Le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, a annoncé le renfort de 139 policiers à Marseille, après la mort d'un jeune
En déplacement jeudi à Marseille, il a déclaré qu'il voulait en faire un site pilote pour expérimenter les "patrouilleurs" dont la mission est de "mieux prendre en compte les attentes de la population".
Une marche silencieuse, organisée pour Antoine tué alors qu'il cambriolait un local, a réuni jeudi 1500 personnes, selon la police, à Marseille.
La marche silencieuse
La marche silencieuse s'est déroulée avec calme et dignité dans le quartier du Verduron (XVe arrondissement de Marseille), dans le nord de la ville. En tête du cortège, dans lequel avaient pris place de nombreux jeunes, des membres de la famille de la victime tenaient des portraits photographiques du jeune homme, et parmi les manifestants, nombreux étaient ceux qui arboraient un tee-shirt avec, imprimés, son visage et un message: "A jamais nous t'aimerons".
Parmi les banderoles visibles dans cette manifestation calme et à laquelle participaient des élus de droite et de gauche, on pouvait lire: "Tolcio (surnom de la victime, NDLR) ne méritait pas ça". Pour une voisine de la famille d'Antoine, "on ne tue pas un enfant parce qu'il a volé".
La conseillère municipale Nora Remadnia-Preziosi (UMP) a réclamé "plus de policiers nationaux, surtout dans ces quartiers où les gens sont un peu délaissés". "Les citoyens marseillais en ont assez de vivre dans une insécurité croissante. On a alerté les pouvoirs publics depuis des mois pour que la police de proximité soit rétablie", a renchéri un habitant du quartier.
D'autres résidents du quartier du Verduron font état d'une dégradation de l'ambiance, d'une multiplication des actes d'incivilité et des cambriolages dans cette zone à la fois composée de pavillons et de cités.
La visite du ministre de l'Intérieur
Ce drame "n'est que le dernier d'une série qui est trop longue", a déploré le ministre. "Si depuis 2002 la délinquance a reculé à Marseille , elle a reculé de 7% seulement, alors que sur l'ensemble du territoire elle reculait de 17%. (...) Face à cette situation, nous devons réagir fortement", a-t-il affirmé.
100 des 139 agents annoncés par le ministre de l'Intérieur seront affectés, entre le 1er juillet et le 1er septembre, à la "police d'agglomération" qui sera mise en place cet été. Aux mêmes dates, 39 autres fonctionnaires renforceront la police judiciaire.
Ces effectifs s'ajoutent à ceux annoncés il y a six mois par le prédécesseur de Claude Guéant, Brice Hortefeux. Ce dernier avait annoncé en novembre, après le décès d'un jeune de 16 ans abattu d'une rafale de kalachnikov dans une cité, le renfort de cinq agents de renseignement sur l'économie souterraine, de deux unités de force mobile et de 117 adjoints de sécurité, dont le déploiement s'achèvera en juin.
Le ministre a assuré que ces engagements avaient été tenus. Il a toutefois précisé que les deux unités de force mobile seraient "sanctuarisées" à Marseille. De leur côté, les syndicats déplorent qu'elles soient reparties dès janvier pour d'autres missions. Pour Unité police SGP-FO et Alliance, il manque entre 250 et 400 policiers à Marseille. Les syndicats décomptent 3700 policiers dans le département des Bouches-du-Rhône, alors que selon le ministère de l'Intérieur, il y a en a 5000.
Claude Guéant a précisé qu'il serait fait appel aux réservistes de la police, "nombreux dans les Bouches-du-Rhône", notamment pour assurer la sécurité des plages cet été, afin de permettre aux fonctionnaires de rester dans les quartiers. Le ministre de l'Intérieur a également fait de la cité phocéenne un nouveau site pilote pour l'expérimentation des "patrouilleurs". Leur mission: augmenter "la visibilité des policiers en tenue", "mieux prendre en compte les attentes de la population" et "remplir les objectifs traditionnels de prévention, dissuasion et répression".
Mais pour Unité police SGP-FO (premier syndicat) et Alliance, qui décomptent 3.700 effectifs dans le département, contre 5.000 pour le ministère, il manque entre 250 et 400 policiers à Marseille.
Promesse d'un centre éducatif fermé
Il a par ailleurs indiqué avoir demandé à son collège de la Justice de créer à Marseille, où la délinquance des mineurs est importante, un centre éducatif fermé. Dernière annonce, le fonds interministériel de prévention de la délinquance financera à hauteur de 50 % le renforcement de la vidéosurveillance dans la ville, où le nombre de caméras doit passer à 300 en 2012.
Ces annonces ont été saluées par le maire UMP de Marseille, Jean-Claude Gaudin, qui s'est dit "satisfait" de ces annonces. De leur côté, les syndicats les jugent insuffisantes.
De son côté, le président PS de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, Michel Vauzelle, a exprimé le sentiment de "ras-le-bol" des Marseillais. "On ne peut pas en même temps parler de sécurité et réduire les effectifs de police", a-t-il souligné. Il a dénoncé les "promesses non tenues", selon lui, du président Nicolas Sarkozy, puis de Brice Hortefeux, qui s'était engagé à un maintien des renforts.
La mort d'Antoine
Les faits se sont déroulés lundi 2 mai peu avant 19h00 dans la zone pavillonnaire du Verduron, dans les quartiers nord de la ville.
Jean Gabro, un maçon de 56 ans au chômage, avait tiré depuis sa fenêtre avec une carabine 22 long rifle sur l'adolescent. Accompagné d'un autre jeune âgé de 17 ans, Antoine était en train de découper un grillage attenant à une pharmacie et au local d'une société de sécurité. Le tireur n'avait ensuite prévenu ni police ni secours.
L'autopsie a révélé que le jeune de 15 ans avait été mortellement touché par un seul projectile qui a perforé le poumon gauche, le coeur et le foie. Selon le parquet, qui a exclu la thèse de la légitime défense, le maçon dit avoir fait feu à trois reprises, en visant par terre, pour "les faire partir".
Le tireur a été mis en examen pour homicide volontaire et infraction à la législation sur les armes et écroué à la maison d'arrêt de Grasse (Alpes-Maritimes). Le parquet avait requis son placement en détention au vu de "la gravité évidente des faits" et des "risques de représailles".
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