Le parquet a requis vendredi 175.000 d'amende à l'encontre de Continental Airlines au procès du crash du Concorde
Selon l'accusation, la catastrophe, qui a fait 113 morts le 25 juillet 2000 à Gonesse (Val-d'Oise), a été déclenchée par une lamelle en titane perdue par un avion de Continental, qui avait décollé de Roissy quelques minutes avant le supersonique.
Deux ans de prison avec sursis ont en outre été requis contre le "père" du supersonique Henri Perrier.
Les accusations contre Continental Airlines
Le procureur Bernard Farret a épinglé la "maintenance générale défectueuse" des avions de la compagnie américaine. Il a jugé celle-ci pénalement responsable d'"homicides et blessures involontaires". S'il est suivi par le tribunal correctionnel de Pontoise, la sanction entraînerait la responsabilité civile de Continental avec un enjeu financier global qui dépasse les 100 millions d'euros. Selon Bernard Farret, une lamelle perdue par un de ses DC10, qui avait décollé de Roissy avant le supersonique, a tout déclenché: éclatement d'un pneu, fuite et inflammation du carburant.
Une peine de 18 mois de prison avec sursis a par ailleurs été requise contre deux employés de la compagnie: John Taylor, un chaudronnier qui a, selon le procureur, mal fixé la lamelle, et son chef d'équipe Stanley Ford, qui n'a pas contrôlé son travail.
Le volet français
Dans le même temps, le parquet a requis deux ans de prison contre Henri Perrier,
d'abord directeur des essais en vol puis dirigeant du programme Concorde chez Aérospatiale (aujourd'hui fondu dans EADS), et demandé la relaxe de ses deux co-prévenus français. Il a épinglé de graves lacunes dans le suivi de navigabilité du Concorde, dont Henri Perrier était responsable. "Le suivi de navigabilité du Concorde a péché sur trois points essentiels", a estimé le vice-procureur, Jean-Pascal Oualid: "l'abandon du projet de renforcement de la voilure", la "minoration systématique du risque incendie", et la "minoration du risque de perte de poussée".
La justice reproche en effet aux trois prévenus français de ne pas avoir pris les mesures de précaution nécessaires après les "incidents à répétition" ayant émaillé la carrière du Concorde. Après plusieurs éclatements de pneus, des modifications avaient été faites. Mais un projet de renforcement de l'aile de l'avion, qui abritait les réservoirs, avait été abandonné.
Pour Bernard Farret, Henri Perrier "avait pouvoir de contrôle et de décision". Le procureur lui a notamment reproché un "suivi de navigabilité insuffisamment réactif". Il a en revanche demandé la relaxe de son collègue Jacques Herubel, qui était "sous son autorité" et pour qui le procureur avait déjà demandé un non-lieu pendant l'instruction. Il a également demandé la relaxe de Claude Frantzen, ex-responsable de la direction générale de l'Aviation civile (DGAC).
La réponse des avocats
En marge de l'audience, les avocats de la défense ont reproché au parquet de coller à la thèse tirée de l'instruction. "Ces quatre mois d'audience n'ont servi à rien, c'est consternant", a dénoncé Me Thierry Dalmasso, conseil de M. Perrier. "On a l'impression que rien ne s'est passé pendant quatre mois", a renchéri l'avocat de Continental, Me Olivier Metzner.
"Les incidents antérieurs ont été analysés de manière appropriée par le constructeur et les mesures adéquates ont toujours été prises", a assuré Me Simon Ndiaye, avocat d'EADS. "L'accident était imprévisible", a-t-il réaffirmé.
Les plaidoiries de la défense auront lieu la semaine prochaine, avant la fin du procès le 28 mai. Le jugement ne devrait pas être rendu avant la fin de l'année.
Plainte de Continental contre Air France
Continental Airlines a porté plainte contre Air France pour "obstruction à la justice" après la disparition de documents liés à la navigabilité du Concorde, a annoncé vendredi le tribunal correctionnel de Pontoise. La présidente, Dominique Andréassier, a versé au dossier cette plainte déposée par Me Olivier Metzner au parquet de Bobigny (Seine-Saint-Denis), a-t-elle annoncé avant la suite des réquisitions du parquet.
L'avocat d'Air France, Me Fernand Garnault, a dénoncé "une manoeuvre supplémentaire" de la défense de Continental Airlines.
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