Le ministre du Travail a transmis dimanche aux syndicats un document d'orientation sur la réforme des retraites
Dans ce document qui ne tranche pas sur la méthode retenue, le gouvernement s'engage notamment à sauvegarder le système de retraites par répartition et à assurer le retour à l'équilibre financier à moyen terme.
Il confirme qu'il faudra travailler plus longtemps et prévoie de créer une contribution sur les hauts revenus et les revenus du capital.
Est-ce la première brèche ouverte dans le bouclier fiscal ? Au moins "une entaille" a reconnu le chef de file UMP Jean-François Copé qui a par ailleurs qualifié lundi matin sur RTL "d'excellent document de travail" le texte d'orientation du gouvernement. "Il y a une demande de solidarité nationale" pour cette réforme des retraites, "il est normal que personne n'en soit exonéré, sans pour autant jeter par terre le bouclier fiscal". Le bouclier fiscal "n'est pas mort, je dis juste que c'est une entaille et que c'est une entaille qui a du sens", a expliqué l'élu de Seine-et-Marne.
Les données du problème et les bases de la réforme
Alors que la France comptera 18 millions de retraités en 2030 contre 15,5 millions aujourd'hui, le gouvernement entend à la fois "apporter une réponse durable aux difficultés financières des régimes de retraite" à "l'horizon 2020 ou 2030", et "conforter" le système reposant sur la solidarité entre les générations, où de moins en moins d'actifs cotisent pour de plus en plus de retraités.
Le gouvernement "fera de l'augmentation de la durée d'activité le socle d'une réponse durable et juste au déséquilibre des régimes de retraite", indique le document de 14 pages, envoyé au terme de plus d'un mois de concertation avec les partenaires sociaux, et qui doit servir de base à la rédaction d'un projet de loi d'ici juillet.
Les règles seront changées "de manière très progressive". L'allongement de la durée d'activité se fera "au fur et à mesure que les générations, déterminées par leur année de naissance, atteindront l'âge de la retraite", indique le document.
Parmi les trois leviers que cite le gouvernement pour allonger la durée d'activité figurent l'augmentation de la durée de cotisation, le report de l'âge d'ouverture des droits à la retraite (actuellement à 60 ans), ou le renforcement des incitations à liquider sa pension de retraite au-delà de l'âge légal de 60 ans. Les deux premières hypothèses sont envisageables mais pas la troisième qui passerait par l'instauration d'une décote supplémentaire.
Côté financement du système de retraite, le gouvernement entend "augmenter les ressources" tout en excluant toute hausse générale des prélèvements obligatoires ou des cotisations sociales. Pour ce faire, il souhaite "intégrer dans le champ de la réforme des retraites la mise en place d'une contribution supplémentaire de solidarité sur les hauts revenus et les revenus du capital".
Pour les particuliers, cette contribution "ne donnera pas droit à restitution au titre du bouclier fiscal", précise toutefois le document. Les ressources supplémentaires ainsi collectées seront affectées au fonds de solidarité vieillesse (FSV).
La réforme proposera également des mesures permettant à davantage de Français de "compléter leurs pensions" en "recourant à des dispositifs d'épargne-retraite", indique le document.
Le document exclut plusieurs pistes comme celle d'une baisse des pensions de retraite ou celle d'une hausse générale des prélèvements obligatoires ou des cotisations sociales pour financer le système.
La pénibilité prise en compte
Le gouvernement assure qu'il compte proposer des "règles spécifiques" pour "reconnaître la pénibilité" à ceux qui sont "confrontés à des situations d'usure physique professionnelle".
Il proposera de prolonger un dispositif "carrières longues", créé en 2003, permettant d'autoriser les salariés ayant commencé à travailler très jeunes à partir plus tôt en retraite dès lors qu'ils ont suffisamment cotisé pour obtenir une pension à taux plein.
Il réaffirme par ailleurs qu'il compte "mettre fin à la spécificité française en matière d'emploi des seniors" où le taux d'emploi des 55-64 ans (37,9%) est "beaucoup trop bas".
Enfin, la réforme devra également "permettre de continuer à progresser vers une plus grande équité" entre les régimes du privé et des fonctionnaires.
Pour assurer le succès de la réforme "dans la durée", le gouvernement s'engage à assurer une "gouvernance d'ensemble des régimes de retraite fondée sur des rencontres périodiques avec les partenaires sociaux".
Réactions des syndicats
La CFDT qui avait souscrit à la réforme de 2003, a estimé dimanche que "jouer sur l'âge" est la mesure la "plus injuste", puisque "les salariés ayant commencé à travailler relativement jeunes cotiseront plus longtemps et vont 'porter l'effort'".
Pour Eric Aubin, secrétaire confédéral de la CGT: "Ce qui est demandé aux salariés, ce sont de nouveaux sacrifices par un report de l'âge de départ à la retraite". "On a été écouté mais pas entendu, aucune de nos propositions n'a été retenue".
Jean-Claude Mailly, secrétaire général de FO, redoute lui la légèreté de la ponction. "Il y aura une taxation sur les plus hauts revenus financiers comme on nous l'avait indiqué. De quel niveau ? On n'en sait rien pour le moment, mais ce que je crains c'est que ce soit une recette de poche, de l'ordre du symbole", a-t-il déclaré lundi matin sur Europe 1."
Ce que confirme le document d'orientation, "c'est qu'il va falloir travailler plus longtemps" a-t-il ajouté. Or, "pourquoi voulez-vous que par définition les gens travaillent plus longtemps, hein? ; ça ne règle même pas le problème financier. Ca le règle en partie peut-être mais on va travailler jusqu'à quel âge comme ça?", s'est-il interrogé. "Ce que je reproche au gouvernement, c'est d'avoir exactement le même raisonnement qu'avant la crise.
Comment peut-il dire, on ne peut pas augmenter les cotisations ou on ne peut pas faire un prélèvement type CSG? Que ce serait contre-productif sur le plan économique?", a-t-il ajouté en rappelant que FO appelait à manifester le 15 juin pour protester contre les réformes envisagée, alors que l'intersyndicale CGT, CFDT, FSU, Solidaires et Unsa a appelée à une journée de mobilisation et de grèves le 27 mai.
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