Salaire, retraite... Les fonctionnaires sont-ils des privilégiés?
En supprimant le jour de carence des fonctionnaires, Marylise Lebranchu a rallumé la guerre entre les salariés du public et du privé. Petit comparatif entre ces deux statuts.
C'est un geste en faveur des fonctionnaires. La ministre de la Fonction publique, Marylise Lebranchu, a défendu, jeudi 21 février, la suppression du jour de carence des fonctionnaires dans le prochain budget. La mesure, instaurée par le gouvernement de François Fillon, visait à rapprocher secteur public et secteur privé, où trois jours de carence sont nécessaires avant que la Sécurité sociale ne verse les indemnités maladie.
Pour l'opposition, la proposition de la ministre est injuste. "En cette période de crise économique où tous les salariés du privé sont menacés par le chômage, l'effort doit être équitablement partagé", a estimé Valérie Pécresse, députée UMP. Les 5,2 millions de fonctionnaires français sont-ils vraiment privilégiés par rapport aux salariés du secteur privé ? Le détail point par point.
Des salaires (ou traitements) plus élevés
On pourrait croire que les fonctionnaires sont mieux lotis que les salariés du privé sur le plan du salaire. Les chiffres de l'Insee de 2010 (repris dans ce PDF) vont en tout cas dans ce sens : sur le papier, les fonctionnaires gagnent plus que les salariés du privé. En 2010, leur salaire (ou traitement) net s'élevait, en moyenne, à 2 155 euros par mois, contre 2 083 pour les salariés du privé. Et l'écart est parfois encore plus grand. Ainsi, un agent de l'Etat touche 29 500 euros par an, soit 2 458 euros par mois, et dans la fonction publique hospitalière, on émarge en moyenne à 2 205 euros.
Pourquoi ? François Lenglet, le rédacteur en chef du service France de France 2, avance une explication, rappelant notamment que les qualifications des fonctionnaires sont supérieures à celles des salariés du privé.
Le bémol : Si les fonctionnaires sont mieux payés, il faut toutefois rappeler que les salaires du public stagnent depuis une décennie, contrairement à ceux du privé, où les augmentations demeurent malgré la crise, note Le Monde.fr. Le point d'indice, qui sert de base, est également gelé depuis 2011. Enfin, il existe de très fortes disparités entre les différentes catégories de fonctionnaires. L'Expansion souligne ainsi que les ouvriers et employés de la fonction publique territoriale gagnent, en moyenne, 1 800 euros nets par mois, soit "moins que les salariés du privé", dont le salaire moyen net se situe à 2 082 euros.
Un statut confortable : l'emploi à vie
Le statut de fonctionnaire est pour le moins bénéfique et assure un emploi à vie pour ses agents. Comme le rappelle Le Figaro Magazine, près de 80% des fonctionnaires d'Etat, hospitaliers ou territoriaux possèdent un statut à vie. Et même si les cas de licenciements existent pour faute grave, insiste Luc Rouban, directeur de recherches au CNRS sur TF1, ils restent extrêmement rares.
Le bémol : Toutes les personnes travaillant dans la fonction publique ne bénéficient pas de ce statut. Selon les chiffres-clés 2011 (PDF, tableau p.4) délivrés par le ministère de la Fonction publique, 16,5% des agents sont non titulaires et donc souvent plus précaires. Cela représente 875 000 personnes. Et comme l'indique Le Figaro, les contrats précaires peuvent durer entre trois et six ans dans le public, alors qu'ils ne peuvent pas dépasser les dix-huit mois dans le secteur privé.
De meilleures retraites
Sur ce point, même combat entre le public et le privé. L'âge légal de départ à la retraite passe peu à peu de 60 à 62 ans – dès 2018 – pour tous les salariés. Mais certains fonctionnaires peuvent partir plus tôt. Il s'agit de ceux appartenant à la catégorie active, comme les surveillants de prison, les pompiers, les policiers, les infirmiers ou encore les aide-soignants. Ceux-là peuvent prendre leur retraite dès 57 ans, car leur emploi présente des "risques particuliers".
Les fonctionnaires sont aussi avantagés par rapport aux salariés du public du fait des méthodes de calcul. La retraite de base d'un salarié du privé est calculée sur la moyenne des salaires des vingt-cinq meilleures années, avec un taux plein de 50%. Dans le public en revanche, le niveau maximal des pensions atteint 75% du salaire moyen sur les six derniers mois. Selon les chiffres du Conseil d'orientation des retraites, cités par 20 Minutes.fr, la pension moyenne atteint 1 757 euros dans le public, contre 1 166 euros dans le privé.
Le bémol : C'est sur la façon de cotiser que le privé reprend la main sur le public. Le site Capital.fr explique ainsi que "dans le régime général, les trimestres sont validés à partir du salaire versé : il suffit d’avoir cotisé sur la base de 1 844 euros pour valider un trimestre en 2012, même si on n’a travaillé qu’un mois. En revanche, dans la fonction publique, les trimestres sont validés à partir du temps effectivement travaillé, au prorata du temps de travail pour les agents à temps partiel."
Des avantages parfois décriés
Les logements de fonction des préfets, policiers ou encore de certains membres de l'Education nationale, et une réglementation plus souple en matière d’arrêts maladie sont souvent pointés du doigt par ceux qui critiquent le statut de fonctionnaire. Il est vrai qu'occuper un poste dans la fonction publique présente certains avantages par rapport au privé. Outre ces deux exemples, les fonctionnaires perçoivent, en plus des allocations familiales, "un supplément familial de traitement" en fonction du nombre d'enfants à charge, et ce dès le premier enfant, s'insurge Le Figaro. Un petit plus allant de 2,29 euros pour le premier enfant à 15,24 euros pour le troisième, selon les chiffres du ministère.
Le bémol : Comme le souligne 20 Minutes.fr, il est difficile de comparer les avantages du public et du privé, chacun des deux secteurs pouvant se vanter d'un certain nombre de points positifs. Dans le privé, notamment, une évolution plus rapide dans l'entreprise et un système de primes souvent avantageux. Selon le site Cadresonline.com, celles-ci ont ainsi représenté 12,9% des salaires dans le privé en 2010.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.