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Etudiants tabassés à la fac de Montpellier : la polémique résumée en quatre actes

Des hommes cagoulés ont fait irruption dans les locaux de la fac de Montpellier, jeudi soir, pour évacuer violemment un amphithéâtre occupé par des étudiants. Retour sur une polémique qui a mené à la démission du doyen de la faculté de droit, vendredi.

Article rédigé par franceinfo - Juliette Campion
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Des étudiants sont rassemblés vendredi 23 mars devant la faculté de droit de Montpellier en soutien aux victimes de violences dans la nuit du jeudi au vendredi par un groupe armé (Sauveur Vanni / France 3)

Les images sont impressionnantes. Jeudi 22 mars au soir, alors que des étudiants occupent les locaux de la faculté de droit de Montpellier (Hérault) pour protester contre les réformes du secteur public, une dizaine d'hommes cagoulés et armés font irruption dans un amphithéâtre. Ils les expulsent violemment des lieux, en frappant et blessant certains d'entre eux. La scène est filmée par plusieurs personnes et fait le tour des réseaux sociaux. La tension monte, d'autant que le rôle du doyen de la faculté, Philippe Pétel, est pour le moins ambiguë puisqu'il est accusé d'avoir favorisé l'entrée de ce commando. Franceinfo remonte le fil de la polémique. 

Acte 1 : des hommes cagoulés agressent violemment des étudiants 

"Ils sont arrivés, ils ont foutu les gens au sol, ils les ont traînés dehors, ils les ont frappés", témoigne une étudiante jeudi soir auprès de France 3 Occitanie. Les mains en sang, elle est visiblement encore sous le choc de la scène à laquelle elle vient d'assister. Les faits se sont déroulés dans la nuit du jeudi 22 au vendredi 23 mars. Une quarantaine d'étudiants occupent alors un amphithéâtre de la faculté de droit de Montpellier, à l'occasion de la journée de mobilisation nationale pour la défense du service public. Vers minuit, une dizaine d'individus masqués font irruption, armés de lattes de bois, de gants renforcés et de pistolets à impulsion électrique.

Ils frappent les étudiants grévistes, faisant plusieurs blessés, dont trois sont envoyés au CHU Lapeyronie de Montpellier. Des brimades, des insultes racistes et homophobes sont également entendues par plusieurs témoins. "On était bien plus nombreux qu'eux, mais je ne sais pas comment on peut répondre à une telle violence", constate, effarée, l'étudiante interrogée par nos confrères de France 3 et de France Bleu Hérault.

Une des étudiantes blessées lors dela violente évacuation d'un amphithéâtre de la faculté de droit de Montpellier, dans la nuit de jeudi 22 mars à vendredi  (CHLOE SANCHEZ / FRANCE BLEU)

Acte 2 : le doyen de la faculté de droit est mis en cause

Le soir même, des étudiants accusent le doyen de la faculté de droit, Philippe Pétel, d'avoir été présent au moment de ces violences et de n'avoir rien fait pour les empêcher. Plusieurs victimes l'accusent d'avoir même ouvert la porte aux agresseurs. Octave, étudiant présent sur les lieux et membre du syndicat Solidaires, affirme à Libération : "C’est le doyen qui a ouvert la porte. Je l’ai vu de mes propres yeux." Dans un témoignage posté sur son compte Facebook, Léna, l'auteure de l'une des vidéos filmées ce soir-là, apporte un autre témoignage, accablant pour Philippe Pétel : "Le doyen n’a pas autorisé la police à rentrer dans la faculté, pour arrêter les hommes qui ont envoyé trois étudiants à l’hôpital."

Le doyen de la fac de droit, je l’affirme parce que je l’ai vu, a montré à ces hommes, dont il n’avait pas peur, les 'cibles'.

Léna, étudiante présente à la faculté de droit de Montpellier jeudi soir

sur Facebook

Octave affirme également à Libération : "La sécurité incendie n’a rien fait, elle les a laissés faire." On constate sur les différentes vidéos que le personnel chargé de la sécurité incendie ne s'interpose à aucun moment contre les agresseurs. Dès lors, le syndicat Solidaires Etudiant-e-s exige le renvoi de Philippe Pétel. Dans un communiqué, le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) demande sa démission immédiate. 

Dans une interview accordée à France 3, le doyen se défend d'être à l'origine de l'attaque. Il estime toutefois que ceux qui ont passé à tabac les grévistes "ont voulu se défendre" et qu'il "ne peu[t] pas les en blâmer"

Acte 3 : étudiants et personnel de la fac se rassemblent en solidarité avec les victimes 

Vendredi, vers 11 heures, les étudiants en droit et sciences politiques de Montpellier se retrouvent devant la faculté pour exprimer leur solidarité avec leurs camarades agressés. 

La polémique enfle concernant le rôle ambigu du doyen et plusieurs étudiants brandissent des pancartes lui demandant des explications. 

De nombreux étudiants se sont rassemblés devant la faculté de droit vendredi 23 mars pour manifester contre les violences qui ont eu lieu la veille, au sein de la faculté.  (Sauveur Vanni / France Télévisions)

A 13 heures, un deuxième rassemblement, à l'initiative de l'intersyndicale des personnels et professeurs des universités de Montpellier, prend le relais. Philippe Augé, le président de l'université, décide de fermer la faculté jusqu'au lundi 26 mars après avoir déposé plainte pour "troubles à l'ordre public". Il dépose également plainte contre X "afin que toute la lumière soit faite sur les événements" explique-t-il à France 3 Occitanie

De son côté, la ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, Frédérique Vidal, condamne les violences et lance une enquête menée par l’inspection générale de l’administration de l’Éducation nationale et de la Recherche (IGAENR). 

Acte 4 : le doyen démissionne 

Dans la soirée de vendredi, le président de l'université reçoit la démission de Philippe Pétel, qui quitte ses fonctions de doyen de la faculté de droit et de science politique.

De son côté, le parquet de Montpellier "a ouvert une enquête pour des faits de violences en réunion et avec arme", annonce le procureur de la République de Montpellier vendredi, précisant que cette enquête vise "également l'intrusion". Elle devrait donc permettre de révéler qui sont les auteurs de cette violente descente. Interrogé vendredi par Libération sur l'éventuelle présence de professeurs parmi les assaillants, Philippe Pétel avait répondu : "C’est possible."

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