne s'improvise pas fabricant de voitures

Le PDG de Daimler, le groupe du constructeur allemand Mercedes, a accueilli les rumeurs d'une Apple Car avec une pointe de sarcasme : "S'il y avait des rumeurs selon lesquelles Mercedes ou Daimler se préparaient à fabriquer des smartphones, [Apple] n'aurait pas de mal à dormir la nuit. C'est la même chose pour moi" expliquait-il à un site australien"Fabriquer une voiture est très compliqué sur le plan industriel" rappelle Jean-François Belorgey, "et demande un réseau mondial de fournisseurs" que les constructeurs ont mis des décennies à construire, alors qu'Apple voudrait lancer la production de sa voiture dès 2020, selon Bloomberg. Belorgey imagine plutôt Apple se concentrer sur la conception de systèmes informatiques pour équiper les véhicules des constructeurs.

De son côté, son confrère Guillaume Crunelle croit que "des voitures Google et Apple existeront un jour". Mais pour lui, il faudra du temps avant que ces produits futuristes soient économiquement viables et accessibles au plus grand nombre. Sans parler des nombreuses questions juridiques et réglementaires que poserait l'arrivée de voitures sans conducteur sur les routes.

Oui, ils vont donner un coup de fouet à l'industrie

Même si les voitures de Google ou Apple ne voyaient jamais le jour, les deux géants de la Silicon Valley auront apporté un point de vue neuf sur l'automobile. Pour Guillaume Crunelle, leur arrivée sur le marché sera "un accélérateur pour toute l'industrie, qui va forcer les autres à innover" : Apple "ne vendra pas forcément énormément de voitures", mais "proposera une vision de l'automobile qui sera prise en considération". De plus, "ce sont des gens qui sont assis sur des tas d'or", rappelle Jean-François Belorgey. "Ils peuvent se permettre d'essayer des choses au risque de ne pas réussir".

Peut-être pour cette raison, les constructeurs ont réagi de façon plutôt enthousiaste à l'intérêt d'Apple pour l'automobile, à l'image de Carlos Ghosn, le patron de Renault-Nissan, qui dit ne pas y voir une menace, mais un signal "rafraîchissant et réconfortant". Pour lui, les entreprises qui se lancent dans le marché des voitures électriques sont des "alliées", notamment sur la question cruciale du développement des infrastructures.

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