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Pourquoi les Réunionnais manifestent

Troisième nuit de violences sur l'île de la Réunion. Selon la préfecture, 76 personnes ont été interpellées, neuf policiers blessés. FTVi revient sur les raisons d'une semaine mouvementée dans l'île.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Des manifestants dans le quartier du Chaudron, le 23 février 2012 à Saint-Denis (La Réunion). (RICHARD BOUHET / AFP)

Le Chaudron, la ville du Port, Saint-Benoît… Les troubles qui secouent La Réunion depuis trois jours ont désormais gagné toutes les régions de l'île depuis la nuit du jeudi au vendredi 24 février, sans toutefois provoquer d'importants dégâts. La préfecture fait état de heurts sporadiques avec les forces de l'ordre et de barrages routiers constitués de poubelles enflammées. FTVi revient sur les raisons de la colère.

• Pourquoi les Réunionnais manifestent ?

Tout est parti d'un conflit sur le prix de l'essence. Mercredi 15 février, des barrages sont érigés sur les routes de l'île, à l'appel des syndicats des transporteurs routiers. Ces derniers réclament une baisse de 25 centimes à la pompe du prix de l'essence. Dans l'île, le litre d'essence sans plomb coûte 1,66 euro depuis le 1er février, le gazole 1,29 euro.

Au-delà des prix du carburant, les manifestants protestent contre le coût de la vie dans l'île. Dans une étude réalisée en mars 2010, l'Insee indique que la différence des prix à la consommation entre la Réunion et la France métropolitaine est de 6%.

L'écart est particulièrement important pour l'alimentation. Sur l'île, les produits alimentaires coûtent 10,6% plus chers qu'en métropole. Et si l'on ne tient pas compte des différences de consommation, le prix du "panier type" du ménage métropolitain est 36,6% plus élevé à La Réunion.

• Que s'est-il passé cette semaine ?

Lundi 20 février, au Port (ouest), les manifestants passent à la vitesse supérieure. Ils décident d'occuper le seul dépôt d'essence de l'île pour réclamer une baisse des prix du carburant. L'occupation se poursuit le lendemain et les manifestants invitent la population à les rejoindre.

Dans la nuit du mardi au mercredi 22 février, des troubles éclatent dans les villes du Port et Saint-Denis (préfecture de l'île) en marge des manifestations. Dans le quartier du Chaudron, à Saint-Denis, des voitures sont incendiées et des magasins pillés. Le scénario se reproduit les nuits suivantes et gagne l'ensemble de l'île.

Jeudi soir, des groupes de 50 à 100 jeunes investissent le centre-ville, dégradant du mobilier urbain, enflammant des poubelles, provoquant l'intervention des forces de l'ordre qu'ils ont affrontées par des jets de pierres avant d'être dispersés par les grenades lacrymogènes.

Troisième nuit de violence à La Réunion (Nicolas Bertrand et David Dameda, envoyés spéciaux pour France 2)

Selon le bilan de la préfecture, une vingtaine de commerces et bâtiments publics ont été dégradés à Saint-Denis et Saint-Benoît (est de l'île). Dans la ville du Port, un salon de beauté a été pillé. Au total, 76 personnes ont été interpellées. A Saint-Louis (sud de l'île), la police a arrêté 26 jeunes. Selon la préfecture, la grande majorité d'entre eux sont âgés d'à peine 16 ans.

Du côté des forces de l'ordre, les autorités dénombrent neuf blessés. A Saint-Benoît, un gendarme a reçu un cocktail molotov au visage. Il est"sérieusement blessé" a indiqué Benoît Huber, directeur de cabinet du préfet. Au Port, l'incendie du salon de beauté a provoqué l'hospitalisation de deux enfants, incommodés par la fumée. Un escadront de 85 gendarmes est attendu vendredi sur l'île pour renforcer les 476 hommes déployés jeudi soir.

Le ministre de l'Intérieur et de l'Outre-Mer Claude Guéant a condamné les violences vendredi matin. "Ces violences sont absolument inacceptables (…) Ce ne sont pas les violences qui vont permettre de régler les problèmes" a-t-il déclaré, assurant que les pouvoirs publics sont "pleinement mobilisés" sur la question du coût de la vie.

• Quelles solutions pour mettre fin à la crise ?

Pour tenter de trouver une sortie de crise, le préfet Michel Lalande organise vendredi 24 février une table ronde sur la vie chère. Les présidents des assemblées locales, des chambres consulaires, les représentants des associations de consommateurs, des compagnies pétrolières et des professionnels de la route ont été conviés.

En attendant, plusieurs élus de l'île ont émis des propositions. Le président de la région, Didier Robert, a laissé entrevoir jeudi une baisse du prix de l'essence de 5 centimes. La présidente du conseil général, Nassimah Dindar, propose quant à elle de financer un "tarif social" de l'eau, de l'électricité, de la téléphonie et d'internet, assorti d'un gel des loyers par les bailleurs sociaux.

Les partis de gauche continuent, pour leur part, à réclamer une aide exceptionnelle de l'Etat, le PCR revendiquant une "prime de vie chère de 200 euros mensuels" provisoire, et le PS un "panier de la ménagère au prix métropole".

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