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Mayotte : "C'est un régime d'exception qu'on demande parce que la violence est exceptionnellement grave", déclare la députée Liot Estelle Youssouffa

Le département de Mayotte, en plus de faire face à une crise de l'eau, est aussi confronté à "des émeutes quotidiennes", selon Estelle Youssouffa, députée Liot. "On ne se rend pas compte de la violence qu'on a à Mayotte", assure-t-elle.
Article rédigé par franceinfo
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La députée Liot de Mayotte Estelle Youssouffa le 19 juillet 2022 à l'Assemblée nationale. (CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP)

La Première ministre Élisabeth Borne part pour Mayotte où elle est attendue à partir du vendredi 8 décembre sur l'archipel qui connaît plusieurs crises graves. Le département n'a de l'eau au robinet qu'un jour sur trois, en raison de la sécheresse, une eau souvent impropre à la consommation selon plusieurs analyses. Mayotte, où règne aussi l'insécurité puisque l'île est marquée par des guerres entre bandes très violentes. "C'est un régime d'exception qu'on demande parce que la violence est exceptionnellement grave", déclare sur franceinfo jeudi 7 décembre la députée Liot Estelle Youssouffa.

franceinfo : Est-ce que la visite de la Première ministre est attendue à Mayotte ?

Estelle Youssouffa : Je pense que c'est important que Madame Borne vienne à Mayotte. Ça montre l'attention du gouvernement sur la situation. Mais effectivement, la situation sur le terrain, elle est explosive. On a depuis plusieurs semaines des émeutes quotidiennes extrêmement graves, les pires qu'on a connues. Ce ne sont plus quelques dizaines ou centaines de personnes qui s'affrontent, ce sont des milliers de personnes qui descendent faire des raids sur des villages, qui incendient des maisons privées avec une violence aveugle inédite. L'ampleur dans laquelle se déchaîne cette violence est inédite, et on a le sentiment que ni la police, ni la gendarmerie ne peuvent faire face. Donc effectivement, on attend des réponses concrètes parce que là, c'est devenu invivable.

Appelez-vous à l'usage des forces spéciales ?

Je pense que je suis le porte-voix d'une île qui demande un état d'urgence et qui demande de changer la doctrine pour que les forces de l'ordre puissent tirer lorsque c'est nécessaire. Je suis en lien direct avec les forces de l'ordre et on m'a expliqué aujourd'hui que les vandales en culottes courtes sont en train de mettre au point des harpons pour aller tirer sur les forces de l'ordre. C'est du bricolage, mais du bricolage mortel ! On ne se rend pas compte de la violence qu'on a à Mayotte. La doctrine habituelle de simplement se défendre ne suffit pas, parce qu'il y a un sentiment d'impunité où ces jeunes peuvent tout faire. Ils sont protégés par la minorité, ils sont protégés par leur statut de jeunes de 10, 12, 14 ans.

"Ce sont des petits, mais des petits ultraviolents qui se baladent avec des machettes, qui tirent sur les forces de l'ordre avec tout ce qu'ils trouvent"

Estelle Youssouffa, députée Liot de Mayotte

à franceinfo

Donc cette impuissance légale des forces de l'ordre, pour le reste des Mahorais, est insupportable. C'est pour ça qu'il y a une demande d'un état d'urgence, cette demande d'amener les forces spéciales et qu'il y ait des règles d'engagement différentes pour les forces de l'ordre à Mayotte, parce que on a le sentiment que la République a perdu le contrôle de la situation.

Ce que vous demandez, au delà d'un état d'urgence, c'est un régime d'exception finalement ?

Oui, c'est un régime d'exception qu'on demande parce que la violence est exceptionnellement grave à Mayotte. Je vous le dis avec gravité, j'aurais souhaité ne pas en arriver là. Personne ici ne souhaite en arriver là. Mais on n'a plus de vie. On est arrivé à un point où on ne sort plus à partir du 18 heures, personne ne sait s'il va rentrer vivant du travail ou de l'école. Ce n'est pas une vie normale. Il n'y a plus d'activité économique. Et je vous parle de notre survie, alors qu'on n'a pas d'eau au robinet !

Vous imaginez l'effondrement dans lequel se trouve ce département ? On a besoin que la Première ministre vienne. Je ne comprends pas que le ministre Eric Dupond-Moretti n'ait pas trouvé le temps de venir ! Parce qu'il y a un sujet entre les arrestations que font les forces de l'ordre et le fait que les juges remettent en liberté les barbares en deux secondes. Il y a un problème au niveau de la justice et je n'ai jamais entendu Monsieur Dupont-Moretti appeler à des sanctions et des condamnations fermes... de la même manière que je n'ai toujours pas vu Monsieur Attal venir se pencher sur l'absence de scolarisation de nos enfants parce qu'il n'y a pas d'eau dans nos écoles. Je salue que Madame Borne vienne mais je suis un peu consternée du manque de mobilisation des autres ministres qui sont directement concernés par la gravité de la situation des enfants à Mayotte.

L'autre crise à Mayotte, c'est le manque d'eau. Est-ce que la distribution d'eau promise par le gouvernement suffit pour aider les Mahorais ?

Les distributions de bouteilles d'eau sont effectivement en cours depuis plusieurs semaines et c'est important. Est-ce qu'elles sont à hauteur ? Non. Là, actuellement, les bouteilles d'eau, c'est un pack d'eau par personne. Pour une semaine, c'est un litre par jour, alors que les besoins en zone tropicale, c'est au moins deux litres. C'est mieux que rien donc je ne peux pas vous dire qu'on n'en veut pas. Ce serait faux. Mais ça ne répond pas aux besoins. Il faut acheter de l'eau en supermarché qui se vend entre 7 et 12 euros le pack. Le budget pour une famille de quatre personnes, pour juste subvenir aux besoins vitaux, c'est entre 300 et 400 euros par mois, par foyer. Il n'y a pas de "chèque eau" à Mayotte.

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