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Pourquoi les riches sont-ils de plus en plus riches ?

Selon le classement annuel de "Challenges", la fortune des 500 Français les plus aisés a bondi, en 2012, de 25% sur un an. 

Article rédigé par Salomé Legrand
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
En 2012, en France, un millième de la population détenait 10% du patrimoine national. (COLIN ANDERSON / GETTY IMAGES NORTH AMERICA)

Dix milliardaires supplémentaires en un an. Selon le classement annuel de Challenges, sur l'année 2012, la fortune cumulée des 500 personnes les plus riches de France a bondi de 25%, pour atteindre 330 milliards d'euros. Concrètement, un millième de la population détient 10% du patrimoine des Français. Les Français les plus nantis s'enrichissent de plus en plus, et de plus en plus vite, note le magazine économique. Pourquoi ? 

Parce que leurs revenus augmentent plus vite

"En règle générale, plus on est instruit, mieux on s’en est sorti dans les trente dernières années", écrit Paul Krugman, économiste américain et prix Nobel d'économie, cité par Atlantico. Il note que "le salaire des Américains diplômés a augmenté par rapport à celui des Américains n’ayant pas fait d’études supérieures, de même que celui des Américains qui ont atteint le troisième cycle par rapport à celui des Américains qui n'ont qu'une licence". Un schéma qui s'applique aussi en France. 

Par exemple, selon les données de l'Insee citées par Alternatives économiques, les très hauts salaires, à savoir le 1% des salariés à temps plein du privé les mieux rémunérés, ont connu une croissance annuelle moyenne de 5,8% entre 2002 et 2007, contre 2,3% en moyenne pour les autres.

En outre, le taux de rendement du patrimoine est bien plus important que celui des revenus, la croissance actuelle étant proche de 0%, décrypte Camille Landais, professeur d'économie à la London School of Economics (LSE). De surcroît, plus le capital de départ est important, plus il génère de revenus : "En 1996, nos dix super-riches pesaient 20 milliards d’euros et 25 % de la valeur totale des '500'. Aujourd’hui, le top 10 pèse 135 milliards, soit 40 % du total", note Challenges

Parce que les Bourses ont repris des couleurs

En 2012, "les marchés ont débuté l'année avec un premier trimestre exceptionnel, en réalisant la seconde meilleure performance depuis 1999", et, sur l'année, "le CAC 40 affiche sa 4e meilleure performance depuis 2000", explique l'analyste Arnaud Riverain, au site Sicavonline. Or, la plupart des super-riches disposent non seulement d'investissements en Bourse, mais surtout de participations et d'intéressement dans les grands groupes qu'ils dirigent ou possèdent.

"Ainsi, les revenus financiers ou de l'immobilier sont encore plus concentrés dans le haut de la pyramide. Les revenus du patrimoine représentent 2,6% en moyenne des revenus des 90% les moins rémunérés, contre la moitié pour le 0,01% les plus riches", note l'Insee [lien PDF]. Et les statisticiens de souligner : "A ce niveau, les hausses de salaires comptent parfois moins dans la progression des revenus que les stratégies menées sur les marchés financiers ou dans l'immobilier."

De même, les hauts revenus reçoivent les deux tiers des revenus du patrimoine et les quatre cinquièmes des revenus dits "exceptionnels", notamment les plus-values lors de la vente d'actions, pointe Alternatives économiques. "Quand les plus petits patrimoines sont orientés vers des placements peu risqués comme l'immobilier ou l'assurance vie, les très riches ont des 'family office', c'est-à-dire une équipe dédiée à la recherche des meilleurs rendements", souligne Camille Landais, interrogé par francetv info.

Parce que les impôts ne les touchent pas tant que ça

D'abord, la plupart des hausses d'impôt n'entreront en vigueur qu'en 2013, laissant indemnes les revenus de 2012. Ensuite, elles touchent plus fortement le revenu du travail. Or, l'essentiel de la fortune des très très riches provient de leur capital. Enfin, selon Camille Landais, l'augmentation des retours sur investissements est plus importante que le relèvement des taxes. 

Il souligne de surcroît que ces hausses de taxes sur le capital "ont été pensées de manière très peu homogène, permettant des comportements d'évitement", c'est-à-dire le redéploiement des actifs en profitant des niches fiscales.

Enfin, il existe un "effet de sélection""Ce ne sont pas les mêmes 500 plus riches chaque année", interpelle Xavier Timbeau, économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), interrrogé par francetv info. En effet, si la richesse des 500 Français les plus aisés augmente globalement, c'est qu'elle est tirée vers le haut par certaines arrivées tonitruantes, comme celle de Xavier Niel. Le patrimoine du fondateur de Free, entré dans le top 500 en 2003, a été multiplié par 70 en dix ans. Tandis que ceux qui auraient pu plomber la moyenne sont ressortis du classement.

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